[Critique série] COBRA KAI – Saison 1

SÉRIES | 4 juin 2018 | 1 commentaire
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Titre original : Cobra Kai

Rating: ★★★★½
Origine : États-Unis
Créateurs : Josh Heald, Jon Hurwitz, Hayden Schlossberg
Réalisateurs : Jon Hurwitz, Hayden Schlossberg, Jennifer Celotta, Josh Heald, Steve Pink.
Distribution : William Zabka, Ralph Macchio, Xolo Maridueña, Mary Mouser, Courtney Henggeler, Tanner Buchanan, Joe Seo, Jacob Bertrand, Nichole Brown…
Genre : Drame/Suite
Nombre d’épisodes : 10
Diffusion en France : YouTube

Le Pitch :
Johnny Lawrence s’éveille dans le taudis qui lui sert d’appartement avec une énième gueule de bois. 34 ans se sont écoulés depuis sa défaite au tournoi de karaté de All Valley, lui qui concourait sous les couleurs du dojo Cobra Kai. Alcoolique, dépressif, Johnny n’arrive pas à garder un boulot, ne voit plus son fils, vit seul et ressasse les souvenirs d’une jeunesse dorée désormais bien loin. Daniel LaRusso lui, le gagnant du tournoi, l’ancien élève de Maître Miyagi, est devenu un riche entrepreneur. Sûr de lui, père de deux enfants et mari aimant, il mène une vie de rêve. Quand un coup du sort voit les deux anciens rivaux se rencontrer, les tensions ne tardent pas à réapparaître. Quand Johnny décide de faire renaître le dojo Cobra Kai de ses cendres et d’entraîner son jeune voisin, les choses empirent. Daniel n’étant pas du tout enclin à le laisser faire…

La Critique de la saison 1 de Cobra Kai :

Quand YouTubeRed, la plate-forme de streaming payante de YouTube, annonça la mise en chantier d’une série en forme de suite au film culte Karaté Kid, de John G. Avildsen, rien ne permettait de croire un seul instant que cette dernière parviendrait à s’imposer comme une excellente surprise. Car mine de rien, 34 ans se sont écoulés depuis que Daniel LaRusso a sorti sa fameuse prise de la cigogne au tournoi de All Valley. Karaté Kid qui était en plus déjà revenu plusieurs fois à la charge, avec deux suites mettant à nouveau en scène les personnages de La Russo et de Miyagi, mais aussi avec Miss Karaté Kid, une déclinaison avec Hilary Swank en lieu et place de Ralph Macchio, l’interprète original, et un remake piloté par la famille de Will Smith, avec le fiston Jaden au premier plan ainsi que Jackie Chan, pour sa part remplaçant de Pat Morita dans le rôle du vieux sage. Puis la franchise fut oubliée. Jusqu’à ce jour où quelqu’un décida de la ressortir du formol. Peut-être pour profiter du revival 80’s symbolisé par le carton de Stranger Things ou peut-être pas… Reste qu’au final, les doutes sont vite dissipés. Cobra Kai parvenant à faire valoir une pertinence et une efficacité de tous les instants, sans se reposer sur la nostalgie inhérente au projet mais sans se priver d’habilement jouer dessus non plus… Chronique d’un authentique miracle télévisuel…

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Strike first

Les fans de Karaté Kid qui connaissent depuis longtemps toutes les répliques du film original par cœur étaient en droit de se réjouir à l’avance à l’idée de voir une série raconter la suite des aventures des deux personnages principaux de la saga. Les autres beaucoup moins. À l’arrivée, Cobra Kai arrive ainsi à fédérer sans avoir l’air de forcer le passage et impose une tonalité douce-amère du plus bel effet, en tablant sur l’ambiance du film original mais aussi en allant en permanence de l’avant, écrivant sa propre mythologie, bien loin des fadasses et opportunistes (mais sympathiques) Karaté Kid 3, Miss Karaté Kid et Karaté Kid 2010. Une série (par ailleurs coproduite par Will Smith) au concept absolument génial qui trouve, volontairement ou non on ne sait pas, sa source dans How I Met Your Mother. Oui oui, souvenez-vous quand Barney Stinson affirmait que pour lui, le vrai gentil de Karaté Kid n’était pas Daniel LaRusso mais bel et bien Johnny Lawrence, cette brute blonde comme les blés, élève du sensei le plus brutal de L.A.. Car Cobra Kai part un peu de ce postulat. Le fait que la série s’appelle ainsi en dit d’ailleurs long. Cobra Kai qui voit Johnny Lawrence remonter à la surface après trois décennies d’errance, perdu dans des vapeurs d’alcool et tiré vers le bas par ses propres souvenirs d’une époque dorée. La série de YouTube donne donc à priori le beau rôle à Johnny, alors qu’elle décrit Daniel LaRusso comme une espèce de petit con arrogant qui a tout pour être heureux et qui ne se gêne pas pour jeter son bonheur et sa réussite à la face de quiconque se présente à lui. Un homme ayant capitalisé sur sa victoire au tournoi de karaté qui a vu Johnny Lawrence et le dojo Cobra Kai mordre la poussière…

