[Critique] DARK WATERS
Titre original : Dark Waters
Rating:Origine : États-Unis
Réalisateur : Todd Haynes
Distribution : Mark Ruffalo, Anne Hathaway, Bill Camp, Tim Robbins, Victor Garber, Mare Winningham, William Jackson Harper, Bill Pullman…
Genre : Drame/Adaptation
Durée : 2h08
Date de sortie : 26 février 2020
Le Pitch :
Robert Bilott, un avocat spécialisé dans la défense des grands groupes de l’industrie chimique, découvre que l’une des plus importantes sociétés américaines contamine depuis plusieurs années toute une région avec ses déchets toxiques. Ses recherches mettant rapidement en exergue le caractère beaucoup plus étendu de la contamination. Mais confronter à ses responsabilités un grand pourvoyeur d’emplois n’est pas chose aisé et Robert Bilott ne va pas tarder à lui-même se mettre en danger pour faire éclater la vérité au grand jour. Histoire vraie…
La Critique de Dark Waters :
Acteur engagé, présent sur de nombreux fronts, Mark Ruffalo porte Dark Waters depuis plusieurs mois quand il décide d’approcher Todd Haynes pour le réaliser. Le film étant basé sur un article paru dans le New York Times Magazine portant sur les pratiques malhonnêtes de plusieurs grandes sociétés coupables d’avoir empoisonné des millions des personnes, aux États-Unis mais aussi à travers le monde. Tourné relativement rapidement, dans les véritables endroits où le scandale du Téflon (vu que c’est de cela dont il s’agit) explosa, Dark Waters a aussi mis à contribution plusieurs personnes impliquées, à commencer par le véritable Robert Bilott (que joue donc Ruffalo) ou encore William Bailey, un homme atteint de malformation, dont le visage est devenu célèbre pour avoir illustré tragiquement les terribles conséquences concrètes des agissements de DuPont, l’entreprise en majeure partie responsable de la contamination.
Piège en eaux troubles
S’inscrivant dans la lignée de Spotlight (dans lequel jouait déjà Mark Ruffalo), soit dans la catégorie « film lanceur d’alerte », Dark Waters évoque de par son sujet le Erin Brockovich de Steven Soderbergh, mais se refuse pour sa part à diluer son propos dans une quelconque légèreté. Non car ici, pas de compromis. Dark Waters avance studieusement ses arguments, étaye et explique, vulgarise et commente, pour au final rendre le scandale aussi limpide et édifiant que possible. Ce qu’il réussit d’ailleurs à faire avec une remarquable sobriété. Tant au niveau de l’écriture que du casting, tous les acteurs étant parfaits, à commencer par Mark Ruffalo, mais aussi en ce qui concerne la mise en scène. Et c’est d’ailleurs forcément à ce niveau que le bas blesse un peu…
Approche brute
On ne saurait trop féliciter toutes les personnes impliquées dans ce projet d’avoir réussi à tenir leur ligne de conduite jusqu’au bout. Cela dit, on peut aussi regretter qu’un réalisateur, au style assez marqué, comme Todd Haynes, ait dû quelque-part s’effacer derrière son écrasant sujet, pour au final totalement se mettre au service de ce dernier. Oui c’est bien, mais il est aussi légitime de se demander pourquoi Mark Ruffalo n’a pas plutôt produit un documentaire à charge au lieu d’un long-métrage. Dark Waters aurait ainsi pu faire une remarquable série en plusieurs épisodes. En l’état, avec sa condition de film désireux de réduire au maximum la distance entre son traitement, son discours et ses objectifs, Dark Waters tente certes de toucher plus de monde mais s’impose aussi comme un film assez aride d’un pur point de vue cinématographique. Comme souligné plus haut, Todd Haynes fait un travail studieux mais pas vraiment flamboyant pour autant. Ce n’était ni l’endroit ni le bon moment pour se mettre en avant. Ici, c’est le scandale qui doit primer avant tout le reste. Et si les acteurs donnent leur meilleur, visiblement investis, et que le metteur en scène fait son possible, Dark Waters reste un long-métrage assez terne et parfois un peu laborieux dans sa narration. On en revient donc à tout ce que l’histoire aurait gagné en adoptant une autre approche…
En Bref…
Forcé de s’effacer derrière son sujet, Todd Haynes livre un film très sobre et incarné, mais aussi assez scolaire et cinématographiquement parlant peu stimulant, dont le principal mérite est de mettre en lumière un scandale sanitaire à l’effrayante envergure. Reste néanmoins que ce dont il parle a en effet besoin de la plus grande exposition possible. Rien que pour ça…
@ Gilles Rolland