[Critique] COLD IN JULY
Titre original : Cold in July
Rating:
Origines : États-Unis/France
Réalisateur : Jim Mickle
Distribution : Michael C. Hall, Sam Shepard, Don Johnson, Vinessa Shaw, Wyatt Russell, Nick Damici, Brogan Hall…
Genre : Policier/Thriller/Drame/Adaptation
Date de sortie : 31 décembre 2014
Le Pitch :
1989, état du Texas : un homme sans histoires abat l’intrus qui vient de s’introduire chez lui en pleine nuit. Considéré comme un héros par les habitants de la bourgade dans laquelle il vit, ce père de famille a néanmoins du mal à retrouver la sérénité. À plus forte raison quand le père du cambrioleur vient réclamer vengeance. Une réaction en chaîne aux enjeux inattendus se met alors en place, inexorablement…
La Critique :
Cold in July fait partie de ces films qui donnent irrésistiblement envie d’être aimé. Sa promo coup de poing, son affiche brillamment tape-à-l’œil, son trailer à la fois intriguant et excitant, tout est fait pour nous mettre dans les meilleures dispositions possibles, avant de nous plonger dans l’univers du dernier Jim Mickle. Un réalisateur de plus plutôt fréquentable, responsable de l’un des meilleurs films de vampires de ces dernières années (Stake Land), mais aussi, ne l’oublions pas, du bancal We Are That We Are, également sorti chez nous en 2014.
Avec sa quatrième livraison, le cinéaste sort complètement du carcan de l’horreur pure, pour se rapprocher du polar, en profitant au passage pour nous rappeler à quel point il adore John Carpenter, et tous ces réalisateurs portés sur des ambiances marquées, travaillées et totalement immersives.
Alors oui, assurément, Cold in July donne envie d’être aimé… Mais a-t-il les épaules (oui, un film possède des épaules… métaphoriques la plupart du temps) pour tenir toutes ses promesses ? Telle est la question comme disait l’autre…
Tout commence sous les meilleurs auspices. La scène se déroule de nuit, dans une baraque comme tant d’autres. Michael C. Hall bute un mec qui s’est introduit chez lui et, y a pas à dire, le mulet de Dexter contribue à jeter une ambiance bien particulière. Précisément celle des polars des années 80, brièvement évoqués plus haut. Simultanément, cette histoire d’auto-défense rappelle aussi l’excellent A History of Violence, de David Cronenberg, si ce n’est que le personnage central ne possède pas la même virtuosité quand il s’agit de châtier son prochain, que le Viggo Mortensen badass cherchant à cacher un passé trouble. Dans Cold in July, Michael C. Hall n’est qu’un type parmi d’autres, qui encadre des tableaux et des photos pour gagner sa croûte. Son seul secret est celui de sa coupe de cheveux, même si ce genre de chose, à l’époque, était monnaie courante… tragiquement. Bref…
La première partie, dédiée au remord, à la gloire que récolte le héros malgré lui, et à la vengeance d’un père meurtri, annonce la couleur et promet effectivement un grand polar. Le problème, c’est que Cold in July est clairement scindé en deux et que par la suite, quand le récit prend une direction inattendue, la déception commence à pointer le bout de son nez crochu.
Jim Mickle a bien digéré ses influences. Tout est là pour nous rappeler à quel cinéma il fait référence. La photographie vintage, poussiéreuse et travaillée de Ryan Samul et la superbe musique crépusculaire de Jeff Grace confirmant l’identité du film, de la plus belle et sincère des façons.
Le soucis, c’est que le réalisateur n’arrive pas à tenir la distance. Quand il bascule, il ne fait pas semblant et la deuxième partie de s’enfoncer dans les sables mouvants d’un récit un peu trop invraisemblable compte tenu des enjeux. En gros, pour résumer, Mickle en fait des caisses et ne sait pas gérer le tournant crucial de l’histoire. Un virage que l’on peut aisément situer au moment où Don Johnson fait son entrée, lui qui ici, n’hésite jamais à pousser les compteurs dans le rouge (sang), tout en se montrant néanmoins (c’est paradoxal) jubilatoire, chaque fois qu’il montre sa trombine burinée de vieux cow-boy à l’écran. Résulte de ce semblant de twist bancal, une deuxième histoire, tordue et beaucoup moins passionnante que la première, prétexte à un déchaînement de violence âpre et graphique, là aussi en lien avec Carpenter et consort, mais beaucoup moins bien retranscrite par un réalisateur un poil débordé par ses intentions.
Mais relativisons car Cold in July a plus de qualités que de défauts. La mise en scène est par exemple traversée de belles fulgurances venant rappeler qu’on est en face d’un type compétent et inspiré. Le problème vient essentiellement d’un manque d’équilibre entre le premier et le second acte. Le dosage et les choix ne sont pas toujours les bons et les premiers à morfler sont les personnages, pourtant plutôt prometteurs. Sam Shepard tout particulièrement, sans que le charisme et le jeu du comédien n’en souffre pour autant. Michael C. Hall aussi, qui livre sa plus belle prestation cinématographique à ce jour, aurait mérité un personnage aux motivations un peu moins floues. Don Johnson par contre est clair dès le départ et reste constant. Il personnifie un peu le second degré mal balancé qui vient mettre le bordel, mais reste attachant.
Attachant, Cold in July l’est d’ailleurs sans l’ombre d’un doute. Entre western et pur polar, il mélange les genres, assume ses choix, y compris les mauvais, et joue finalement sur plusieurs tableaux. On a vu largement pire et quoi qu’il en soit, on reste devant une œuvre recommandable. Trop pressé de surprendre, Jim Mickle maltraite un peu un récit qui aurait gagné à rester simple et linéaire. L’émotion est amoindrie, au profit de l’esbroufe. Un défaut (trop) courant…
@ Gilles Rolland
Crédits photos : The Jokers / Le Pacte
Je m’en frotte les mains… En attente…