[CRITIQUE] COUPEZ !

CRITIQUES | 19 mai 2022 | Aucun commentaire
Coupez-poster

Rating: ★★★★☆

Origine : France

Réalisateur : Michel Hazanavicius

Distribution : Romain Duris, Bérénice Bejo, Matilda Lutz, Luàna Bajrami, Finnegan Oldfield, Grégory Gadebois, Jean-Pascal Zadi…

Genre : Comédie/Remake

Durée : 1h51

Date de sortie : 17 mai 2022 (en ouverture du Festival de Cannes, hors-compétition)

Le Pitch :

Un réalisateur de seconde zone tourne un film de zombie à petit budget dans un bâtiment désaffecté quand de véritables morts-vivants font irruption et forcent les acteurs et l’équipe technique à se battre pour sauver leur vie…

La Critique de Coupez ! :

Michel Hazanivicius est un peu passé par tous les états. Tout d’abord réalisateur de sketches à succès pour Les Nuls, il se met à la publicité puis co-écrit avec Dominique Farrugia la comédie Delphine 1, Yvan 0. Avec La Classe Américaine, le troisième volet de son Grand Détournement, Hazanavicius est considéré comme le génie de la discipline. Quelques années plus tard, les deux OSS 117 confirment son talent et prouvent qu’en plus, si le mec sait faire rire, il sait aussi filmer. The Artist le consacre. Partout. En France, aux États-Unis, partout. Le cinéma, toujours, est au centre de son œuvre pour le moins insaisissable et donc joyeusement déconcertante.

Malgré tout, difficile de le suivre par la suite. Un sketch moisi pour Les Infidèles plus tard, et le réalisateur tente de se mettre à un cinéma plus sérieux. Rien de déshonorant mais rien d’exaltant non plus. Avec Le Prince oublié, c’est presque la sortie du route… Mais rassurez-vous. Le Michel Hazanavicius du Grand Détournement, celui d’OSS, le type qui aime faire rire avec du vomi et des prouts, qui ne recule jamais devant un calembour un peu pourri mais forcément hilarant, est de retour ! Avec un remake !

France War Z

Le début de Coupez ! fait peur. Pas vraiment peur mais peur comme « mais qu’est-ce que c’est que ce truc en carton ? ». Oui on comprend que l’introduction, filmée en plan-séquence, présente le faux film que tournent les personnages, mais la blague tourne vite court. Et puis une introduction de plus de 30 minutes, ce n’est plus vraiment une introduction. Sauf que voilà… En réalité, on le comprend plus tard, ce n’est justement pas une introduction. Bref, quand même… Les acteurs jouent mal mais c’est fait exprès. Mais ils jouent vraiment comme des quiches alors on se dit qu’en fait, si ça se trouve, le mec qui nous avait fait tellement marré avec George Abitbol s’est tout simplement planté. De quoi se barrer de la salle. Sauf que non il faut rester. Car après on pige. On pige au point de trouver tout ça absolument génial.

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Zombies en carton

Ceux qui ont vu le film japonais Ne coupez pas ! seront forcément moins surpris. Et au fond c’est dommage car Coupez ! fait son possible pour ménager ses effets et dévoiler avec une parcimonie des plus savoureuses son déroulé pour le moins exaltant. Même si au fond, Hazanavicius a choisi d’intégrer cette notion de remake au scénario… de son remake. Une mise en abîme vertigineuse que ce Coupez !, qui joue sur plusieurs tableaux sans jamais toutefois se perdre. Alors non, nous n’allons pas dévoiler le pot aux roses au cas où vous n’avez pas vu l’original. Disons simplement qu’en vieux briscard du cinéma, le réalisateur a rudement bien mené sa barque.

Le jour des morts pas tout à fait vivants

Dans Coupez !, Michel Hazanavicius ne s’interdit rien ! Ni de pousser ses comédiens dans leurs derniers retranchements ni de revenir à un humour bien primaire, à base de diarrhée, vomi et vannes génialement pourraves. Tout en étant drôle c’est important de le préciser. Car il ne suffit pas de filmer un mec en train de gerber pour faire marrer. Il faut mettre en valeur le vomi et l’intégrer dans un contexte favorable. Ce que fait le cinéaste avec brio, retrouvant la verve de ses débuts, avec une fougue qui force le respect et une virtuosité qui prouve que depuis La Classe Américaine, le mec a quand même pris de la bouteille et a appris un ou deux trucs sur la manière de faire un film.

La fin justifie les moyens

Ainsi, Coupez ! est beaucoup plus maîtrisé, dans le fond et dans la forme , que prévu. De cette fameuse longue intro qui n’en pas une, tournée en vrai plan-séquence, pendant 4 jours, à cette seconde partie où les pets, les rires (nombreux) et francs et le côté résolument sale gosse n’empêche en rien l’émergence d’une vraie émotion. Et puis il faut quand même souligner le fait qu’avant tout chose, Coupez !, avec ses éléments autobiographiques, est avant tout une déclaration d’amour au cinéma. Oui cette formule est galvaudée mais là c’est particulièrement vrai. Surtout à la fin, quand tout prend son sens. Quand le casting explose, au propre comme au figuré, dans le sang et les larmes, au cours d’une ultime scène aussi réussie que pertinente.

Une scène pour laquelle, on l’imagine, Michel Hazanivicus a mis beaucoup de lui et de sa passion pour le septième-art. Son Coupez ! s’impose alors comme un projet très courageux (l’introduction à elle seule est presque suicidaire en cela qu’elle s’expose au jugement hâtif de spectateurs exaspérés et peu enclins à la patience), hilarant la plupart du temps, plus impressionnant qu’il n’y paraît, d’une précision incroyable et d’un bon goût certain. On a dit que les acteurs étaient excellents ?

En Bref…

D’un courage frôlant l’inconscience, de prime abord trop barré mais finalement parfaitement maîtrisé, Coupez ! est l’un des films les plus drôles de ces dernières années. Ce qui ne l’empêche en rien d’être émouvant quand il prend la forme d’un tribut payé aux dieux du cinéma. Ce cinéma populaire qui ici, est célébré avec respect et générosité par un réalisateur revenu à ses premières amours.

@ Gilles Rolland

Coupez-cast
Crédits photos : Wild Bunch Distribution
Par Gilles Rolland le 19 mai 2022

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