[Critique] THE CANYONS

CRITIQUES | 21 mars 2014 | Aucun commentaire

Titre original : The Canyons

Rating: ★½☆☆☆
Origine : États-Unis
Réalisateur : Paul Schrader
Distribution : Lindsay Lohan, James Deen, Nolan Gerard Funk, Amanda Brooks, Tenille Houston, Gus Van Sant, Chris Zeischegg…
Genre : Drame
Date de sortie : 19 mars 2014

Le Pitch :
À Hollywood, Christian, un jeune producteur sulfureux, entretient une relation non moins sulfureuse avec Tara, une actrice. Tara qui voit en secret Ryan, un aspirant comédien, lui-même en couple avec l’assistante de Christian. Alors que tous s’animent vaguement autour de la production d’un petit film d’horreur, Christian doute de la fidélité de sa petite-amie…

La Critique :
Bret Easton Ellis est sorti de l’anonymat en 1985, lorsque son roman, Moins que zéro, est publié. Deux ans plus tard déboule Les Lois de l’attraction, puis vient la vraie consécration avec American Psycho. En trois bouquins, l’écrivain affirme un style pour le moins unique. Une patte brutale, vicieuse et perfide, au service d’une peinture de l’American Way of Life, vue par le prisme d’une jeunesse pas si dorée, dévorée par le fric, le cul et les dépendances. Zombies et Glamorama, ses deux livres suivants, confirmeront. Idem pour Lunar Park, essai dans lequel l’auteur se met lui-même en scène, entre réalité et fiction, rêve et cauchemar. Si la majorité de ses films ont déjà été mis en scène au cinéma (pour le meilleur et pour le pire), jamais Ellis n’avait écrit de scénario. The Canyons est donc son premier. À noter que le film qui nous intéresse aujourd’hui fait suite à Bait, à savoir le premier projet qui devait, avant son naufrage, réunir Ellis et Schrader.
Et Paul Schrader justement, parlons-en. Scénariste légendaire de films cultes comme Taxi Driver, American Gigolo, Mosquito Coast, Affliction ou encore À Tombeau Ouvert, il s’est également essayé à de nombreuses reprises à la réalisation, avec notamment Hardcore, American Gigolo et Affliction. Personnalité incontournable, Schrader, malgré son omniprésence dans la grande histoire du Nouvel Hollywood, est toujours plus ou moins resté dans l’ombre des grands, pour lesquels il a souvent écrit (Martin Scorsese notamment). Son association avec Bret Easton Ellis était alors à elle seule, la promesse d’un nouvel outrage en forme de gros coup de pied dans la fourmilière de la bien-séance.
Hélas, trois fois hélas, au final, le film en question n’a rien d’un coup de pied. Il s’agirait plutôt d’une petit pichenette, qui non contente de ne pas casser beaucoup de briques, ennuie poliment tout du long.

Produit pour la somme dérisoire de 250 000 dollars (en partie récoltés sur le net via une campagne de crowfunding), The Canyons ressemble pourtant à ses deux instigateurs. Le truc, c’est qu’il rappelle plutôt leurs mauvais côtés et non leurs bons. Prenons Bret Easton Ellis. Souvent, il s’avère brillant, percutant et même drôle, sans oublier sa propension à livrer une prose punk bien rentre-dedans et donc forcement intéressante. Parfois néanmoins, il sait aussi être pompeux, prévisible et remarquablement chiant. Comme ici.
Schrader de son côté, possède d’indéniables capacités pour ce qui est de tenir une caméra, même si ce sont ses qualités de scénariste qui resteront probablement. Des films comme Affliction et Hardcore ont prouvé qu’il avait de bonnes idées de mise en scène et les moyens de les mettre en œuvre. D’autres ont davantage éprouvé ses limites. Comme The Canyons.
En gros, on peut dire que sur ce coup, Ellis et Schrader ont un peu joué les feignasses. Leur film ne raconte pas grand chose et ne s’en cache jamais. Bien sûr, on pourra toujours choisir d’y voir une peinture au vitriol des dessous de l’usine à rêve hollywoodienne et de la vie de couple. On pourra aussi apprécier la douce mélancolie qui se dégage de ces échanges nourris au Lexomil entre des personnages qui n’ont pas leur pareil pour brasser du vent, mais bon…

Et puis il y a les acteurs. Passons rapidement sur James Deen, cet acteur de films exotiques pour adultes, catapulté à la tête d’un long-métrage « classique » et qui semble penser que jouer la comédie se résume à bomber le torse, prendre un air hautain et serrer la mâchoire. Oui, passons, car franchement, Deen ne fait rien de remarquable, si ce n’est faire acte de présence pour donner le change à la vraie star du film, Lindsay Lohan. Elle en revanche, est beaucoup plus intéressante. Enfin, façon de parler car on ne peut pas dire que son interprétation force le respect. Apparemment infecte sur le tournage, l’ex-princesse des productions haut de gamme pour ados (les très bons Lolita malgré moi et Freaky Friday), n’a plus rien d’une lolita. Maintenant, elle tiendrait davantage d’une Liz Taylor en fin de parcours. À même pas 30 ans ! Bel exploit pour celle qui n’en finit plus de se tirer des balles dans le pied. Son visage, autrefois si angélique, est aujourd’hui boursouflé par de multiples opérations ratées. La voir tenter de traduire des émotions est un spectacle assez pathétique. Tragique surtout, car sa performance rappelle à quel point elle a tout foutu en l’air. Usée par une vie passée à écluser, Lindsay Lohan n’a plus rien d’une jeune première. Son rôle dans The Canyons est à son image : pathétique et tragique. Pas vraiment mauvaise, Lohan synthétise surtout avec une grande tristesse les dérives d’un mode de vie qui n’en finit plus de faire des victimes. C’est d’ailleurs peut-être pour cela que Paul Schrader a tenu à l’engager et à supporter ses sautes d’humeur… Probablement.

The Canyons n’est pas un bon film. Ce n’est même pas un navet. Entre deux eaux, il est juste terriblement ennuyeux et vain. Creux aussi, mais cela va de soi.

@ Gilles Rolland

the-canyons-lindsay-lohanCrédits photos : Recidive

Par Gilles Rolland le 21 mars 2014

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