[Critique] MY FRIEND DAHMER

CRITIQUES | 10 mars 2018 | Aucun commentaire
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Titre original : My Friend Dahmer

Rating: ★★★★½
Origine : États-Unis
Réalisateur : Marc Meyers
Distribution : Ross Lynch, Alex Wolff, Anne Heche, Dallas Roberts, Tommy Nelson, Harrison Holzer, Liam Koeth, Vincent Kartheiser, Miles Robbins…
Genre : Drame/Thriller/Biopic/Adaptation
Date de sortie : 2 mars 2018 (e-Cinéma)

Le Pitch :
Dans les années 70, Jeffrey Dahmer est un adolescent presque comme les autres. Solitaire et timide, il a cependant d’étranges passe-temps. Mais son caractère décalé et imprévisible lui vaut aussi l’intérêt et la fascination de quelques camarades. Camarades qui sont loin de se douter que son obsession pour la biologie se mêle à une part d’ombre qui grandit de jour en jour. Histoire vraie…

La Critique de My Friend Dahmer :

John Backderf alias Derf Backderf est un auteur de romans graphiques qui s’est taillé une belle renommée dans le milieu de la BD alternative avec des œuvres comme Punk Rock & Mobile Homes (un « must read » pour tout amateur de punk rock qui sent bon la bière et les concerts dans les petites salles) et Trashed. Un auteur également connu pour avoir fréquenté, alors qu’il était au lycée, un certain Jeffrey Dahmer, soit l’un des plus célèbres tueurs de série de l’Histoire des États-Unis. Une rencontre qui le hante d’ailleurs encore, comme il l’a souvent déclaré en interview. Cela dit, c’est l’amitié qui est née de cette rencontre qui a donné naissance, plusieurs années après, à Mon Ami Dahmer, sa meilleure bande-dessinée, basée sur cette relation bizarre, et documentée grâce à des rapports de police et de psychiatres.
Apparu sur la convoitée Black List en 2014, le film My Friend Dahmer en est une fidèle adaptation qui aurait mérité une sortie en salles tant la qualité est au rendez-vous.

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Sérieux killer

Les tueurs en série représentent un matériau fertile pour le cinéma. Incarnant le pire de ce que l’être humain a en lui, ils ont inspiré de nombreux grands films, comme Le Silence des Agneaux, Se7en ou Psychose, pour ne citer que les plus grands. Mais si ils font, à n’en pas douter, des méchants convaincants, peu d’entre eux ont directement inspiré des biopics de qualité. En ne comptant pas Jack l’Éventreur (car à ce jour, certains se demandent même si son existence n’est pas une légende urbaine), et hormis les excellents Zodiac, L’Étrangleur de Boston et Monster (grâce auquel Charlize Theron a obtenu l’Oscar de la meilleure actrice), force est de reconnaître qu’ils ont plutôt occupé le terrain de la série B (Henry, portrait d’un serial killer) avec plus ou moins de réussite, souvent à l’occasion de films putassiers et sortis à l’arrache.
Jeffrey Dahmer quant à lui, a déjà fait l’objet d’un film, Dahmer le cannibale (2002), assez malsain mais plutôt convaincant notamment grâce à la prestation solide de Jeremy Renner dans son premier grand rôle. Tout comme la BD de Backderf, My Friend Dahmer prend le parti original de ne pas montrer un tueur en tant que tel mais plutôt de souligner la psychologie torturée de son sujet, et l’impact qu’il a sur son entourage avant même de passer à l’acte. En soi, il propose une approche nouvelle, presque neutre et toute en mesure, inhérente à son désir de mettre en lumière l’humanité de son sujet.

De l’air, Dahmer !

My Friend Dahmer narre les débuts de celui qui, quelques années plus tard, fut surnommé « le cannibale de Milwaukee ». L’auteur de 17 assassinats dont le récit va horrifier l’Amérique et dont la personnalité va pousser les profilers à remettre en question une « routine » dans laquelle ils s’étaient installés. Dans ce quasi-origin movie, on retrouve un homme complexe, naturellement cruel et insensible, dont l’excentricité consiste à singer les handicapés mentaux pour faire rire ses camarades de classe. Un homme qui se constitue son propre enfer (loin du cliché du serial killer qui a eu une enfance de merde, il n’a pas connu de violence familiale qui généralement constitue un trauma source de futurs problèmes psychiques) et qui s’entraîne dans sa propre descente, à la recherche de tout ce qui pourra refréner ses pulsions. Un être qui provoque le malaise chez ceux qui l’entourent.
Un malaise par ailleurs communicatif, notamment grâce à l’énorme performance de Ross Lynch qui, espérons-le, saura transformer l’essai. Marc Meyers a fait un pari osé (qui a beaucoup plu à l’auteur) de choisir un jeune acteur connu pour ses rôles dans des productions Disney Channel (et comme chanteur de pop-rock family-friendly) qui opère ici un virage à 180 degrés et casse son image de gendre idéal. À l’instar de Charlize Theron dans Monster et du casting de la série Mindhunter (pour les rôles de Kemper, Brudos, Speck ou Radder), My Friend Dahmer mise sur un certain réalisme. La ressemblance physique avec le tueur est par exemple frappante. Lynch colle à merveille à son personnage et se donne à fond. À ses côtés, le reste du casting n’est pas en reste, que ce soit le jeune Alex Wolff (La Face Cachée de Margo) qui incarne Backderf ou encore Anne Heche qui cabotine un peu mais campe avec justesse la mère frappadingue de Jeffrey. Des acteurs bien dirigés et magnifiés par la réalisation de Meyers, tout en sobriété et en subtilité, avec un travail sur la photo dans un style proche du culte Elephant de Gus Van Sant. Sans égaler les classiques cités plus haut, My Friend Dahmer constitue néanmoins une référence du genre. Une réussite pure.

En Bref…
Passionnant de bout en bout, par moment inquiétant alors qu’il n’use pas d’artifices superflus, My Friend Dahmer est à la fois un biopic à la rigueur scientifique mais aussi un excellent thriller. La performance quatre étoiles de Ross Lynch est impressionnante. Aussi subtil et sobre que la BD originale est déjantée, My Friend Dahmer est une réussite totale. En attendant le futur projet de Tarantino sur Manson et le film sur Bundy avec Zac Efron (et l’immense James Hetfield), le long-métrage de Marc Meyers se pose comme un excellent film de serial killer.

@ Nicolas Cambon

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Par Nicolas Cambon le 10 mars 2018

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