[Critique] WARM BODIES

CRITIQUES | 21 mars 2013 | 1 commentaire

Titre original : Warm Bodies

Rating: ★★★½☆
Origine : États-Unis
Réalisateur : Jonathan Levine
Distribution : Nicholas Hoult, Teresa Palmer, John Malkovich, Rob Corddry, Dave Franco, Analeigh Tipton, Cory Hardrict…
Genre : Comédie/Fantastique/Romance/Adaptation
Date de sortie : 20 mars 2013

Le Pitch :
8 ans après l’Apocalypse. Les morts-vivants ont envahi la planète. R est un jeune zombie qui passe ses journées à se balader autour de l’aéroport qui lui sert de foyer, essayant de communiquer avec son meilleur ami, tout en faisant la collecte d’objets délaissés dans les rues désertes, sans oublier de manger de la cervelle. Les zombies ne savent plus qui ils sont : ils ont perdu toute identité, toute mémoire. Les plus désespérés finissent par pourrir, devenant des monstres squelettiques qu’on appelle des Osseux et qui ne font aucune différence entre humain et zombie. Tout change lorsque R et ses potes interrompent les recherches d’un petit groupe de survivants. Des réfugiés du dernier bastion de l’humanité dirigé par le Colonel Grigio, un militaire dur-à-cuire et amoureux de la gâchette. R rencontre Julie, la fille de Grigio, et le coup de foudre réanime son cœur. L’amour entre le mort et la vivante agit comme un virus émotionnel, et les autres zombies commencent à retrouver leur humanité. Mais la tragédie peut encore frapper : les Osseux deviennent de plus en plus nombreux, et un Grigio furax part à la recherche de sa fille…

La Critique :
Un an de plus, une apocalypse de plus. On pourrait penser que la renaissance des morts-vivants, qui a plus ou moins commencé il y a presque une décennie lorsque le 28 Jours Plus Tard de Danny Boyle ressuscita tout un genre, aurait enfin mordu la poussière. Mais la tendance se poursuit sans relâche, aussi coriace que les mangeurs de cervelle qui peuplent Warm Bodies Renaissance. Une parodie tendre et légère des films de zombie qui n’aurait sans doute pas vu le jour si The Walking Dead n’avait pas prolongé cette obsession morbide (c’est le cas de le dire) bien au-delà de ce qui aurait dû être sa conclusion logique. Il y a beaucoup de théories circulant autour du sujet de la popularité culturelle des zombies et pourquoi c’est un genre qui ne se meurt jamais. La plupart s’établissent typiquement avec « la fascination morbide de la mort », qui avait besoin d’un nouvel abri maintenant que les vampires sont devenus exclusivement des objets fétiches pour des écrivains (es) sexuellement frustré (e)s.

Une autre théorie peut s’articuler autour du même concept : les monstres au cinéma, particulièrement ceux qui existent parmi des hordes paradoxalement faciles à éliminer mais impossibles à arrêter, servent presque toujours de reflet pour des craintes d’actualité qui sont plus banales ; les peurs de l’homme. Les vampires manifestent la terreur d’une sexualité irrésistible, les loups-garous personnifient notre propre nature animale, Godzilla est le spectre de l’arme nucléaire, etc. Pour les zombies, il suffit de contempler l’état de nos angoisses modernes : la diminution des ressources, l’expansion urbaine, l’effondrement d’une infrastructure et la surpopulation. Pas étonnant que ces créatures soient à la mode. On pourrait également trouver du mérite dans l’idée que les zombies sont devenus la nouvelle façon de raconter ces histoires de l’homme moderne qui défend le rempart de la civilisation contre l’homme sauvage, sans que l’inconfort du racisme ou du classicisme viennent envahir le genre, comme ils l’avaient fait auparavant (voir Zoulou pour plus de détails).
Inspiré d’un roman populaire d’Isaac Marion, Warm Bodies reconnaît cet analogie, tout en s’amusant avec les autres conventions du genre. Le film se déroule dans le monde qui est maintenant devenu la version par défaut du futur proche post-apocalyptique selon les zombies, mais avec une variation sur le concept des morts-vivants, qui suit un règlement qui est plus facile à comprendre métaphoriquement que scientifiquement. Dans Warm Bodies, les zombies suivant la bonne vieille tradition de traîner la patte, conservent des fragments minuscules de leur humanité déchue jusqu’à ce que leurs cadavres dépérissent en squelettes vivants qu’on appelle des « Osseux », agiles comme tout mais consumés par leur instinct animal. Également dans cette version, suivant une démarche qui relève d’une telle inspiration qu’on est prêt à pardonner le fait qu’ils ont piqué l’astuce à la saga Underworld, les zombies cherchent spécifiquement à bouffer les cerveaux des humains pour absorber les souvenirs de leurs victimes et se shooter d’une brève dose d’humanité. Comme le fait R (Nicholas Hoult) lorsqu’il se tape un casse-croûte sur le petit ami de Julie, une survivante humaine et chasseuse de zombies dont il tombe amoureux.

