[Ticket d’humeur] Game Of Thrones : un grand merci !

DOSSIERS TICKET D'HUMEUR | 20 mai 2019 | 1 commentaire

ATTENTION : CET ARTICLE CONTIENT QUELQUES SPOILERS SUR LA SAISON 8 (pas sur le dernier épisode).

La huitième et dernière saison de Game Of Thrones ne fut pas de tout repos. Dans tous les sens du terme. À l’écran, les rebondissements, les scènes d’anthologie et les surprises furent extrêmement nombreuses, jusqu’à cette conclusion éprouvante. De l’autre côté, sur internet notamment, vu que c’est là que se centralisent désormais les passions, avec tout ce que cela sous-entend de dérives, l’action fut aussi au rendez-vous et, à l’heure où j’écris ces lignes, ce n’est bien sûr pas terminé. Dès le premier épisode, des voix se sont élevées pour critiquer de nombreux détails et souligner leur mécontentement quant à la direction prise par le récit. Le deuxième épisode confirma la tendance, quand le troisième, entièrement consacré à la fameuse et attendue bataille contre le Night King et ses White Walkers, fit l’objet d’un déferlement inédit de commentaires. Pour autant, c’est bien le cinquième, intitulé The Bells, qui devint la cible de la fureur d’une partie (minoritaire mais bruyante) des fans du show. En toute logique, l’ultime épisode ne fut pas non plus épargné. Un mécontentement par ailleurs déjà amorcé durant la saison précédente quand la série passa à la vitesse supérieure pour se diriger vers son terme, envers et contre celles et ceux qui étaient persuadés « mériter » quelque chose… de différent. Le point culminant néanmoins fut atteint quelques heures après la diffusion de The Bells, avec la publication d’une pétition largement commentée elle aussi, destinée à « contraindre » les showrunners à réécrire et donc à re-tourner la saison dans son intégralité. Pétition que je n’ai bien sûr pas signé, considérant d’une part la série admirable et d’autre part cette pétition totalement absurde. Et j’ai beau avoir entendu l’argument de certains signataires affirmant que le but était avant tout de « sanctionner » HBO, impossible pour moi de me résoudre à légitimer une telle procédure. Pourquoi ? Car depuis quand doit-on sanctionner les créateurs d’une œuvre quand celle-ci ne nous plaît pas ? Y compris quand il s’agit d’une série que l’on suit depuis 8 ans. J’ai écouté les arguments mais pour moi, ce n’est tout simplement pas concevable.

Cette histoire m’a d’ailleurs rappelé l’époque où Les Sopranos, série culte par excellence, tirait sa révérence au terme d’un épisode lui aussi très critiqué ou encore les réactions consécutives au dernier épisode de Lost. Souvent, concernant ces deux séries, on peut entendre : « J’ai adoré, à part la fin » ou encore, plus précisément pour Lost : « C’était génial au début mais après j’ai lâché l’affaire car c’est devenu nul ». Nous lirons le même genre de commentaires d’ici quelques semaines (ou quelques jours, voire quelques heures) concernant Game Of Thrones. Si ces trois séries n’ont pas grand chose à voir les unes avec les autres, elles partagent un point commun essentiel : elles sont allées jusqu’au bout de leur logique, sans se préoccuper de plaire au plus grand nombre. Ce qui, quand on peut se targuer de cumuler les records comme GOT, est assez couillu. De toute façon, selon moi, plusieurs alternatives se posent quand on se retrouve à la tête d’un tel barnum : soit on décide de tenir bon et de maintenir le cap pour suivre la direction qu’on s’est fixée, soit on reste à l’écoute des fans les plus enclins à passer du temps à échafauder des théories, pour tenter de les satisfaire. Heureusement, ni Jeffrey Lieber, J.J. Abrams, Damon Lindelof pour Lost, ni David Benioff et D. B. Weiss pour GOT n’ont choisi la deuxième option. Les deux séries étant des fresques propices aux théories les plus folles.

Je n’ai jamais cherché à deviner ce qui allait se passer. Échafauder des théories ne m’a jamais intéressé. Pas plus que de lire les analyses sur internet. Analyses pour la plupart assez énervantes à mon sens car souvent condescendantes (indirectement la plupart du temps) envers les fans satisfaits. Stephen King l’a très bien exprimé dans un tweet avant la diffusion du grand final, en soulignant que selon lui, les fans hardcore les plus enclins à faire entendre leur mécontentement n’avaient que très peu de chances de se contenter d’une fin, quelle qu’elle soit. Si ce n’est celle qu’ils avaient imaginée en collectant les indices depuis le début du show. Chacun sa façon de vivre une série. Ce n’est pas la mienne et je m’en félicite chaque fois que j’y pense.

