[Critique] BRING ME THE HEAD OF THE MACHINE GUN WOMAN

CRITIQUES | 17 janvier 2014 | 1 commentaire
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Titre original : Tráiganme la cabeza de la mujer metralleta

Rating: ★☆☆☆☆
Origine : Chili
Réalisation : Ernesto Días Espinoza
Distribution : Fernanda Urrejola, Eric Kleinsteuber, Matías Oviedo, Jorge Alis, Victor González…
Genre : Action/Comédie
Date de sortie : 7 janvier 2014 (DTV)

Le Pitch :
Santiago, jeune homme pas particulièrement ambitieux et un tantinet branleur, a deux passions dans la vie : les jeux vidéo (en particulier Grand Theft Auto et Bring Me The Head of Rene Garcia –  croisement entre GTA et un jeu de cowboys) et la musique : il est DJ dans une boîte de nuit appartenant à Che, le caïd local. Un soir alors qu’il est aux toilettes, Santiago entend accidentellement une conversation entre Che et un tueur à gages. Pris en flag par les deux hommes, Santiago se voit proposer de se faire exploser la tête dans les règles de l’art (et là, le film est fini et il aurait fallu combler les 65 minutes de film restant par un documentaire sur le Chili). Son bagout étant proportionnel à sa tendance à avoir les oreilles qui trainent, Santiago offre de réussir là où ses tueurs ont failli : ramener la tête de la Femme Mitraillette, tueuse sexy et armée jusqu’aux dents qui a déquillé plusieurs de ses hommes de main…

La Critique  :
Parfois, la critique de films s’apparente à un métier de reporter de guerre, et pour vous, j’ai décidé de me sacrifier en allant au front. Dans un pays qui a connu des réalisateurs comme Raúl Ruiz et Patricio Guzmán et qui, depuis la création du Conseil National de la Culture et des Arts du Chili en 2003, connait un renouveau dynamique, axé sur une dénonciation des inégalités sociales et de la dictature qu’a connu le pays (illustré avec le film No), Ernesto Días Espinoza incarne cette nouvelle génération audacieuse. Son credo : le film de genre. Et cette fois-ci, il s’attaque brillamment au grindhouse, en rendant à la fois hommage au genre, au jeu vidéo et à la femme avec Bring Me the Head of The Machine Gun Woman. Les dialogues brillent par leur finesse, l’action est très rythmée, le scénario brille par son originalité… Non, non on arrête tout, j’ai beau essayer d’être ironique, je n’y arrive pas, on croirait lire un critique littéraire essayant d’encenser le livre de Nabilla.
Dès l’affiche, on comprend que ce film a la subtilité d’un Uwe Boll bourré à la mauvaise bière. La tagline qui tue ? « Ils voulaient sa tête, elle les a réduits en pièces ». Alors, je vais pas spoiler, mais le mec qui a pondu ce slogan n’a même pas vu le film.
Le délire continue dès les premières minutes, la qualité de l’image, le lettrage, les ralentis ratés, tout donne plus l’impression (jusqu’au look de la demoiselle citée plus haut) d’un porno cheap des années 90 vu sur Canal + que d’un grindhouse, même intentionnel comme l’était Machete (n’est pas Robert Rodriguez qui veut). Impression confortée avec les dialogues comme ce fameux code qu’il faut prononcer pour rencontrer la tueuse : « je viens pour me faire vidanger bien en profondeur ». On notera ici la subtilité de sous-entendus qui pourraient être prononcés par un ivrogne client du Titty Twister. Réplique qui fera l’objet d’un gag magnifique : un apprenti, auquel le héros lance ce code, va chercher du matériel de mécanique (petite précision utile : pour rencontrer la femme mitraillette, il faut aller dans un garage miteux, ben voyons).
La femme mitraillette incarne à elle seule la nouvelle génération d’héroïne burnée et… non, on avait dit qu’on arrêtait avec l’ironie. On a dans les grindhouses des héroïnes comme Rose McGowan dans Planète Terreur avec une mitraillette dans la jambe, on a une armée de tueuses dans Machete (bon, ok, dans ce dernier film, on peut pas dire que la condition féminine connaisse tout le temps une réelle avancée), et Piégée de Soderbergh, s’il ne brille pas par son scénario, a le mérite de présenter une agente qui, en plus d’exploser du méchant à tour de bras de manière efficace, est très classe. Et là on a une tueuse au look qui serait un mélange entre une Lara Croft SM et la hardeuse Zara White, avec de talons de 25 cm minimum (très pratique pour mitrailler) et le strict minimum pour s’habiller (aaaaaaaaaaaah le réchauffement climatique), cela tient plus du fantasme pour ado que d’une réelle héroïne. Une héroïne qui révèlera très vite sa fragilité dans les bras du jeune Santiago, grindhouse oblige. On notera là encore la pertinence du scénario dans cette scène où Santiago, après avoir soigné la femme-mitraillette dans la voiture, couche avec (la tueuse, pas la voiture), parce que c’est bien connu, après qu’on nous ait tiré une balle et qu’on ait soigné la blessure dans la voiture, on a une irrésistible envie d’un coup vite fait, (envie traduite par la réplique « je vais te faire la vidange bien en profondeur », amis poètes bonsoir).

