[Critique] LUCY

CRITIQUES | 8 août 2014 | 6 commentaires
Lucy-affiche-France

Rating: ★☆☆☆☆

Origine : France
Réalisateur : Luc Besson
Distribution : Scarlett Johansson, Morgan Freeman, Min-Sik Choi, Amr Waked, Analeigh Tipton, Claire Tran, Mason Lee…
Genre : Science-Fiction/Action/Fantastique
Date de sortie : 6 août 2014

Le Pitch :
À Taïwan, Lucy, une étudiante américaine, se fait kidnapper par des truands qui décident de lui cacher dans le ventre un sachet d’une drogue expérimentale surpuissante. Manque de bol, le sachet se perce et se répand dans l’organisme de la belle. Dès lors, la pauvre malheureuse voit ses capacités cérébrales se multiplier. Alors que la plupart des êtres humains n’utilisent que 10% de leur cerveau, Lucy fait beaucoup mieux. Au fil du temps, la jeune femme colonise son propre cortex, et acquiert des pouvoirs illimités…

La Critique :
Un grand homme a dit un jour : « Lucie, Lucie c’est moi je sais. Il y a des soirs comme ça où tout… s’écroule autour de vous. Sans trop savoir pourquoi toujours. » Des phrases pleines de bons sens qui peuvent très bien s’appliquer à la Lucy du nouveau film de Luc Besson, nommée ainsi, non pas à cause de notre ami Pascal O., mais bien par rapport à la première femme découverte à l’état de fossile en 1974 en Éthiopie.
Car la Lucy de Besson connaît bien ce que l’on éprouve quand « tout s’écroule autour de vous ». Pour elle, tout part en vrille quand un paquet de drogue qu’on lui a fourré de force dans les boyaux, se perce et répand son poison dans son organisme. L’effet est immédiat et transforme la jeune femme en être sur-puissant, capable de faire tourner ses méninges à plein régime, contrairement à nous, pauvres moutons tout juste capables d’utiliser 10% de nos capacités cérébrales. Bref, avec son nouveau long-métrage, Besson nous parle d’intelligence.
Et pas uniquement de cela, si on en juge les (trop) nombreux passages explicatifs, durant lesquels Besson nous parle des premiers hommes, des dinosaures, de la civilisation galopante et de l’avenir de l’homme. C’est d’ailleurs comme ça que commence Lucy : par une femme préhistorique qui boit de l’eau. Une voix, celle de Scarlett, nous explique ensuite que depuis qu’on nous a donné la vie, nous n’avons rien trouvé de mieux à faire que de coloniser la terre pour y construire des trucs. Voici la première leçon de morale que Besson nous assène. Vu qu’il est à ce jour l’un des plus grands entrepreneurs français, ça sent franchement le gros foutage de gueule. La dernière réplique du métrage viendra plus tard enfoncer le clou de cette leçon de vie en carton qu’est Lucy.

