[Critique] ALL CHEERLEADERS DIE
Titre original : All Cheerleaders Die
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Lucky McKee, Chris Sivertson
Distribution : Caitlin Stasey, Siano Smit-McPhee, Brooke Butler, Amanda Grace Cooper, Tom Williamson, Reanin Johannink…
Genre : Horreur
Date de sortie : 19 août 2015 (DTV)
Le Pitch :
La mort brutale de la capitaine des cheerleaders de Blackfoot High, lors d’un entraînement, a profondément choqué les lycéens. Quand Maddy, la rebelle de l’établissement, prend sa place, la surprise est totale. Ce qu’ils ne savent pas, c’est que cette dernière a un plan et que ses actes ne sont dictés que par un pur désir de vengeance. Une vengeance qui va prendre une sale tournure quand les filles de l’équipe des pom-pom girls vont se voir dotées, à la suite d’un violent accident, de pouvoirs surnaturels…
La Critique :
Remarqué grâce à son traumatisant May, Lucky McKee a également secoué son monde avec The Woman, sa propre déclinaison de L’Enfant Sauvage de Truffaut. Deux films bien glauques, tranchés, au propre comme au figuré, et portés par la volonté farouche d’un réalisateur désireux de ne pas forcément suivre les règles en vigueur. Indépendant face au pouvoir d’attraction des gros studios, McKee n’en fait qu’à sa tête et a donc choisi, pour sa dernière livraison, de refaire son premier long-métrage, All Cheerleaders Die. Plus de 10 ans après ses débuts, certainement convaincu qu’il pouvait désormais offrir à cette histoire étrange de cheerleaders voraces un meilleur écrin, avec son expérience et un budget plus confortable, le réalisateur et son fidèle comparse Chris Sivertson reviennent à la charge et entraînent dans leur sillage une star en devenir, soit la jolie australienne Caitlin Stasey.
D’emblée, All Cheerleaders Die rappelle Jennifer’s Body, le film dans lequel Megan Fox dévorait ses prétendants après leur avoir fait miroiter monts et merveilles (mais vu que le premier Cheerleaders est sorti en 2001, on sait qui a inspiré l’autre). Le truc qui diffère, c’est qu’ici, c’est une sorcière qui confère leurs pouvoirs aux pom-pom girls et non une incantation satanique, et que les filles sont plusieurs. À partir de là, en greffant à son concept de base une histoire en somme toute basique de vengeance, Lucky McKee et Chris Sivertson tricotent un film d’horreur plutôt violent, vaguement sulfureux, mais surtout un peu trop bancal. Il n’y a qu’à regarder les effets-spéciaux pour s’en convaincre. Là est le gros point noir d’un film qui aurait dû se contenter des plans gores, par ailleurs plutôt convaincants, et rejeter l’idée de ces petites pierres magiques dont chaque intervention se solde par un échec graphique indéniable. Mention spéciale à la séquence où une des pom-pom girls aspire à distance le sang d’un pauvre gus en rut… Lors de ces moments, plutôt gênants de la part d’un cinéaste populaire pour son talent de metteur en scène, le budget modeste apparaît et empêche de vraiment illustrer correctement un récit où le surnaturel ne prend pas des formes toujours esthétiquement réussies. Dommage car sans cette tare, All Cheerleaders Die ne se serait pas coltiné cette patine série Z, qu’il possède quand ces effets numériques ratés gâchent les intentions de base.
Pour ce qui est du scénario, même si le second degré a clairement motivé la démarche, difficile également d’être pleinement convaincu. Prenant pied dans le microcosme des cheerleaders et des joueurs de football américain, le film prétend en démonter les codes pour mieux les façonner et les pervertir. Le rapport de force entre les filles, souvent représentées dans d’autres œuvres comme des sortes de faire-valoir destinées à trôner aux côtés des sportifs stars de l’équipe, et les mecs, est inversé. Particulièrement salauds, les types ne sont là que pour se montrer ignobles et violents et au final, en prendre plein la poire. Avec l’ambiguïté sexuelle qui s’invite à la fête du côté des cheerleaders, McKee indique de façon limpide que son long-métrage a été pensé comme un pamphlet horrifique féministe. La fin appuyant le propos sans équivoque.
Une intention louable, renforcée par la présence de Caitlin Stasey, que l’on sait très engagée dans la lutte contre l’image de la femme objet au cinéma, mais maladroitement mise en image. Le script aussi peine à convaincre, même si on devine aisément la teneur du discours. La faute aux réactions des personnages, peu réalistes, exacerbées, et à la progression du récit, aussi prévisible que poussif quand il monte dans les tours. Les personnages sont ainsi de véritables archétypes et non, au final, le film n’est pas aussi percutant qu’il aurait pu l’être.
Pour autant, All Cheerleaders Die reste un divertissement plutôt correct. S’accrocher au second degré aide d’ailleurs à en apprécier les qualités et à mettre de côté les défauts les plus grossiers. Avec ses airs de version viciée d’un épisode de Beverly Hills, son sadisme lattant et ses pom-pom girls aussi sexy que hargneuses, le long-métrage fait office de série B sanglante, à déguster accompagnée de pop-corn et de bière. Le problème finalement, réside dans la présence tout en haut de l’affiche de Lucky McKee, qui nous a clairement habitué à mieux. Dans sa filmographie, et même si on a tout à fait le droit de ne pas goûter à ses délires malsains, All Cheerleaders Die fait alors office de gentil outsider un peu tiède et un peu trop anecdotique.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Wild Side