[Critique série] HOUDINI

SÉRIES | 26 décembre 2014 | Aucun commentaire
Houdini-poster1

Titre original : Houdini

Rating: ★★★★☆
Origine : Canada
Réalisateur : Uli Edel
Distribution : Adrien Brody, Kristen Connolly, Evan Jones, Eszter Ónodi, Tom Benedict Knight, Louis Mertens, Shaun Williamson, Tom Pigott-Smith…
Genre : Biopic/Drame
Diffusion France : OCS
Nombre d’épisodes : 2 (mini-série)

Le Pitch :
De la pauvreté d’une enfance passée en Europe de l’Est à la gloire en Amérique, au fil de spectacles et de performances de plus en plus impressionnantes, Harry Houdini a repoussé toutes les limites de son art. Magicien célèbre dans le monde, encore aujourd’hui considéré comme le plus grand illusionniste de tous les temps, Houdini livre tous ses secrets. Enfin presque…

La Critique :
Le nombre d’œuvres, cinématographiques, télévisuelles, ou autres, qui citent Harry Houdini est impressionnant. Non content d’avoir révolutionné le monde de la prestidigitation, pour devenir à la fois un modèle, mais aussi une véritable star, Houdini a imprimé son nom dans la légende et infiltré jusque dans ses fondements toute la culture populaire. On pense ici à Last Action Hero (le ticket magique vient de lui), à Turner & Hooch, au Simpson, à Fast & Furious 5, mais aussi au comic book Spawn, au jeu-vidéo Bioshock, à l’album des Melvins, ou encore à la série Alias. Houdini est partout et aujourd’hui, il se retrouve au centre d’une mini-série basée sur sa vie, avec Adrien Brody dans le rôle principal…

Houdini-Adrien-Brody

Produite par la chaîne canadienne History, Houdini prend donc la forme d’un long biopic de presque trois heures, scindé en deux parties. Une belle façon en soi d’éviter l’impression de longueur, quand bien même l’une des qualités premières de l’œuvre est de ne jamais s’enliser dans la routine et de raconter son histoire avec une fluidité exemplaire, grâce notamment à une rythmique quasi-infaillible.
À la réalisation, on retrouve Uli Edel, un metteur en scène allemand rompu à l’exercice du biopic, puisque avant Houdini, il s’était notamment illustré, toujours pour la télévision, en racontant la vie de Mike Tyson, de Raspoutine ou encore de Jules César. Il reste également populaire pour des films comme Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée et Last Exit to Brooklyn. Pas forcément virtuose, Edel fait en revanche preuve d’une rigueur admirable, bien aidé par la superbe photographie, certes marquée par un grand classicisme mais bel et bien magnifique, de son compatriote Karl Walter Lindenlaub (qui s’était déjà fait remarquer avec Stargate, Rob Roy, Independence Day, ou Le Monde de Narnia : Le Prince Caspian). Au final, Houdini tient plutôt du long-métrage de cinéma que du téléfilm, et il est d’ailleurs étrange qu’une personnalité comme ce fameux magicien ne se soit pas plutôt retrouvée au centre d’un projet de plus grande ampleur, tant tous les éléments qui constituent sa vie, justifiaient à eux seuls, sur le papier, autant de raisons de ne pas le cantonner à la télévision, quand bien même d’importants moyens aient été mis en œuvre pour lui rendre justice.

Quoi qu’il en soit, jamais Houdini ne démérite. En ce qui concerne la forme, grâce à une mise en scène studieuse et parfois aiguisée, à une narration déstructurée plutôt maîtrisée car toujours fluide et claire, mais aussi pour ce qui est du fond.
En d’autres termes, la vie d’Houdini s’avère rapidement passionnante. Que l’on s’intéresse au personnage et plus globalement à la magie, ou pas, tant la mini-série profite de l’occasion pour traiter en filigrane de son époque, à savoir des bouleversements qui secouèrent l’Amérique et le monde, à la fin du 19ème et au début du 20ème siècle (la Première Guerre mondiale, l’apparition du cinéma…). Outre Houdini, c’est toute une galerie de personnages ayant marqué leur temps que nous rencontrons au fil du récit, à l’image de l’inquiétant Raspoutine ou de Sir Arthur Conan Doyle, le père de Sherlock Holmes, dont la route croisa celle du magicien à l’orée de son existence, quand ce dernier se focalisa sur sa quête de démystification du spiritisme et des sciences occultes. Un point plutôt méconnu de la vie d’Houdini pour une œuvre qui n’hésite jamais à fouiller pour offrir un point de vue original et nombre de détails, exploitant judicieusement le confort offert par le format mini-série.

Houdini-cast

Autre bon point : Adrien Brody. Plutôt discret au cinéma, le comédien américain offre au magicien sa capacité à incarner une ambiguïté faite d’un mélange de vulnérabilité et d’émotion et de force et d’arrogance. Relativement impressionnant physiquement, Brody fait un Houdini non seulement crédible, mais aussi très intense, que ce soit lorsqu’il se trouve sur scène face au public, qu’en coulisses, quand il est assailli par le doute. Accro à la gloire et à l’adrénaline, défiant la mort lors de tours très risqués, Houdini est un personnage de cinéma parfait, dont le principal mérite est de proposer un package d’émotions et de thèmes qui dispensent celui qui se colle à l’adaptation de sa vie, de trop gros efforts pour rendre la chose passionnante. Brody lui, prend visiblement son rôle à cœur et encore une fois, fait regretter que cette œuvre plutôt ambitieuse, ne se soit pas retrouvée en salle…
Cela dit, il faut également saluer les performances de Kristen Connolly et d’Evan Jones, respectivement femme et assistant/meilleur ami du magicien. La première, remarquée dans House of Cards, ne se contente pas servir la soupe à Brody mais incarne une classe, un glamour et une souffrance contenue, avec une sensibilité à fleur de peau, tandis que le second, injustement méconnu car souvent relégué à des rôles condamnés à rester dans l’ombre des têtes d’affiche, cristallise en quelque sorte toute l’admiration et le respect que suscite Houdini.

On peut en toute logique considérer Harry Houdini comme l’une des premières grandes stars, en cela qu’il a lui-même inventé bon nombre de codes encore à vigueur aujourd’hui pour se faire connaître et ainsi façonner les fondations de l’industrie du spectacle. Précurseur et grandiose, Houdini méritait bien un biopic à la hauteur de sa légende. En se gardant bien de faire la lumière sur toutes les zones d’ombre qui jalonnent son parcours, cette mini-série sait distiller un mystère indispensable à la bonne tenue de l’ensemble. Un choix judicieux parmi d’autres. La magie est intacte et le périple auquel Houdini nous convie de diluer un émerveillement mâtiné d’une dramaturgie en somme toute (plus) que recommandable.

@ Gilles Rolland

Houdini-BrodyCrédits photos : OCS

 

Par Gilles Rolland le 26 décembre 2014

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