Mais ce n’est que le début. Lucy déboule. Elle est belle (normal c’est Scarlett qui lui prête ses traits) et innocente, voire un peu cruche. Son boyfriend la pousse à livrer une valise et paf !, elle se retrouve sous la coupe de méchants chinois. Une fois transformée involontairement en super héroïne inexpressive par ses agresseurs, Lucy fait tout et n’importe quoi. Être plus intelligent, pour Besson, rime avec savoir conduire dans les embouteillages parisiens en provoquant des accidents potentiellement mortels, se bastonner sans toucher les gens, jouer à Carrie en faisant bouger des trucs à distance, pénétrer les rouages de l’internet, apprendre des langues étrangères, sentir ses os pousser, se rappeler le goût du lait maternel, marcher sur les murs, changer la couleur de ses cheveux… Ce genre de truc. En fait, si vous avez vu Limitless et le récent Transcendance, vous avez tout compris à Lucy, car c’est plus ou moins la même chose. Comme Bradley Cooper dans Limitless, Scarlett devient ultra maligne grâce à une drogue expérimentale, et comme Johnny Depp dans Transcendance, elle se transforme en créature omnipotente, capable de tout (surtout du pire en fait).
Rien, mais alors rien du tout n’est original dans Lucy. Luc Besson est un vendeur hors-pair et du coup, il tente de déguiser son film. Quand on l’écoute, Besson affirme que son dernier né est un trip d’action hautement philosophique. Voire carrément métaphysique. À l’entendre disserter sur l’évolution de sa nouvelle héroïne, on pourrait croire que le papa de Léon a lui aussi poussé sa matière grise dans ses derniers retranchements. Les plans de l’antilope chassée par le guépard en début de métrage et les explications foireuses du personnage incarné par Morgan Freeman venant nourrir cette volonté d’élever son cinéma à un autre niveau de conscience.
Mais tout cela n’est que du vent. Dans les faits, Lucy est d’une prétention folle. Ce nouveau film illustre la mégalomanie d’un réalisateur définitivement gangrené par une auto-satisfaction destructrice. Tellement dévorante qu’il ne voit même pas qu’il plagie et photocopie à tour de bras. Qu’il recycle jusqu’à ses propres idées (Nikita + Leeloo = Lucy) sans prendre la peine de les maquiller.
Intervenant après le piteux mais plus modeste Malavita, Lucy fête le retour du Besson égocentrique, tel qu’il se présente chaque fois que les médias lui en donnent l’occasion. Peut-être un poil frustré par l’indifférence polie soulevée par son dernier film, Luc met les bouchées doubles, renoue avec la science-fiction et tente la fable existentielle se prenant pour le coup à la fois pour Terrence Mallick, Stanley Kubrick ET pour Steven Spielberg.

Ce qu’il ne comprend pas, c’est que la science-fiction se doit d’avoir un point d’ancrage dans la réalité pour fonctionner un tant soit peu et ainsi déclencher l’empathie. Les Avengers par exemple, sont tous ce qu’ils sont pour une bonne raison. Ils ont de plus tous leurs limites. Idem pour Superman qui est un alien. Lucy, elle, est humaine, et sert à illustrer la théorie selon laquelle l’humain n’utilise que 10% de ses capacités cérébrales. Une théorie de foire (pour ne pas dire foireuse) depuis longtemps démontée en long, en large et en travers par de vrais spécialistes du sujet. Une légende urbaine que Besson prend au sérieux. Ce qui s’avère vite gênant, tant le spectacle qui en découle s’apparente à une enfilade parfois carrément pathétique de scènes transpirant à plein tube la bêtise. Tout, mais alors vraiment tout, dans Lucy est basé sur ses fameux 10%. Découpé en paliers, le long-métrage progresse au rythme de la montée en puissance de l’intelligence de Scarlett. Elle débute à 10% puis monte dans les tours, etc… Et vas-y que j’arrose tout ceci de théories maison encore plus fumantes, provoquant un décrochage total. Besson plane très haut… et se brûle les ailes hyper rapidement.

Le vrai problème de Lucy est donc la prétention de son auteur. Le cinéma permet n’importe quelle audace. On peut raconter ce que l’on veut, de la manière que l’on veut. Le problème avec un pitch comme celui de Lucy, est qu’il aurait nécessité du recul. Du second degré aussi. Pas un sérieux total dans son propos comme c’est le cas ici. Un sérieux qui rend toute l’entreprise aussi fragile qu’un château de cartes et aussi ridicule que possible.

