[Critique] THE MOST HATED WOMAN IN AMERICA

CRITIQUES | 12 avril 2017 | Aucun commentaire
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Titre original : The Most Hated Woman In America

Rating: ★★★½☆
Origine : États-Unis
Réalisateur : Tommy O’Haver
Distribution : Melissa Leo, Juno Temple, Josh Lucas, Michael Chernus, Adam Scott, Peter Fonda, Rory Cochrane, Vincent Kartheiser…
Genre : Drame
Date de sortie : 24 mars 2017 (Netflix)

Le Pitch :
Madelyn Murray O’Hair a milité toute sa vie pour une meilleure séparation de l’Église et de l’État, se heurtant sans cesse à l’agressivité de farouches opposants. Fondatrice de l’association American Atheist, Madelyn a toujours clamé haut et fort ses convictions, envers et contre tous, devenant l’une des figures les plus controversées de l’histoire contemporaine des États-Unis…

La Critique de The Most Hated Woman In America :

Nouvelle production Netflix, The Most Hated Woman In America, s’intéresse à un sujet relativement casse-gueule. De quoi expliquer que seul un network comme Netflix ait finalement accepté de le porter et du même coup justifier son absence des programmations des multiplexes. Surtout depuis le changement de locataire à la Maison Blanche, qui a de toute évidence encore un peu plus flouté la frontière qui sépare les pouvoirs de l’Église et ceux de l’État. Car The Most Hated Woman In America s’intéresse à la créatrice de l’American Atheist, une association qui lutte justement pour la séparation de ces deux pouvoirs. Une personnalité décriée, qui n’a pas manqué, en son temps, de faire un maximum de vagues dans la communauté des défenseurs les plus ardents d’une politique opposée à des concepts comme la laïcité…

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Casting divin

Madelyn Murray O’Hair ne pouvait pas trouver meilleure interprète que Melissa Leo. Comédienne relativement omniprésente du cinéma américain, elle fait partie de celles dont on connaît le visage sans pour autant qu’on soit capable d’y associer un nom. Connue pour sa propension à faire preuve d’une certaine audace dans ses choix, elle campe ici un personnage parfait, qui lui sied à merveille. Que ce soit au début, quand s’éveillent en elle des convictions qui vont considérablement changer le cours de son existence où à la fin, quand Murray O’Hair doit composer avec une célébrité plus néfaste qu’autre chose, Melissa Leo trouve la bonne tonalité. Armée d’une gouaille tout à fait à propos et d’un charisme qui fait des merveilles, elle ne force pas trop le trait (juste ce qu’il faut) et parvient également à retranscrire des sentiments moins évidents, comme la peur ou le doute, notamment quand son personnage confronte ses choix à son désir de sauvegarder sa famille. Incarner un tel rôle demandait un maximum de cran et force est de reconnaître que Melissa Leo n’en manque jamais. De la première à la dernière scène, elle porte le film et lui permet de s’extraire de la masse des biopics un peu trop académiques.
Une actrice qui peut compter sur Juno Temple, autre force vive du cinéma américain, souvent inexplicablement sous-estimée, et qui fait preuve d’un dévouement plutôt surprenant et, tout en restant en retrait, livre une performance digne de son talent. Tout comme Michael Chernus, Adam Scott et Josh Lucas d’ailleurs, qui sont tous au diapason. Sans oublier le grand Peter Fonda, qui semble prendre beaucoup de plaisir à incarner quasiment à lui tout seul le vers qui creuse ses tunnels dans un fruit défendu vendu à des millions d’Américain sous couvert d’un discours alarmiste. Fonda dont le jeu, certes pas super finaud, sert néanmoins très bien le discours du film. Il incarne l’opposition à l’athéisme de la protagoniste principale mais retranscrit aussi les vraies velléités d’une organisation religieuse beaucoup plus soucieuse de s’en mettre plein les poches que de soigner les âmes de ses ouailles.

God Save Uncle Sam

C’est d’ailleurs là, quand il met de l’eau dans son vin et souligne davantage les nuances de gris, que le long-métrage gagne ses galons. Si elle milite pour la séparation de l’Église et de l’État, Madelyn Murray O’Hair s’attaque surtout au fanatisme et aux institutions corrompues, qui agissent sous couvert d’une foi parfois viciée. À l’instar de son personnage central, le film ne tire pas à boulets rouges sur la représentation de Dieu, mais sur l’interprétation que font les plus zélés, des enseignements de la Bible. Ce qui, en 2017, à l’heure du retour de la prière du matin dans l’agenda du chef du monde libre, s’avère on ne peut plus courageux.
En fait, c’est à cela que le récit s’attache le plus : aller à l’encontre d’une domination sans partage d’idées et de concepts imposés en amont au plus grand nombre et prôner le droit à la liberté de penser. La scène où Madelyn s’indigne à supprimer la prière du matin dans les écoles, prétextant notamment que tous les élèves ne sont pas catholiques et qu’une telle chose peut donc s’avérer problématique, est particulièrement révélatrice du propos de cette histoire beaucoup plus nuancée qu’on ne peut se l’imaginer de prime abord. Même si l’écriture du scénario pêche un peu, à l’instar de la mise en scène, par un excès de classicisme, qui ne rend pas justice à l’audace et à l’attitude plus « turbulente » de l’héroïne… Au final, c’est bel et bien grâce à son sujet, méconnu et donc passionnant, à sa propension à profiter de certains éléments de l’intrigue pour lorgner du côté du thriller tout en restant proche des codes séculaires du biopic, et à la présence de Melissa Leo et des autres comédiens, que The Most Hated Woman In America brille. Peut-être pas autant qu’il aurait pu le faire, avec un peu plus d’ambition, mais suffisamment pour s’imposer comme un brûlot libertaire tout à fait recommandable.

En Bref…
The Most Hated Woman In America ne jouit pas d’une mise en image et d’une écriture très originales, mais parvient à tirer son épingle du jeu grâce à son propos, quoi qu’il en soit passionnant, car révélateur de problématiques toujours à l’ordre du jour, et la performance d’une Melissa Leo parfaitement à sa place.

@ Gilles Rolland

The-Most-Hated-Woman-In-America-cast  Crédits photos : Netflix

Par Gilles Rolland le 12 avril 2017

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