Leur relation est inconfortable, c’est le moins qu’on puisse dire. R ne s’y connaît pas trop en filles, étant donné qu’il est mort. Mais lorsqu’il traîne avec Julie, façon Belle et la Bête, des changements étranges se produisent : son corps cesse de pourrir et il commence à retrouver la mémoire. Il arrive même à sortir deux ou trois mots pour articuler une phrase. Apparemment, l’amour triomphe de tout, même quand on est un zombie.

On parle ici du gimmick central du film. Si c’est un pitch que certains trouveront trop bizarre ou nunuche pour son propre bien (et pourrait empêcher leur appréciation du film), c’est bel et bien le but. Le livre de Marion marchait intentionnellement sur les plates-bandes de Roméo et Juliette (au cas où les noms des deux tourtereaux ne le laissent pas deviner), mais Warm Bodies vise plus haut, poussant le rôle désormais populaire du monstre fantastique comme beau gosse surnaturel à son extrême, en appliquant la recette sur les zombies et enveloppant le tout dans la fondation narrative « l’amour nous rend humain » la plus mignonne et absurde qui soit.

Ce qui surprend, et par conséquent élève le statut de Warm Bodies au-dessus d’un simple sketch parodique qui est seulement là pour dévaster l’univers de Twilight et le transformer en quelque chose d’assez spécial, c’est la sincérité et l’absence totale d’ironie avec lesquelles le film reste fermement dévoué à son pitch ridicule. Clairement, il pense que la manie des apocalypses de zombies et le fétichisme des romances surnaturelles, méritent d’être pointés du doigt et gentiment réprimandés, mais n’hésite pas à vraiment creuser sa propre histoire d’amour excentrique. Et à chaque fois qu’il revient sur cette métaphore filée des morts-vivants redécouvrant leur humanité grâce au pouvoir de l’amour, il le fait avec le plus grand sérieux.

Cela revient à dire que le film lui-même est légèrement différent de la comédie promise par le marketing. Oh, on n’oublie pas de nous servir le sarcasme et l’humour sec sur la banalité quotidienne d’une vie/mort de zombie, mais plutôt en guise d’entrée, avec les combats slapstick entre humains, zombies et Osseux réservés pour le dessert final. La majorité du film est dédiée à l’histoire d’amour centrale entre la belle et le zombie, lui accordant assez de place et de temps, pour que leur relation se déroule d’une façon « naturaliste », du moins dans la mesure d’une situation aussi dépareillée que celle-ci. S’ajoutant à l’ambiance pittoresque d’une comédie romantique, le fait que R est incapable de prononcer des paroles complètes presque toute la durée du film, laissant place à des observations et des explications qui sont communiquées à travers un monologue interne. D’habitude, cet outil scénaristique déconcentre souvent, mais s’avère curieusement efficace ici dans les mains de Hoult, qui fait des merveilles avec sa narration caustique. Et il ne faudrait pas oublier la retenue admirable de John Malkovich dans le rôle du père militaire et zombiephobe de Julie, qui tire d’abord et pose les question ensuite…pardon, jamais. Peut-être a-t-il a compris qu’il ne pourrait jamais devancer le sujet du film. Le sujet a déjà perdu la boule.

Warm Bodies est drôle, malicieux et traité d’une main bien plus délicate que les teensploitation paranormaux de base. Jonathan Levine, qui était précédemment aux commandes de la comédie sur le cancer 50/50 ; a un don pour l’usage de la musique, et obtient des victoires avec les prestations de ses acteurs. Son film est mignon, d’une douceur presque naturelle, et entraîne la découverte encourageante que les films de zombie pourraient bien trouver d’autres terrains à explorer. Et si c’est pas aussi drôle que le dernier Twilight, Révélation : 2ème partie, qui n’était pas strictement censé être une comédie, pourtant…

@ Daniel Rawnsley

WARM BODIESCrédits photos : Metropolitan FilmExport

Par Daniel Rawnsley le 21 mars 2013

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ThaliaGrace
ThaliaGrace
10 années il y a

Trés beau film