[Critique] DARK SHADOWS
Titre original : Dark Shadows
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Tim Burton
Distribution : Johnny Depp, Michelle Pfeiffer, Eva Green, Chloe Moretz, Helena Bonham Carter, Jackie Earle Haley, Jonny Lee Miller, Bella Heathcote, Gulliver McGrath, Ray Shirley, Alice Cooper, Ivan Kaye, Josephine Butler…
Genre : Fantastique/Comédie
Date de sortie : 9 mai 2012
Le Pitch :
Autrefois gentilhomme aimé de tous et riche à foison, Barnabas Collins est désormais un vampire. Condamné à errer dans les ténèbres et à se nourrir de sang frais car victime d’une terrible malédiction jetée sur sa famille par une maléfique sorcière à qui il a refusé son cœur. Sorcière qui fait enfermer Barnabas dans un cercueil, six pieds sous terre, afin de pouvoir accomplir ses terrifiants projets sur la famille de ce dernier, à travers les siècles. Mais le vampire est libéré par un curieux coup du hasard, presque 200 ans plus tard. Parachuté en 1972, Barnabas est perdu dans un monde qu’il ne reconnaît plus…
La Critique (Sacha) Rating: :
Tim Burton a connu des hauts et des bas dans sa carrière. Dernièrement, c’était plutôt bas, sa version d’Alice au Pays des Merveilles, bien que merveilleuse visuellement, étant très creuse et impersonnelle. Alors quand le maître du fantastique nous annonce la sortie de deux films pour l’année 2012, un mélange d’espoir et d’angoisse nous étreint. Mais concentrons-nous sur l’essentiel, à savoir Dark Shadows.
Il faut savoir que Dark Shadows est, au départ, une série culte des années 60-70 outre-Atlantique. Une série qui a bercé l’enfance du jeune Tim. Il s’agit, en gros, d’un soap opera assaisonné à la mode vampire/loup-garous/fantômes (d’ailleurs, certains acteurs de la série font un caméo dans le film). La démarche se rapproche un peu de celle Frankenweenie qui est un retour en arrière, que l’on espère salvateur. Voilà pour le contexte.
Le film était donc attendu de pied ferme par les fans qui espèrent que Burton se remette dans le droit chemin. Autant vous le dire de suite, c’est oui, même si le film est loin d’être un des meilleurs Burton, il se regarde avec plaisir. On retrouve les constantes qui font d’un film de Burton ce qu’il est : Johnny Depp méconnaissable (ça en devient une marque de fabrique) dans un rôle tout en décalage, Helena Bonham-Carter qui se voit affublée d’un personnage fun et assez ambigu…
On s’amuse du retour de Michelle Pfeiffer en matriarche qui essaie de sauver une famille dysfonctionnelle et son entreprise, et qui voit en Barnabas un sauveur. La jeune Chloë Moretz a un rôle assez caricatural au début, mais s’avère un peu plus intéressant par la suite. John Lee Miller joue un père incapable et absent et, pour compléter le tableau, le jeune Gulliver McGrath campe un garçon précoce tourmenté par le fantôme de sa mère, morte en mer. Une famille fort peu engageante en somme (comme dans tous les Burton). L’arrivée de Barnabas en rajoutant un peu plus. Mais le gentleman d’un autre temps amène aussi un peu d’espoir entre ses crocs.
Le film joue sur le décalage, son héros est une source d’inspiration sans bornes en terme de comique de situation. De nombreuses citations valent leur pesant de cacahuètes. L’opposition entre Barnabas et Angélique (la sorcière campée par la très amusante Eva Green) est assez originale, elle incarne le changement, l’adaptation, là où Barnabas conserve ces anciennes coutumes et valeurs. Il fait ressortir toute l’absurdité des époques entre lesquelles il est bloqué avec un humour ironique tout Burtonien. Le bref face-à-face avec Christopher Lee est des plus drôles, ce dernier se faisant hypnotiser alors même qu’il est l’une des plus célèbres incarnations de fameux Comte Dracula. L’arrivée joyeusement « what the fuck » d’Alice Cooper est assez remarquable également. Niveau personnages secondaires on reste dans de la caricature parfois un peu facile (les hippies, l’homme à tout faire, pourtant campé par l’énorme Jackie Early Haley) mais bon, rien de bien méchant.
La B.O est un bel hommage aux seventies avec, entre autres Black Sabbath. Mais du coup, Danny Elfman est en retrait, ce qui est dommage. Niveau esthétique le film mélange univers moderne et ambiance fantastique, notamment à travers le Cap des Veuves réussi.
Néanmoins, le film n’est pas parfait, s’il est drôle, son intrigue d’histoire d’amour/familiale est trop prévisible et surtout, il manque quelque chose. Un quelque chose indéfinissable qui rendait les films de Burton touchants et poétiques. Un bon petit Burton, mais qui laisse un goût un peu fade en bouche.
