[Critique série] BRAQUO – Saison 1

SÉRIES | 8 février 2014 | Aucun commentaire
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Titre original : Braquo

Rating: ★★★★½
Créateur : Olivier Marchal
Réalisateurs : Olivier Marchal (Episodes 1 à 4), Frédéric Schoendoerffer (Episodes 5 à 8)
Distribution : Jean-Hugues Anglade, Nicolas Duvauchelle, Joseph Malerba, Karole Rocher, Geoffroy Thiebaut, Alain Figlarz, Samuel Le Bihan, Pascal Elso…
Genre : Policier/Thriller
Diffusion en France : Canal+
Nombre d’épisodes : 8

Le Pitch :
Eddy Caplan, Théo Vacheswki, Walter Morlighem et Roxane Delgado font partie de la VP, une petite équipe de choc au sein du SDPJ des Hauts-de-Seine. Lors de l’interrogatoire d’un suspect dans une affaire sordide, leur chef Max Rossi dégoupille et le blesse gravement à l’œil. Mis en cause, il se suicide. Voulant laver l’affront et blanchir Rossi, les quatre policiers, aux méthodes plus quediscutables, franchissent irrémédiablement la ligne jaune. S’ensuit pour eux une fuite en avant, poursuivis par Roland Vogel, commandant de l’Inspection Général des Services, et par le procureur de la République Vanderbeke, qui se sont jurés de les faire tomber. Ils auront également affaire à des familles du crime organisé…

La Critique :
En l’An de grâce 2005, le bilan de la série policière française est presque ridicule. Pris en otage par des têtes de gondole comme les abominables Julie Lescaut, Commissaire Moulin, Navarro, Les Cordier, juge et flic, Femmes de Loi, les très sages PJGroupe Flag, ou la ridicule Les Bleus, le genre passe pour pas du tout original, et même carrément beauf. Des séries juste bonnes à être refourguées à TF1, France Télévision, M6 et autres chaines de leurs groupes. Seul Sur Le Fil ose évoquer des policiers borderline. Canal + ose le pari audacieux Engrenages autour du thème de la balance des pouvoirs, entre la Justice et la Police. Quatre ans plus tard déboule un pool de scénaristes composé, entre autres, de l’écrivain DOA, et de l’ancienne figure du grand banditisme Frank Henry alias Frankus. À leur tête, Olivier Marchal, ancien policier, réalisateur de Gangsters, 36, Quai des Orfèvres et MR 73. Alors qu’il s’était fait les dents en réalisant des épisodes pour les séries navrantes citées plus haut, il décide de noircir considérablement le ton et de prendre le parti de la crédibilité (ce côté réaliste, on le voit aussi dans le jargon utilisé par les deux côtés de la loi).

Braquo se revendique dans la lignée de la série américaine The Shield. Et en voyant autant le parti pris et le casting de gueules, il est difficile de ne pas faire le parallèle entre les deux séries. Walter Morlighem, par exemple, présente un profil physique (crâne rasé, baraqué), et moral (pas d’hésitation à l’utilisation de la violence, les petites magouilles…) que Vic Mackay. Le point commun principal est la désacralisation du flic. Le policier n’est plus un gentil chevalier des temps modernes, il a ses failles, n’hésite pas à commettre l’irréparable quitte à descendre irrémédiablement aux enfers, et utilise des méthodes dignes de criminels. Comme The Shield, Braquo est une série tendue, nerveuse, sans aucun temps mort. Toutefois, on ne peut pas non plus dire que la création de Marchal est un copier-coller, loin de là. Bien plus sage que son ainée, elle possède en plus son identité propre. Les Hauts-de-Seine ne sont pas Los Angeles, il y fait moins beau et ça se traduit sur la photo, participant au côté très sombre (qu’on remarque dès le très beau générique bien dark). On ne parle pas de gangs, mais l’environnement urbain n’est pas moins hostile que celui de la Cité des Anges. On croise tour à tour un truand charismatique, une famille gitane, des braqueurs de banque ou encore un tortionnaire albanais (rien que ça). Des personnages qui auraient pu défrayer la chronique judiciaire française. Mais l’ennemi n’est pas seulement extérieur, il est avant tout à l’intérieur de la Police, campé par un procureur et par un bœuf carotte vindicatifs. Ce dernier, très bien interprété par Geoffroy Thiebaut, va connaitre une vraie évolution, passant de petite fouine à authentique méchant de série. Les personnages principaux sont interprétés par un beau casting, avec en premier lieu le duo Anglade/Duvauchelle. Les acteurs de cinéma qui apparaissent dans des séries françaises n’étant pas légion à l’époque, le choix a pour le moins été judicieux. Anglade a donné un coup de projecteur mérité à sa carrière, lui qui était cantonné aux rôles dans de petits films, et ce, dans un registre inhabituel qui lui va très bien. Duvauchelle lui, évolue dans un registre proche de Patrick Dewaere, dans le rôle du jeune flic, tête brûlée, impulsif, passionné et entier. Joseph Malerba (Mesrine 2, Les Liens du Sang…) et Karole Rocher (Le Bal des Actrices), pas ou peu connus, gagnent à être connus. Cette dernière campe Roxanne, le personnage le plus touchant, à la fois forte et fragile. La réalisation est elle aussi assurée par de beaux noms. Olivier Marchal et Frédéric Schoendoerffer apportent chacun leur style et on le voit à l’évolution de l’intrigue. La partie la plus sombre, le côté polar réaliste, est assuré par le premier, quand le second élargit l’énigme vers des sphères inattendues, et muscle l’action.
Très bien réalisée et jouée, sombre à souhait, Braquo abandonne les sourires forcés aux blagues à deux balles, les flics gentils, les stéréotypes de comptoir pour des profils plus nuancés, plus obscurs et donne au genre le coup de pied dont il avait besoin depuis toujours. La meilleure série du genre en France, qui peut lorgner vers des standards américains.

@ Nicolas Cambon

Braquo-saison-1

Par Nicolas Cambon le 8 février 2014

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