[Critique] ANNABELLE
Titre original : Annabelle
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : John R. Leonetti
Distribution : Annabelle Wallis, Ward Horton, Alfre Woodard, Eric Ladin, Tony Amendola…
Genre : Épouvante/Horreur/Préquel
Date de sortie : 8 octobre 2014
Le Pitch :
Les années 70 débutent à peine. L’Amérique est traumatisée par les meurtres commandités par Charles Manson. Mia et John forment un couple comme tant d’autres. Elle est enceinte et lui étudie pour devenir médecin. Afin de fêter la prochaine venue au monde de leur enfant, John offre une poupée à sa bien-aimée. Une nuit, deux membres d’une secte satanique font éruption chez le couple, animés d’une folie meurtrière terrifiante. Par la suite, de multiples phénomènes étranges ne cessent de mettre à mal la future mère, qui suspecte la poupée de personnifier une sorte de malédiction issue d’un rituel ésotérique…
La Critique :
Conjuring est instantanément devenu un classique de l’épouvante. Certes influencé par de multiples chefs-d’œuvres, le film de James Wan a su néanmoins assimiler ses références pour en effet livrer une vraie expérience horrifique, et devenir au final lui-même un incontournable du genre. Dans Conjuring, outre les démons facétieux, la poupée Annabelle avait fait forte impression, alors qu’elle n’apparaissait finalement que très peu dans le film. On peut la voir au début et à la fin. Rien d’exceptionnel en outre. Pourtant, cette rouquine aux yeux vitreux et à la tronche dégueulasse a retenu l’attention du public, qui a boosté sa popularité et ainsi indirectement réclamé que cette dernière apparaisse dans son propre long-métrage. Quelques mois après la sortie en salle de Conjuring, c’était chose faite. Le tournage d’Annabelle était lancé et à peine trois mois plus tard, il se terminait. Les choses vont vite à Hollywood quand le fric est à portée de main.
Car ne nous y trompons pas : Annabelle est l’archétype du pur produit mercantile. Un coup facile, réalisé avec peu de moyens (5 millions), pour un succès quasiment assuré et une rentabilité garantie.
James Wan bien sûr, parti faire le nouveau Fast & Furious, n’est pas aux commandes mais il veille au grain à la production. Ici, c’est John R. Leonetti qui réalise, lui qui fut directeur de la photographie sur plusieurs films de Wan comme Dead Silence, Insidious et Conjuring justement. Le gus a aussi mis en scène L’Effet Papillon 2 et un épisode de la saga Mortal Kombat. Pas folichon comme c.v., mais ce n’est pas grave tant l’objectif est de faire les choses vite et pas forcement bien. Devant la caméra, c’est pareil, donc pas de stars. Patrick Wilson et Vera Farmiga ne sont pas de partie même si leurs personnages, les Warren, sont évoqués. À la place nous retrouvons Annabelle Wallis (ça tombe bien) et Ward Horton, soit une actrice peu connue mais néanmoins douée pour exprimer une peur viscérale, et un comédien transparent visiblement engagé pour son visage anguleux tout droit sorti d’une publicité vintage pour une marque de cravate.
Vintage d’ailleurs, Annabelle l’est assurément. L’action se déroule dans les années 70, bien avant les événements relatés dans Conjuring. Une époque bien pratique qui permet au film de faire d’incessants clins d’œil à Rosemary’s Baby, avec sa jeune maman inquiète, et son immeuble résidentiel sous l’emprise d’une malédiction issue de rituels sataniques.
Avec une assurance folle, le film de Leonetti se mesure au classique de Polanski, sans se priver de faire du pied à d’autres grands noms. Vu qu’il n’est pas Conjuring, les références écrasent vite ce préquel et rappellent surtout à quel point ce dernier ne parvient jamais à accomplir ce qu’il pense accomplir avec brio et que, sans vouloir faire son rabat-joie, c’était mieux avant.
Venons-en maintenant à Annabelle. Voyez-vous, Annabelle n’est pas Chucky. Annabelle est une poupée passive. Contrairement à Chucky, qui va au charbon, le couteau au poing, avec ses petites pattes et ses petits bras, Annabelle reste tranquillement le cul posé sur son rocking chair qu’elle fait volontiers se balancer de temps à autre. Autre différence de taille, Annabelle ne parle pas. Chucky lui, fait des vannes. Et souvent, il est drôle. Pas Annabelle. Elle, elle se contente d’afficher une expression statique et de devenir de plus en plus crade au fil des minutes. Reste que cette expression, visiblement, fait peur. Soit !
Dans les faits, le jouet n’est que le vecteur des forces du mal, dont le principal objectif et de choper une âme au vol pour s’en repaitre. Annabelle est leur porte d’entrée, c’est tout. Quand on pense que Don Mancini, le papa de Chucky, cherche à réunir les deux poupées dans un seul et même film, on lui souhaite bien du courage… Annabelle est une grosse feignasse pas même foutue de cligner des yeux.
Cela dit, si le long-métrage est en effet opportuniste et bien entendu dispensable, il n’est pas non plus totalement mauvais. Démonté par les critiques, qui le comparent systématiquement à Conjuring, Annabelle, si on l’entrevoit de manière individuelle, reste honorable. Oui, oui, honorable.
John R. Leonetti, tout content de se retrouver seul aux manettes d’un film attendu, en fait des caisses. Il case tout ce qu’il sait faire, y compris un plan séquence, il est vrai plutôt pas mal. Ses jump scares sont, ô surprise, plutôt efficaces et quelques scènes s’avèrent même vraiment surprenantes (tout est relatif). En somme, largement de quoi contenter les amateurs de frissons vite consommés.
Pour le reste, c’est sûr, le film croule sous les clichés. C’est trop long, téléphoné, parfois soporifique, plutôt crétin par moments, et bancal au possible. Pas de quoi sauter au plafond, mais en l’état, malgré tous ses défauts qui entravent la bonne marche de la peur, vu les circonstances, le contrat reste néanmoins rempli. On surfe à fond les bananes sur le succès de Conjuring, qui reste supérieur, et on limite au final les dégâts. Annabelle n’est pas le gros navet redouté mais un film d’épouvante basique relevé par une ambiance old school plutôt maîtrisée et par, on le répète, une poignée de séquences efficaces.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Warner Bros. France
iiiiiiiiiiiiii j ai peur