La nuit dernière, j’ai mis le réveil à 2h45 pour voir le dernier épisode en direct. C’est la première fois que je fais un truc pareil mais là, je voulais marquer le coup et vivre cet événement pleinement, connecté avec tous les autres fans, dans ce pays, de l’autre côté de l’Atlantique ou ailleurs. Avec les défenseurs de la saison 8 comme moi mais aussi avec les autres qui, jusqu’au dernier moment, pensaient que GOT allait leur offrir les réponses qu’ils avaient espérées et donc la fin qu’ils appelaient de leurs vœux depuis plusieurs années. Logiquement, aujourd’hui, les mécontents ne se sont pas gênés pour exprimer leur frustration. C’est tout à fait normal. Les fans heureux de la tournure prise par la série aussi heureusement. Et c’est pour cela, qu’avant de publier ma traditionnelle critique de la saison, j’ai eu envie d’écrire ce texte. Pour apporter ma très modeste contribution afin de remercier David Benioff et D.B. Weiss, George R.R. Martin, HBO, les acteurs, et plus globalement toutes celles et ceux ayant œuvré depuis plusieurs années sur le show. Attention, car je ne me nourris d’aucune illusion quant au fait que ces personnes me liront. Il est évident que ce ne sera pas le cas. Aussi sûrement que personne ne commandera un jour un reboot de la saison 8. Mais, pour une question d’équilibre, je me suis simplement dit que ça valait le coup de prendre quelques minutes pour dire ce que je pensais. Sans trop y mettre les formes, en laissant parler mes émotions et le profond respect qu’encore une fois, cette saison m’a inspiré, concernant l’équipe aux commandes.

Oui, certes, je suis d’accord, il y eut quelques soucis au niveau de la géographie. King’s Landing a été « adaptée » pour mieux coller à la bataille de l’épisode 5. Un exemple parmi d’autres. Oui, parfois, les ellipses furent un peu brutales. Rien pour me déranger et me faire déconnecter, mais je comprends que cela ait pu irriter les plus tatillons. Personnellement, je me fous un peu de ce genre de choses quand le spectacle parvient, comme ce fut le cas ici, à me prendre aux tripes pour littéralement me clouer à mon canapé. C’est ma façon de vivre de tels divertissements. Un film, une série donc, mais aussi un livre ou un morceau de musique. Je n’ai jamais été celui qui pointait du doigt le micro encombrant dans la scène du parloir de Midnight Express. Les faux raccords m’ont toujours laissé indifférent. Scorsese, Coppola… Tous sont passés par là. Les plus grands chefs-d’œuvre contiennent leur lot d’erreurs. Pour faire la comparaison avec la musique, je me fous qu’un musicien fasse une fausse note pendant un concert quand l’émotion est là et que sur scène, le groupe déploie une énergie dévastatrice. Une coquille dans un livre, aussi prestigieux soit-il, ne va jamais me faire « sortir » de l’histoire si celle-ci a réussi à m’entraîner quelque-part où je n’étais jamais allé et où je me sens en l’occurrence très bien. C’est pour cela que j’aime autant le cinéma, les séries, la littérature et la musique. Un bon film peut totalement me sortir de la réalité l’espace d’un instant et m’encourager à rêver. Il peut me terroriser ou me faire rire, me faire oublier mes petits soucis, m’inspirer ou m’inciter à réfléchir sur tel ou tel sujet. Game Of Thrones m’a procuré ce genre de sensation. De saison en saison, depuis le premier jour, quand j’ai voulu jeter un œil à cette nouvelle série d’heroic fantasy, sans trop y croire (parce qu’avant, l’heroic fantasy à la TV, ce n’était pas gagné), l’histoire de Westeros et de ses Sept Couronnes m’a totalement habité. Quand j’aime quelque chose, j’aime à fond. Sans retenue. Sans peur du ridicule et sans tenir compte de ce que peuvent affirmer ceux qui n’aiment pas. La chute de Bran fut le premier choc. C’est là que j’ai vraiment été happé. La mort de Ned Stark, les répliques de Tyrion, la renaissance de Daenerys, les Noces Pourpres, la Bataille des Bâtards, la destruction du Mur… Autant de moments que j’ai vécu sans retenue. Et il en fut de même avec les nombreux temps forts de la dernière saison.

Comment pourrais-je alors me « forcer » à reconsidérer tout ce que Game Of Thrones a pu m’offrir dans le seul but de tenter de tomber d’accord avec ceux qui n’ont pas aimé ? Comment et pourquoi ? Pourquoi chercher la poutre que, si on en croit certains commentaires, j’aurais dans l’œil si l’expérience que j’ai vécu depuis mon canapé n’a eu que peu d’équivalent dans ma vie d’adulte cinéphile et « sériephile » ? Dans quel but ? Devrais-je vraiment m’émouvoir devant un gobelet oublié sur une table et faire taire mon amour des personnages et ma passion pour une histoire de plus en plus intense ? On ne force pas la passion et en cela, je comprends les déçu.e.s et respecte tous les avis. Je trouve juste dommage, soit dit en passant, que certains de ces fans déconfis se soient à ce point braqués contre ceux qui ont aimé sans réserve. À titre de comparaison, je n’ai jamais vibré devant Avatar mais je n’ai jamais pour autant cherché à faire changer d’avis les admirateurs du film. Si je me retrouve à parler de musique à un type et que celui-ci me balance que pour lui Bigflo & Oli ont plus de talent que les Beatles, vais-je perdre du temps à tenter de le faire changer d’avis ? Admettons que j’y arrive ? Que le gars se range de mon côté et pense lui aussi que les Beatles, il n’y a pas photo, sont largement meilleurs. Qu’est ce que j’y aurais gagné ? J’aurai juste réussi à démonter la passion d’une personne. J’aurai détruit un truc qui la rendait heureuse. Je ne sais pas si je suis clair mais je pense que vous voyez ce que je veux dire…