La Critique (Gilles) Rating: :
Tim Burton est de retour aux affaires ! Voici la vraie bonne nouvelle ! La mauvaise -même si tout est relatif- est que non, Burton n’a pas renoncé à tous ses travers. Les habitudes ont la vie dure et non, ce n’est pas facile de revenir au top et de se remettre en question quand on s’est un peu trop reposé sur ses lauriers. Rayon défauts donc, on évoquera le scénario trop simpliste, qui se paye le luxe de manquer malgré tout de cohérence, de profondeur et de tenue. C’est un peu bordélique et on sent régulièrement la gêne du duo Grahame-Smith (auteur de Orgueil et Préjugés et Zombies)/August quand il s’agit de lier entre-elles les sous-intrigues. Entre gags inhérents au décalage du vampire propulsé en plein cœur de l’ère hippie et les séquences d’affrontements entre lui et la sorcière, le film s’apparente parfois à un collage maladroit. Il y a ensuite ce sentiment un peu gênant face aux réactions du vampire confronté au progrès, qui rappellent celles de Jacouille dans Les Visiteurs. Peut-être cette déduction est-elle le fruit d’un esprit tordu mais le fait est là ! Et pas qu’une fois malheureusement (voir la séquence de la télé, celle de la route…). Difficile également de ne pas remarquer le recyclage de certaines idées. Et là, on ne parle pas des clins d’œil et autres hommages. Burton est généreux et parfois, sa tendance à vouloir trop en faire encombre.
C’est un peu le bordel et au final, cette faculté à se disperser en tentant de rendre homogène une salade fantastico-comique alourdit le propos. Mais l’intention est bonne c’est peut-être le principal…
Quelques défauts donc, qui n’empêchent pas Dark Shadows de redorer sans conteste le blason d’un cinéaste au prestige chancelant après le ratage d‘Alice aux Pays des Merveilles.
Dark Shadows, adaptation d’une série télé emblématique de la seconde moité des années 60, est en cela et très certainement le meilleur film de Tim Burton depuis l’excellent Big Fish. On retrouve ici le panache d’un artisan gothique et le souffle qui pouvait animer des longs-métrages comme Sleepy Hollow, Ed Wood ou Edward aux mains d’argent.
Première bonne idée : avoir renoncé à la 3D. Le film est en connexion directe avec son modèle télévisuel et Burton n’a pas trop à insister sur un côté gothique de toute façon déjà présent. Il souligne juste quelques traits, maquille ses acteurs de façon à les reconnecter avec les autres personnages de son bestiaire et flirte du même coup avec l’imagerie des premiers films de vampires comme Nosferatu de Murnau.
Deuxième bonne idée : le casting. Si Johnny Depp, coutumier de la maison pour le meilleur et pour le pire (c’est son huitième Burton) est parfait et a curieusement la bonne idée de ne pas en faire trop , c’est avec grand plaisir que l’on retrouve en tête d’affiche la sublime Michelle Pfeiffer. Parfaite en matrone autoritaire, celle qui ronronna sous le cuir de Catwoman règne sur un casting aux petits oignons. Du coup, on ne sait plus où donner de la tête, entre la performance impeccable et très « burtonienne » d’Eva Green, la candeur troublante de l’immaculée Bella Heathcote, l’attitude rebelle de la surdouée Chloe Moretz (Kick Ass, Hugo Cabret…) ou encore l’apparition jubilatoire d’Alice Cooper. Oui, le grand patron du shock rock figure au générique de Dark Shadows ! Rajeuni d’une bonne quarantaine d’années, Alice interprète deux titres, dont No More Mister Nice Guy, pour une apparition généreuse qui couronne une bande-originale à proprement parler excellente (Iggy Pop & The Stooges, Black Sabbath, Moody Blues, Deep Purple, T-Rex…). Aucune faute de goût au niveau de la playlist, c’est tout bon !
Esthétiquement, pas de surprise, c’est magnifique. Mention particulière au prologue, qui laisse présager un excellent film, tant on retrouve le réalisateur que l’on croyait vendu au divertissement de masse et aux fonds verts. Dark Shadows prouve que Burton a encore quelques belles cartouches dans son chargeur. Sa direction d’acteur et sa maitrise d’un univers immersif grandiose sauvent le long-métrage de ses quelques travers. C’est souvent amusant, parfois très drôle, un poil long, foutraque, on en prend les mirettes et -ô surprise !- le film se voit régulièrement transpercé de séquences lascives et sexy. Dans le genre, Eva Green est parfaite. D’un mouvement de tête, elle active un sortilège qui ne prend fin qu’au mot… fin.
Ça fusionne sec dans Dark Shadows, la nouvelle mixture gothique de Tim Burton. Le bougre flatte ses fans de la première heure qui sont de toute façon prêts à revoir sans arrêt le même film, mais pense aux autres, ceux qui ont décroché. À ces derniers, il livre une œuvre suffisamment chiadée, décalée et personnelle pour leur donner envie d’aller voir la prochaine.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Warner Bros
[…] Pour cela, Warner Bros nous a gentiment proposé de vous faire gagner le combo DVD/Blu-ray du dernier film de Tim Burton, à savoir Dark Shadows (avec Johnny Depp). Un film suffisamment bien emballé et interprété, pour se mettre dans une ambiance au poil, une fois le soir venu. Et d’ailleurs, retrouvez ici notre critique de Dark Shadows. […]