[Critique] EYE IN THE SKY

CRITIQUES | 12 septembre 2016 | Aucun commentaire
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Titre original : Eye In The Sky

Rating: ★★★★☆
Origine : Grande-Bretagne
Réalisateur : Gavin Hood
Distribution : Helen Mirren, Alan Rickman, Aaron Paul, Barkhad Abdi, Iain Glen, Phoebe Fox…
Genre : Drame
Date de sortie : 9 septembre 2016 (e-cinéma)

Le Pitch :
Plusieurs terroristes figurant sur la liste internationale des personnes les plus recherchées, sont repérées dans une bâtisse à Nairobi. Alors que les Services Secrets découvrent qu’une opération est en cours de préparation dans cette même maison, le colonel Katherine Powell se heurte aux procédures afin de lancer une opération en vue de stopper les agissements des terroristes. Dans une base du Nevada, deux pilotes de drones sont sur le pied de guerre, prêts à agir en bombardant la zone. Le débat fait rage dans les plus hautes sphères, jusqu’à ce qu’une décision soit prise. L’arrivée d’une petite fille dans la zone de tir remet pourtant tout en question…

La Critique :
Révélé en 2004 avec Mon Nom est Tsotsi, le réalisateur sud-africain Gavin Hood s’est pris les pieds dans le tapis en 2009 en réalisant X-Men Origins : Wolverine, que beaucoup considèrent comme l’un des pires films de super-héros de tous les temps. De quoi ternir son image de jeune talent prometteur, même si, un peu plus tard, c’est encore lui qui fut choisi pour illustrer le classique de la littérature d’Orson Scott Card, La Stratégie Ender. Pas un nouveau four mais pas loin non plus. Du coup, c’est par la petite porte que le cinéaste revient, avec un long-métrage moins tapageur dans la forme, moins commercial aussi, mais soutenu néanmoins par un casting de premier ordre et racontant une histoire forte, en connexion totale avec l’actualité.

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Dans la lignée du Good Kill d’Andrew Niccol, Eye In The Sky suit une opération top secrète visant à éliminer un groupe de terroristes avant qu’il ne passe à l’action, à l’aide d’un drone, depuis une base géographiquement éloignée. Mais contrairement à Good Kill, le film de Gavin Hood ne se focalise pas uniquement sur les pilotes des drones en question mais sur la structure de l’opération, qui voit des éléments issus des armées et des gouvernements anglais et américains, collaborer, quand bien même ils se situent tous dans des locaux très éloignés les uns des autres. Les pilotes des drones agissant quant à eux depuis une base établie dans le Nevada, dans des box perdus dans le désert, assis derrière des écrans, joystick à la main. Une façon particulièrement parlante de mettre en exergue le rôle des nouvelles technologies dans le façonnage de la guerre 2.0 qui ressemble de plus en plus à un jeu-vidéo dont les implications vont bien entendu largement au-delà d’un simple game over ou d’une accumulation de points gagnés par les participants. Ici, on nous montre bien tous les moyens mis en œuvre, ainsi que la distance encore plus grande qui s’impose, entre les cibles et ceux qui appuient sur le bouton. Des exécutants dirigés par des personnes situées dans les plus hautes sphères du pouvoir… Le caractère cynique et froid d’un conflit perfide est souligné par Eye In The Sky, qui fait entrer en compte le facteur humain, grâce à l’arrivée dans l’équation d’une petite fille, représentant à elle seule les dégâts collatéraux si controversés, rattachés à ces fameuses frappes chirurgicales dont on nous a tellement vanté les mérites.
Plutôt simple dans sa structure, le long-métrage de Gavin Hood a pour lui sa sobriété et son refus d’en faire trop. Il se concentre sur son récit, jouit d’un scénario remarquablement écrit et fait confiance aux comédiens pour appuyer là où il faut pour instaurer un suspense et, au final, décupler l’émotion.
Parfaitement rythmé alors que la majeure partie de l’histoire consiste à un bras de fer verbal entre les différents protagonistes pour savoir si il faut ou non lâcher une bombe sur la planque des terroristes malgré la présence d’une enfant dans le périmètre d’action, Eye In The Sky s’impose vite comme un modèle du genre, pour la simple et bonne raison qu’il trouve l’équilibre parfait, n’ennuie jamais, et sait appuyer là où ça fait mal. Il rend le propos limpide et met en valeur les problématiques importantes sans excès de zèle. Il n’est pas non plus manichéen et sait où s’arrêter pour éviter de diluer la puissance de son propos.

Bien sûr, dans ce genre de long-métrage, les acteurs ont une importance capitale. Eye In The Sky n’est pas vraiment un thriller ni un film de guerre. Il n’y a pas de cet humour quasiment omniprésent quand on entend vouloir toucher tous les publics. Ce film assume son rôle et tient bon ses positions. On sent alors Gavin Hood parfaitement à l’aise dans un format en apparence plus modeste (alors qu’en fait pas du tout), face à des comédiens qui pour certains, ne communiquent que par écrans interposés. Alan Rickman, dont c’est le dernier rôle, est brillant, garant à lui tout seul du dilemme qui déchire certains de ces hommes de pouvoir, partagés entre leur devoir et leur humanité encore bien présente, choquée devant les répercutions de décisions fatales. Helen Mirren aussi est impeccable. Froide et implacable, elle personnifie quant à elle la froideur d’un commandement prêt à tout pour arriver à ses fins. Une autorité qui donne des ordres à des soldats bien obligés de s’exécuter, comme nous le montre Aaron Paul, qui reste vissé à sa chaise tout du long, le doigt sur la gâchette, mais qui, grâce à son talent et à une belle économie de moyens, parvient à communiquer de puissantes émotions. Sur le terrain, Barkhad Abdi, la révélation de Capitaine Phillips, est lui aussi déchirant, pris en étau, aux premières loges d’un conflit aux implications tellement complexes, qu’il prend des airs de mascarade aussi tragique qu’absurde.

En Bref…
Plus complet que Good Kill, mais aussi d’une certaine façon plus direct, puisqu’il sait se concentrer sur son sujet sans dériver, Eye In The Sky est un film important et maîtrisé. Il passionne dès le début, effraye et, si besoin était, éveille les consciences.

@ Gilles Rolland

Eye-In-The-Sky-Alan-Rickman  Crédits photos : UGC Distribution

Par Gilles Rolland le 12 septembre 2016

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