Strike hard

À partir de cette audacieuse idée, Cobra Kai s’empresse de brouiller les pistes et d’épaissir son propos en multipliant les nuances. Car non le show ne se contente pas « d’inverser » les rôles. De faire de Lawrence le gentil et de LaRusso le méchant. L’histoire sait se montrer subtile plus qu’à son tour, traitant de tout un tas de thématiques avec une pertinence de tous les instants et une sensibilité très à propos. Le poids du passé avec les erreurs qui vont avec et leurs conséquences, la rédemption… Des concepts parfaitement illustrés au sein d’un récit interrogeant aussi (et surtout) la notion d’héritage. Et ce sur plusieurs niveaux ! Daniel LaRusso par exemple, apparaît antipathique au début de la saison en cela qu’il table sans vergogne sur les valeurs apprises auprès de Miyagi sans s’apercevoir que sa haine tenace envers Johnny Lawrence, alors que celui-ci est au fond du trou, ne cadre pas avec la morale de son ancien maître à penser. Lawrence de son côté, lutte pour se défaire d’une agressivité et d’un rejet inhérents à ces années passées sous la domination de son propre sensei, reproduisant sans s’en rendre compte non plus, les erreurs.

Alors oui, Cobra Kai frappe fort. Dès le premier épisode la sauce prend et par la suite, le scénario sait se renouveler, avancer sans faire de surplace, rester vif, et exploiter son formidable matériau de base pour faire valoir une audace et une complexité très surprenantes.
Surtout que les acteurs ne sont pas en reste. William Zabka, alias Johnny Lawrence, fait montre d’un charisme à toute épreuve. Apparaissant lessivé, il sait aussi entretenir cette flamme dans le regard, et faire progresser d’un coup particulièrement bien placé son personnage, quand bien même ce dernier n’était pas spécialement fouillé dans le film original. Absolument remarquable, Zabka (qui était apparu, jouant son propre rôle, dans How I Met Your Mother), fait face à un Ralph Macchio lui aussi en grande forme, très à l’aise dans les habits d’un homme lui aussi beaucoup plus nuancé que le jeune gars qu’il campait dans Karaté Kid aux côtés de Pat Morita. La série parvenant aussi à faire exister des nouveaux venus, la nouvelle génération en somme, en redistribuant des cartes parfois connues parfois non, sans se départir d’une justesse étonnante et grandement responsable de la réussite de l’ensemble.

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No mercy

Intelligente, jusqu’à sa capacité à se réapproprier le film original au fil de flash-back parfaitement intégrés et pas du tout opportunistes, sensible et super efficace, cette première saison de Cobra Kai se savoure de la première à dernière minute. En suivant sa propre route tout en se posant aussi par moment comme une habile relecture de Karaté Kid, elle sait également réserver de nombreuses surprises, plus ou moins grandes, qui, ensemble, renforcent les fondations d’un récit solide.
Comme quand elle aborde la thématique sensible du harcèlement scolaire et vient marcher sur les plates-bandes d’œuvres comme 13 Reasons Why ?, en se payant le luxe de parvenir à adopter un discours beaucoup plus concis et tout autant percutant. La série évolue sur plusieurs niveaux et fait sans cesse valoir une bravoure impressionnante. Oui, on peut parler de victoire totale !

En Bref…
Sans jouer à 100% sur la nostalgie facile des années 80, Cobra Kai, cette suite au départ improbable de Karaté Kid, sait justifier son existence en tablant sur une tonalité douce-amère parfaitement entretenue par une suite de péripéties passionnantes et par la pertinence d’une écriture fine, portée qui plus est par des acteurs excellents et superbement dirigés. Au final, Cobra Kai n’est pas qu’une Madeleine de Proust mais une œuvre à part entière, émouvante, parfois drôle, galvanisante au possible et bien plus complexe qu’elle n’en a l’air de prime abord. Vivement la suite !

@ Gilles Rolland

Cobra Kai   Crédits photos : YouTubeRed

Par Gilles Rolland le 4 juin 2018

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Loïc
Loïc
5 années il y a

J’ai adoré aussi.
Grand fan du film originel, je n’ai jamais su quel personnage soutenir, qui était le gentil, qui était le méchant tellement l’ambiguïté de chacun est bien écrite.

Vivement la suite