Mais je le répète, je peux parfaitement comprendre les mauvaises critiques. Les plus argumentées en tout cas.

Je tiens donc à remercier Game Of Thrones. Si je m’en tiens uniquement aux séries TV, je n’ai vécu que très peu de fois une expérience aussi intense. Lost m’a profondément bouleversé. J’ai revu la série plusieurs fois et cela n’a jamais changé. Les Sopranos aussi. Un authentique choc. La série m’a parlé et d’une certaine façon, fait partie de moi. L’interprétation que j’en ai en tout cas. Celle-là n’appartient qu’à moi. Je peux aussi citer The Leftovers ou Breaking Bad et Better Call Saul. Même si cette dernière n’est pas encore terminée, elle m’a tellement prise à la gorge qu’il semble impossible qu’un jour elle me déçoive. Pour ce qui est de GOT, c’est la même chose. Quand la première saison s’est terminée, à l’époque, je me suis empressé de lire tous les livres disponibles. Je ne pouvais pas attendre un an avant de connaître la suite. Impossible. Plus tard, je suis allé sur plusieurs lieux de tournage pour vraiment m’imprégner de l’ambiance. En Espagne et en Irlande du Nord. Des périples presque mystiques. J’ai conscience qu’on puisse trouver cela ridicule mais vous pensez bien, je m’en balance. Game Of Thrones, comme les autres séries citées plus haut, a fait vibrer en moi une corde plutôt difficile à atteindre. Complètement submergé par la passion, j’ai totalement approuvé les choix, techniques et narratifs, de l’équipe. J’ai compris l’amour inconditionnel de Tyrion pour sa Reine et compris la détresse de Daenerys avant que celle-ci ne bascule. J’ai admiré la détermination d’Arya et celle de Sansa. Concernant Arya, petit parenthèse, le fait qu’elle surgisse pour tuer le Night King ne m’a pas choqué. Non, car Arya évolue dans un monde où il est possible de changer de visage. Un monde où les dragons sont de la fête et les loups parfois beaucoup plus grands que la moyenne. Un monde de géants, d’Enfants de la Forêt et de zombies. La mort du dragon de Daenerys sur les côtes de Dragonstone ne m’a pas plus marqué par sa soit-disant incohérence. Comme si la possibilité de l’effet de surprise n’avait jamais existée, à Westeros comme ailleurs. Deux exemples parmi d’autres. On peut trouver mes « explications » foireuses. Je pourrais aussi développer et prendre un par un chaque point soulevé par les fans mécontents mais ce serait une perte de temps. Je rajouterai quand même que pour moi, la mort de Cersei fait partie des grands moments de la série. J’ai adoré le Clegane Bowl aussi bien évidemment et, mais là je me répète, la toute fin… Une conclusion à la hauteur de tout ce qui a précédé. Un ultime morceau de bravoure qui m’a submergé et laissé K.O. et admiratif. Sur mon canapé, à 4h10 du matin, j’ai regardé le générique de fin jusqu’au bout avant de retourner me coucher et de repenser à tout ce que je venais de voir. Une fin d’une sensibilité extrême, poétique, intelligente et nuancée. Alors oui, merci Game Of Thrones. Merci pour ces 8 saisons extraordinaires. J’ai tremblé, j’ai été ému plus d’un fois, j’ai ri aussi parfois et jubilé, et pas une fois je n’ai décroché. Voilà pour moi ce que signifie Game Of Thrones. Une série exceptionnelle de A à Z donc, qui en plus, et c’est l’apanage des chefs-d’œuvre, a su se montrer clivante. Car ne nous y trompons pas, les bonnes critiques comme les mauvaise participent activement à l’aura de Game Of Thrones. Et si vous pensez que le phénomène a atteint son point culminant, attendez un peu quelques années. Mais je peux aussi me tromper. C’est juste mon avis et si il n’a de grande signification que pour moi, il vaut néanmoins bien le vôtre !

@ Gilles Rolland

Par Gilles Rolland le 20 mai 2019

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Serge
Serge
5 années il y a

Merci à GoT pour toute la saga et merci à toi pour ton article. Ça fait du bien de lire quelque chose de positif, de mesuré et d’argumenté sur GoT ! C’est devenu tellement rare de nos jours 😀