[CRITIQUE] BARBIE

Titre original : Barbie
Rating:
Origines : États-Unis/Royaume-Uni
Réalisatrice : Greta Gerwig
Distribution : Margot Robbie, Ryan Gosling, America Ferrera, Rhea Perlman, Will ferrell, Michael Cera, Emma Mackey, Dua Lipa, Kate McKinnon…
Genre : Comédie
Durée : 1h54
Date de sortie : 19 juillet 2023
Le Pitch :
Tout va bien pour Barbie qui, parmi les autres Barbie, vit la meilleure des vies à Barbie Land. Un jour pourtant, Barbie se réveille avec des idées noires et son monde vole en éclats. Une seule solution pour tout arranger : franchir la frontière de son univers pour rejoindre le monde réel. Une aventure dans laquelle s’invite un certain Ken…
La Critique de Barbie :
Il est enfin là ! Le film sur Barbie, réalisé par la surdouée du cinéma indépendant américain, à savoir Greta Gerwig (Lady Bird, Little Women). Film qu’elle a aussi co-écrit avec Noah Baumbach (Marriage Story), un autre virtuose de la plume. Un projet intriguant, flashy et donc ô combien attendu qui s’impose sans mal comme l’un des événements de l’été cinéma 2023. Mais sinon, Barbie, qu’est-ce que ça vaut ?
Pink Story
Le concept de Barbie est plutôt malin… Dans un monde parallèle, toutes les Barbie, y compris les modèles retirés de la vente, vivent en harmonie, aux côtés de tous les Ken, qui sont juste des Ken car à Barbie Land, ce sont les Barbie qui dominent. Un jour, la Barbie originelle, la plus stéréotypée de toutes, celle incarnée très justement par Margot Robbie, débarque dans le monde réel et s’aperçoit que chez nous, les femmes ne sont pas toujours traitées d’égale à égale avec les hommes…
Plutôt malin donc car avec ce postulat, Greta Gerwig peut tisser une réflexion sur la place des femmes dans la société, de manière décalée et souvent sous couvert d’un humour très second degré lui aussi. Un peu comme quand Barbie se fait vulgairement draguer par des ouvriers du chantier auxquels elle rétorque qu’elle n’a pas d’organes sexuels. Les mecs lui répondant qu’ils sont pleins de ressources et que ça n’est pas un problème. Un gag qui en fait, n’en est pas vraiment un tant le film essaye en permanence de nourrir son discours salvateur en feignant la légèreté pour imposer quelque chose de bien entendu plus grave.

Le soucis au fond, c’est qu’un tel exercice d’équilibriste est toujours compliqué et jamais Greta Gerwig ne parvient à trouver le bon dosage. Pendant presque deux heures, après une introduction réussie, la réalisatrice fait preuve d’une inconstance (relative) à laquelle elle ne nous avait pas habitués. Son intrigue s’installe tout d’abord un peu trop brutalement. Du jour au lendemain, Barbie se pose des questions. Ok mais pourquoi ? Car dans le monde réel, « son humaine » a fait d’elle une poupée torturée, afin de projeter ses propres frustrations. Encore une fois le stratagème est malin mais l’exécution pêche souvent.
La Grande aventure Barbie
Et puis il y a aussi ces deux mondes. D’un côté Barbie Land et d’un autre notre univers. Dans notre univers où certains humains, comme le boss de Mattel, incarné par Will Ferrell, connaissent l’existence de Barbie Land. Le portail entre les deux mondes est aussi étrange. Un peu comme si, au moment de gérer cette transition, les deux scénaristes n’avaient pas réussi à trouver de solution vraiment satisfaisante et avaient pris un raccourci. Du coup, le rendu est brouillon et il suffit de chausser des rollers (magiques ?) pour passer de Venice Beach au monde très « Wes Andersonien » de Barbie. Force est de reconnaître qu’à partir d’un concept similaire, La Grande Aventure Lego s’en tirait beaucoup mieux (film dans lequel était aussi Will Ferrell d’ailleurs).
Au final, Barbie le film semble hésiter en permanence. Il hésite entre l’humour second degré, l’humour meta, les références parfois un trop appuyées, un discours qui manque de finesse et une légèreté apparente. Greta Gerwig hésite même entre plusieurs styles cinématographiques, versant parfois dans le drame, avant de revenir à quelque chose de plus light avec des passages comédie musicale. Sans oublier le rythme en dents de scie qui parfois, encourage un peu l’ennui.
Life in plastic is fantastic
Trop gourmand pour son propre bien, fourmillant d’idées dont beaucoup, souvent les plus intéressantes, ne sont pas assez développées, Barbie prend l’allure d’un film militant mais son discours reste pourtant très basique et très politiquement correct. Greta Gerwig aurait gagné à y aller plus fort et son film aurait alors été moins tiède, plus tranchant, plus clivant aussi mais également plus intéressant. En l’état, seule la fin est vraiment parfaite. Une conclusion surprenante car émouvante, qui rappelle les meilleurs moments du métrage en trouvant enfin une vraie cohésion.
Après, on ne va pas se mentir. Malgré ses défauts et ses ambitions trop timorés, Barbie reste recommandable. Ne serait-ce que pour son caractère plutôt audacieux, son visuel qui sort de l’ordinaire et la performance exceptionnelle de Margot Robbie, ici secondée par un Ryan Gosling très savoureux.
Mais cette impression persiste… Celle que finalement, Barbie et Ken n’ont jamais été mieux traités au cinéma que dans la saga Toy Story…
En Bref…
Visuellement audacieux mais maladroit quand il essaye d’à la foi divertir, amuser et faire passer son message salvateur, Barbie gagne ses gallons grâce à sa tonalité originale et à la performance éblouissante de Margot Robbie. De quoi oublier le soupçon de démagogie et de manichéisme ainsi que le classicisme de l’écriture.
@ Gilles Rolland