L’hommage au jeu vidéo enfin. Le réalisateur a choisi la référence à GTA (car Tetris, Mario, ou Earthworm Jim, ça aurait été trop compliqué). Si le cinéma a bien montré quelque chose ces dernières décennies, c’est que l’adaptation d’un jeu vidéo au cinéma, même en clin d’œil, c’est hyper casse-gueule. Espinoza a donc choisi d’y aller franchement, car tant qu’à se vautrer, autant ne pas faire les choses à moitié. Le film se découpe donc en missions, illustrées à la façon de GTA Vice City (pas très récent donc) au niveau du lettrage qui s’affiche à l’écran, avec une voix off absolument atroce. Idem pour les différents personnages du film. Lorsqu’ils apparaissent à l’écran, une mise à prix (toujours indiquée avec le lettrage de GTA Vice City) s’affiche. Celle de Santiago est de 0$ (mais que c’est drôle…) et les méchants ont tous une grosse mise à prix. Alors, comme le scénario est non seulement rachitique mais en plus sans queue ni tête, on ne sait pas qui est qui. Tout comme on ne sait pas ce que fout ce gamin qui joue les hommes orchestre (au sens littéral du terme). Son intérêt ne durera d’ailleurs qu’une poignée de secondes à la fin du film.
On a beau se dire que c’est le réalisateur qui a pondu le scénario, et que ce qu’il a pris, c’est forcément de la bonne, comment se fait-il qu’à aucun moment personne ne lui ait dit « bon, t’es gentil, mais y a rien qui tient là, on ne peut pas continuer, on se vautre en beauté » ? Bon, ce n’est pas le seul réalisateur qu’on devrait remettre sur le droit chemin. Il n’empêche que ce n’est pas qu’une question de moyens, mais l’art du grindhouse n’est pas donné à tous. Si Robert Rodriguez a réussi son coup, c’est que ce sont des grindhouses hommages, utilisant les ingrédients du genre, mais aussi beaucoup d’humour, et de recul. Quand on veut mélanger le grindhouse et le jeu vidéo avec des moyens réduits, des acteurs plus qu’amateurs, une musique horrible, une photo dégueulasse (je ne suis même pas sûr que pour le coup, ce soit fait volontairement), on a comme résultat une belle purge. La femme mitraillette, incarnée par la très belle Fernanda Urrejola, a beau être canon, son jouet sent le mauvais fusil en plastique à des kilomètres.

@ Nicolas Cambon

machine gun woman 1Crédits photos : Clear Vision

Par Nicolas Cambon le 17 janvier 2014

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Jerome
Jerome
10 années il y a

pas vu mais je citerai le personnage de Dick Miller dans ‘Matinee’: “pas besoin de visiter une gout pour savoir ce qu’on met dedans” 🙂