Scandaleusement prétentieux, Lucy n’en demeure pas moins bien réalisé. Sur un plan purement visuel, il recèle de choses intéressantes, comme cette poursuite automobile frénétique mais relativement bien orchestrée. Niveau effets spéciaux malheureusement, Lucy est très inégal. Parfois, ça passe et d’autres fois pas du tout. Ce qui pour une production de ce niveau, relève encore une fois du foutage de gueule.
Scarlett quant à elle, est remarquablement sous-exploitée. Comme tous les autres acteurs du casting d’ailleurs. Besson ne perd pas son temps à diriger ses comédiens. Il se concentre sur Lucy qu’il vide de toute émotion aussi vite que possible, pour en faire une sorte de robot dénué de nuances. Peu inspirée d’avoir accepté de se compromettre là-dedans, Scarlett apparaît à l’écran comme une (sublime) coquille vide, réduite à une ou deux expressions totalement surfaites. Tout ceci parce que -sachez-le- l’intelligence suprême annihile les émotions… On aura tout vu…

Épuisant, vain, creux et, il faut le dire, souvent très con, Lucy est sans aucun doute l’un des pires films de son auteur. Il témoigne du désintérêt total de Besson pour l’art qui lui a permis de se hisser tout en haut de la chaîne alimentaire du cinéma français. Il confirme qu’aujourd’hui, Besson est surtout un business man. Un entrepreneur qui fait du fric et qui, quand il repasse derrière la caméra, est incapable de renouer avec la verve de ses débuts. Le pire est qu’il ne semble pas s’en rendre compte. Noyé dans de l’action tapageuse, vue et revue dans ses propres productions, son dernier film finit par ne plus ressembler à rien. Le tout sans prendre en compte l’intelligence d’un public qu’il toise du haut de sa tour d’argent.

@ Gilles Rolland

Lucy-Scarlett-Johansson-Luc-BessonCrédits photos : EuropaCorp Distribution

 

Par Gilles Rolland le 8 août 2014

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kevkzv
kevkzv
9 années il y a

Pffffff totalement débile, on dirais presque de la jalousie, j’ai jamais vu un film aussi bien de ma vie, les 10% ne sont pas une théorie Luc a fait un excellent travail et vous verrez par la suite que c’est possible tout cela ce n’est juste que “L’humanité n’est surmenet pas assez evolué pour tout ca” Pitoyable critique.

Jo
Jo
9 années il y a

Il l’a dit : “l’humanité n’est certainement pas prêt” pour cela et c’est vrai à entendre la critique. ont’ils vraiment compris ? Sont-ils vraiment conscient de leur environnement et des choses qui se font autres que ce que les 5 sens peuvent permettre de ressentir ?
Chapeau Besson. Vous avez une longueur d’avance. je n’ai pas encore retrouvé la dernière phrase du film mais celle là mérite qu’on s’y arrête !

Zou
Zou
9 années il y a

Scarlett Johanson est sublime, les chinois sont méchants, Morgan Freeman est vieux et sage, les francais sont complètement dépassés mais gentils quand même, et utiliser son cerveau à 100% ( le mythe rassurant des 10% a encore de beaux jours devant lui) nous transformerait en machine dépourvue de scrupules, d’empathie et d’altruisme. Et nous placerait bien évidemment au dessus des lois.
Je sors du ciné et j’ai l’impression d’avoir vu un court medley de plein de films que j’aime beaucoup, et de clichés…sauf que je n’ai toujours pas compris pourquoi Lucy se retrouve dans la petite piece grise alors que toutes les autres mules sont mises dans un avion pour rentrer chez eux…

Mnl
Mnl
9 années il y a

Critique pitoyable, ce film nous en apprend énormément d’un point de vue philosophique. Luc Besson nous fait partagez un moment divertissant tout en étant instructif même si le sujet n’est pas des plus originals actuellement. Mais bon il faut avoir l’esprit un minimum ouvert pour comprendre et donc apprécier…

nopainnobrain
nopainnobrain
9 années il y a

Pas d’accord du tout avec cette critique ! ce film est tout simplement un chef d’oeuvre ! rien ne manque ! le plus important dans ce film est de ce pencher sur le philosophique et le scientifique. Ce film rappel bien que le cerveau humain nous commande et l’inverse est pour l’instant impossible. sans doute le meilleur film de l’année

lucy
lucy
9 années il y a

Ce film m’a laisser sens vois , superbe film