[Critique] WELCOME TO NEW YORK

CRITIQUES | 20 mai 2014 | Aucun commentaire
Welcome-to-New-York-affiche-France

Titre original : Welcome to New York

Rating: ★★☆☆☆
Origine : États-Unis
Réalisateur : Abel Ferrara
Distribution : Gérard Depardieu, Jacqueline Bisset, Drena De Niro, Amy Ferguson, Marie Mouté, Paul Calderon, Ronald Guttman, Paul Hipp…
Genre : Drame
Date de sortie : 18 mai 2014 (VOD)

Le Pitch :
Devereaux aime les femmes. Homme puissant, il manipule au quotidien des milliards de dollars et décompresse en participant à des parties fines, le soir venu. Animé par un appétit sexuel vorace, Devereaux franchit la ligne jaune lorsqu’il s’en prend à une femme de chambre. Dès lors, le politicien français devient le personnage principal d’une fresque judiciaire d’envergure. Accusé de viol, il chute, ne pouvant se raccrocher qu’à son épouse, qui le soutient contre vents et marées. Cette histoire vous rappelle quelque chose ? C’est le but…

La Critique :
Abel Ferrara a bâti sa carrière et sa réputation sur l’outrance et sur la provocation. Sa filmographie, traversée de coups d’éclats, et son caractère frondeur, le désignaient d’office pour le job. Un boulot qui consistait à retranscrire au cinéma l’histoire de DSK, où comment fusiller sa carrière, sa vie de famille et son image publique, à cause d’une sexualité débridée, de plus décuplée par une position sociale pouvant mener à toutes les dérives, y compris les plus graves pour autrui.

Aujourd’hui, DSK a retrouvé sa liberté au terme d’un feuilleton judiciaire largement relayé par les médias du monde entier. Le but n’est pas de parler de l’ex-président du FMI, mais bel et bien du film d’Abel Ferrara. Ferrara qui prouve à quel point il se contrefout de la version de DSK, qui, pour rappel, s’est juste contenté d’admettre une relation « inappropriée » avec Nafissatou Diallo au journal télévisé de TF1. Ferrara lui, ce qu’il montre, c’est une bête de sexe incontrôlable, pathétique, et dénuée du moindre remord. Un type qui s’accepte tel qu’il est, et qui n’assume pas ses actes répréhensibles, pour la simple et bonne raison qu’il ne les reconnaît pas lui-même en tant que tels (pas étonnant que DSK ait porté plainte). Après tout, il ne fait pas la différence entre le fait de coucher avec des call girls de luxe et agripper de force une femme de chambre en sortant de la douche. Ainsi est Devereaux, le personnage principal de Welcome to New York : un animal à la fois prédateur sexuel et marionnette politique manipulée par son épouse légitime. Une femme de caractère qui garde soigneusement les yeux fermés sur les dérives orgiaques de son époux, afin de le mener grâce à son argent (à elle) sur la plus haute des marches du pouvoir.

Pour illustrer le caractère dépendant de son protagoniste, Ferrara n’y va pas avec le dos de cuillère. Ce n’est pas le style de la maison. Le premièr quart-d’heure est alors principalement consacré à la vie sexuelle débridée de Devereaux. On le voit avec des prostitués, avec ses potes et des prostitués et enfin de nouveau avec des prostitués, carburant comme un âne grâce à des milk-shakes à base de viagra. Une introduction tonitruante, brutale, glauque, qui néanmoins est loin de donner le ton du long-métrage dans son ensemble. Mis à part quelques flash-backs et l’évocation encore une fois sans concession de l’épisode Tristane Banon, Welcome to New York se focalise par la suite sur l’affaire, vue à travers les yeux du principal intéressé. Le film dure tout de même deux heures. Et deux heures, c’est long. Une durée excessive qui permet ainsi au nouveau Ferrara de devenir au final beaucoup plus ennuyeux que sulfureux.
Non pas que l’histoire manque de piment. Il est intéressant de pénétrer les rouages de cette affaire, même si au fond, rien de bien nouveau ne nous est exposé, si ce n’est le point de vue d’un réalisateur ayant choisi son camp. Pour lui, DSK, pardon Devereaux, est un personnage de film comme les autres. Son long-métrage, avec ses faux airs de téléfilm de luxe, n’a rien de bien attirant, et a du mal à se détacher de son statut pré-établi de créature publique tout juste bonne à exciter la machinerie médiatique, comme peut en témoigner le foin déclenché par son évocation pendant le Festival de Cannes, alors que le film n’y était même pas programmé officiellement.

Et Depardieu dans tout ce bordel ? Il semble à l’aise. Au début, avant le générique, il nous explique avoir accepté de jouer ce rôle, à cause de sa haine envers la politique et plus particulièrement DSK. Sans trop forcer pour passer pour un satire intégral, il se met à nu (au sens propre) et joue à la brute de service, avant de se répandre lors de courtes séquences introspectives relativement fades.
Fable sur le pouvoir, Welcome to New York se veut tout de même plus qu’un porno soft centré sur l’homme politique le plus libidineux de la cinquième république. Il parle de notre société et du pouvoir de l’argent. Pas super bien, mais il essaie, même si au final, on peut tout à fait réduire l’œuvre à une provocation pure et simple, comme peut en témoigner le passage au sujet de la famille de Mme Devereaux.
Quoi qu’il en soit, le métrage est bouffé par son sujet et par son personnage. L’ombre de l’ex-directeur du FMI plane en permanence sur Welcome to New York. La curiosité l’emporte sur un quelconque intérêt sincère, et jamais le long-métrage ne parvient à aller véritablement de l’avant. Il plane à la surface des choses et se condamne au fil des minutes à ne demeurer que ce vague objet d’un scandale prémédité et préfabriqué.

@ Gilles Rolland

Welcome-to-New-York-Ferrara-DepardieuCrédits photos : Wild Side

 

Par Gilles Rolland le 20 mai 2014

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