[Critique] EVIL DEAD (2013)

CRITIQUES | 1 mai 2013 | 2 commentaires

Titre original : Evil Dead

Rating: ★★★★½
Origine : États-Unis
Réalisateur : Fede Alvarez
Distribution : Jane Levy, Shiloh Fernandez, Lou Taylor Pucci, Jessica Lucas, Elizabeth Blackmore, Phoenix Connolly, Sian Davis…
Genre : Horreur/Épouvante/Gore/Remake
Date de sortie : 1er mai 2013

Le Pitch :
Afin d’aider Mia à se défaire de son addiction à la drogue, ses amis décident de se rendre dans une cabane isolée au fond des bois. Une fois sur place, ils découvrent dans la cave un étrange livre. Sans savoir qu’il s’apprête à convoquer les forces du mal, Eric, l’un des amis de Mia, entreprend de déchiffrer le mystérieux ouvrage et ouvre les portes de l’enfer…

La Critique :
Attention les yeux ! Fini de rigoler ! Oubliez les petits films d’horreur aux affiches pleines de promesses et les trips pisse-froids répétant ad vitam eternam le même schéma sous couvert d’un amour du genre uniquement mis en avant dans le but de faire des thunes. Evil Dead envoie du lourd. Ça saigne, ça fait mal, c’est méchant et forcement jubilatoire.

Les remakes sont légion. Ces dernières années plus que jamais, remakes et reboots se pressent aux portes des cinémas et proposent des relectures bien souvent à la ramasse de classiques. Des classiques du cinéma de genre qui n’en ressortent que très rarement gagnants. Car il faut bien reconnaître que la démarche qui consiste à offrir une cure de jouvence à une histoire déjà racontée par un autre, débouche souvent sur un film beaucoup moins bon que son modèle. Les exemples sont nombreux et on peut citer au hasard, Fog, Total Recall ou encore Les Griffes de la nuit. Pourtant, certains cinéastes, animés d’une passion contagieuse et surtout d’un profond et sincère respect pour leurs ainés, arrivent à livrer des nouvelles versions tout à fait honorables, voire carrément excellentes. En la matière, Alexandre Aja se pose là, lui qui avec La Colline a des yeux, a réussi à surpasser le « classique » de Wes Craven et qui dernièrement, a produit, Maniac de Franck Khalfoun, remake certes beaucoup moins marquant que son modèle, mais quand même assez chiadé pour marquer durablement les esprits.
Le truc avec La Colline a des yeux, c’est que le film original était loin d’être un chef-d’œuvre. Evil Dead, de Sam Raimi, lui, en est un. Et c’est peu dire tant le premier volet de la trilogie de Raimi a non seulement posé les bases d’un genre à part entière, mais a aussi traumatisé plusieurs générations de cinéphages avides de spectacles hardcore évoluant loin des sentiers battus.
Il était donc salement casse-gueule de s’attaquer à Evil Dead. On le répète, mais la démarche même de vouloir refaire un film aussi monumental, apparaît comme tout à fait prétentieuse. Arriver à convaincre à la fois les fans de la première heure du long-métrage de Raimi et les nouveaux adeptes des films d’horreur, n’était pas une mince affaire. Seul quelqu’un de sévèrement burné pouvait mener cette mission à son terme et balayer du même coup les doutes initiaux. En soi quelqu’un comme Fede Alvarez…

