[Critique] THE TWO FACES OF JANUARY

CRITIQUES | 21 juin 2014 | Aucun commentaire
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Titre original : The Two Faces of January

Rating: ★★★½☆
Origine : États-Unis/Angleterre/France
Réalisateur : Hossein Amini
Distribution : Viggo Mortensen, Kirsten Dunst, Oscar Isaac, Daisy Bevan, David Warshofsky, Omiros Poulakis…
Genre : Thriller/Adaptation
Date de sortie : 18 juin 2014

Le Pitch :
En 1962, à Athènes, Chester et sa jeune épouse Colette, des américains très fortunés, visitent la ville, quand ils rencontrent Rydal, un arnaqueur à la petite semaine et accessoirement guide touristique, américain lui-aussi. Attiré par la beauté de Colette et par l’apparente richesse de Chester, Rydal se rapproche du couple, sans se douter qu’il vient de s’embarquer dans une suite de mésaventures à l’issue incertaine…

La Critique :
The Two Faces of January marque les débuts à la réalisation du scénariste iranien Hossein Amini. Salué et reconnu mondialement grâce au script de Drive, qu’il écrivit pour Nicolas Winding Refn, Amini a également planché sur Blanche-Neige et le Chasseur ou plus récemment sur 47 Ronin.
C’est en lisant le roman de Patricia Highsmith que l’auteur décida de se coller lui-même à la réalisation de l’adaptation, motivé par le challenge que représentait ce thriller dépaysant.

Ce n’est pas la première fois que Patricia Highsmith, célèbre auteure américaine populaire pour ses polars, tape dans l’œil d’un cinéaste. Une grosse quinzaine de longs-métrages s’inspirent de ses œuvres et quelques pointures comme Claude Miller (Dites-lui que je l’aime, en 1977), Claude Chabrol (Le Cri du Hibou, en 1987), René Clément (Plein Soleil, en 1960), Anthony Minghella (Le Talentueux Monsieur Ripley, en 1999, adapté du même bouquin que Plein Soleil) et bien sûr Alfred Hitchcock (premier a avoir mis en image les écrits de la star des librairies, avec L’Inconnu du Nord-Express, en 1951), ont déjà mis en image ses intrigues tortueuses.
Pas étonnant alors que The Two Faces of January évoque justement le grand Alfred. L’hommage est évident, même si il est tout aussi évident que Hossein Amini a voulu insuffler à cette histoire de faux-semblant sa touche personnelle.

Cela dit, il est temps de s’intéresser de plus près à cette dimension psychologique qui, dans un premier temps, a semble-t-il motivé le scénariste pour se lancer dans le grand bain de la mise en scène. Une dimension visible dans le titre à lui seul. Un titre qui renvoie ainsi à Janus, le dieu antique du commencement et de la transition (Janvier = Janus). Un dieu représentant la dualité de l’homme, personnifié dans le film par les deux personnages incarnés par Viggo Mortensen et Oscar Isaac. Deux hommes à priori différents, destinés à illustrer une dualité propre à la condition humaine. Deux hommes unis par une sale affaire, entrainés dans une spirale infernale de mensonges et de trahisons, et liés par un certain respect mutuel (la relation père-fils est ici abordée de manière métaphorique) et bien sûr par le personnage de Kirsten Dunst.
Dans les faits, cette dimension apparaît bel et bien, mais peut-être pas aussi clairement que le réalisateur l’a souhaité. Difficile d’identifier ce qui empêche vraiment le côté psychologique de ce thriller de sonner comme prévu, mais c’est bel et bien cas. The Two Faces of January fait parfois du sur-place et au fond, si on comprend très bien de quoi il retourne, ce n’est qu’à la fin que le sous-propos plus philosophique et métaphorique apparaît, au détour d’une simple réplique.

Là est le principal défaut du film : se dérouler, certes sans heurt, mais sans trop susciter de passion non plus. L’intrigue principale est simple. Trop peut-être, même si au fond, la structure du récit nourrit le charme vintage de l’ensemble. 100% old School, The Two Faces of January s’adresse aux nostalgiques. Aux cinéphiles amoureux de ses ambiances si particulières, propres aux films de Hitchcock, sans non plus arriver à ce niveau. Un charme largement responsable de l’indulgence qu’il est facile d’accorder au long-métrage. Dès les premières minutes, la magie opère. Les paysages somptueux, magnifiés par une photographie elle aussi délicieusement rétro, et une mise en scène pertinente, quoi que bien discrète, enveloppent les tribulations criminelles de ce triangle amoureux contrarié. On a connu plus tendu et le suspens n’atteint pas des sommets, mais ça fonctionne.
Hossein Amini réussit à imposer son point de vue. Modeste, il n’en fait pas des tonnes.

Les acteurs contribuent bien sûr à rendre The Two Faces of January si séduisant. Kirsten Dunst, solaire et magnétique, évoque les héroïnes hitchcockiennes, avec sa blondeur virginale et son charisme indéniable. Viggo Mortensen exprime quant à lui l’ambiguïté de son personnage grâce à une palette de jeu toujours impressionnante, et à un charisme sans cesse réaffirmé. Couple un poil improbable sur le papier, les deux comédiens jouent à l’unisson d’une partition très classieuse. Oscar Isaac, enfin, revenu des errances folk des frères Coen, apporte une fausse naïveté attachante à ce troisième larron, catapulté au cœur d’une intrigue dont il ne connait pas tous les ressorts.

Pour son premier film, Hossein Amini fait preuve d’une belle maturité. Sa direction d’acteur est toujours inspiré, tout comme ses cadres. À l’occasion d’une poursuite, dans le marché couvert d’Istanbul, le cinéaste se montre même spectaculaire. Sans jamais se défaire de cette patine vintage. Ce parfum désuet qui permet à The Two Faces of January de se détacher. Malgré ses petites longueurs et ses petits défauts. Dépaysant, il témoigne d’une volonté noble de rendre hommage à un âge d’or. De nager à contre-ouvrant d’un sensationnalisme parfois putassier. Ce que n’est pas The Two Faces of January. En soi, une qualité suffisante pour le rendre éminemment sympathique et attachant.

@ Gilles Rolland

The-Two-Faces-of-January-Mortensen-DunstCrédits photos : Studio Canal

 

Par Gilles Rolland le 21 juin 2014

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