Réalisateur de Panic Attack !, un court-métrage ayant favorablement impressionné Sam Raimi, Fede Alvarez livre ici son premier film. Un premier métrage chapeauté à la production par Sam Raimi, Bruce Campbell (l’inoubliable héros de la trilogie originelle) et Robert G. Tapert, le producteur de l’original, pour lequel Alvarez a reçu une belle carte blanche. En soi, l’assurance de pouvoir bosser à sa façon et ainsi d’exprimer à la fois son amour du premier film, mais aussi de s’en détacher suffisamment pour éviter de livrer au final une simple mise à jour clinquante comme on en voit tant.
Un respect qui se traduit tout d’abord par la multitude de clins d’œil répartis ici ou là (le pendentif, le montage de certaines scènes, la cave, la main, etc…) mais aussi par un refus catégorique de se réfugier derrière la sécurité que représentent de nos jours les effets-spéciaux numériques. Pratiquement vierge d’images de synthèse, Evil Dead renoue donc avec la tradition gore du grand-guignol à l’ancienne et déploie des trésors de mise en scène et d’inventivité pour illustrer de manière hardcore les multiples sévices infligés à ses protagonistes. Boucherie totalement décomplexée, dénuée d’humour mais pas forcement de second degré (juste ce qu’il faut), ce remake est bel et bien conforme aux propos de son réalisateur. À peu de choses près car bien sûr, contrairement à ce que Fede Alvarez a pu annoncer, son Evil Dead ne contient pas la scène la plus gore de tous les temps. Braindead, ou encore des trucs obscurs et bien malsains comme Premutos ou Violent Shit ayant déjà provoqué leur lot de régurgitations incontrôlables. Par contre, contrairement à ces films gores, Evil Dead n’est pas drôle, ce qui souligne un peu plus les gerbes d’hémoglobine et les nombreuses amputations. Le contexte est glauque et du coup, le film appuie là où ça fait mal, réveillant chez le spectateur des sensations rares. Titillant des régions du cerveaux anesthésiées par des années de navets aux frissons en toc. Rien que pour cela, Alvarez mérite notre reconnaissance. Les fans apprécieront. À plus forte raison qu’ici, le sang n’est pas là dans l’unique but d’offrir du gore. Il sert l’histoire. Alvarez n’en fait jamais trop. Ce qui peut sembler étrange pour un film principalement bâti sur sa propension à choquer par l’image, mais c’est vrai. Evil Dead propose aussi une histoire et un contexte solides. Les jeunes victimes ne se retrouvent pas dans la bicoque au fond des bois pour niquer et picoler, mais pour venir en aide à l’une des leurs, victime d’une méchante addiction à la drogue. L’ambiance n’est jamais à la fête, y-compris au tout début, contrairement à 95% des films d’horreur qui mettent en scène des jeunes. La gravité est à l’ordre du jour et la tension n’a de cesse de monter en puissance, jusqu’à ce qu’intervienne le climax et son explosion rouge vif à ciel ouvert.

Conscient de l’ampleur du défi qu’il doit relever, Fede Alvarez se montre constamment à la hauteur. Sa mise en scène est à la fois très référentielle, respectueuse donc, mais aussi tout à fait lisible et virtuose quand l’action s’emballe. S’appuyant sur une photographie superbe, Evil Dead distille une atmosphère oppressante et s’avère véritablement « beau » à de nombreuses reprises, le tout étant remarquablement souligné par une bande-son elle aussi grandiose et délicieusement old school.
Terre à terre dans son refus de partir en vrille et de jouer l’excès (ou la montre) Evil Dead est un pur film gore comme l’on en voit trop peu. Effrayant, il possède tous les éléments pour traumatiser la nouvelle génération, trop habituée à vibrer devant des arnaques found footage comme Paranormal Activity. Là, il n’y a pas d’arnaque. La bande-annonce n’est que la face visible de l’iceberg. Le reste est à l’avenant et se montre en permanence brutal et immersif. Une immersion qui doit d’ailleurs beaucoup aux cinq comédiens, relativement inconnus et tous à l’unisson avec la volonté de leur réalisateur d’envoyer du lourd.

Alors : Evil Dead 2013 est-il supérieur à Evil Dead 1981 ? Les plus chevronnés d’entre vous, qui ont découvert à sa sortie ou peu de temps après le classique de Sam Raimi, auront sans doute du mal à préférer cette nouvelle version. Malgré ses « imperfections techniques » (qui donnent au film une large partie de son charme sauvage), le premier Evil Dead reste intouchable. Le film de Fede Alvarez trouvera par contre très probablement chez les plus jeunes, d’ardents défenseurs, qui opteront pour cette mise à jour plutôt que pour son modèle. Comme avec le remake de Massacre à la Tronçonneuse ou encore L’Armée des morts. C’est un fait et Fede Alvarez en semble conscient. Jamais il ne tente de surpasser qui que ce soit et encore moins Sam Raimi. Sous le regard des artisans du premier Evil Dead, Fede Alvarez réalise juste le meilleur film possible compte tenu des circonstances. Il exprime ici son amour et son respect. Car on revient toujours au respect. Si vous remarquez bien, il fait toujours la différence. Ici plus que jamais il constitue peut-être la meilleure raison d’affirmer qu’Alvarez a réussi à imposer sa vision. Plus qu’un remake, son film est une alternative moderne qui pourrait presque s’apparenter à une suite. C’est fort, puissant et en plus, fin du fin, on en prend plein la poire !

Et histoire de vous convaincre un peu plus, allez jeter un œil à la critique (ICI) de l’ami Bruno Matéï sur son excellent site Strange Vomit Dolls !

@ Gilles Rolland

evil-dead-2013Crédits photos : Metropolitan FilmExport

 

Par Gilles Rolland le 1 mai 2013

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paulus
paulus
10 années il y a

ben dit donc gilles tu me fait peur juste avant d aller dormir mais j adore ouille je ne vais plus dans le jardin ce soir gla gla

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[…] des reshoots. Liman a alors cédé la place à Fede Alvarez, le réalisateur du remake d’Evil Dead et de Don’t Breathe. Puis c’est le Covid qui a mis à mal les plans de sortie. À tel […]