[Critique] GODZILLA (2014)
Titre original : Godzilla
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Gareth Edwards
Distribution : Aaron Taylor-Johnson, Bryan Cranston, Elizabeth Olsen, Ken Watanabe, Sally Hawkins, Juliette Binoche, David Strathairn, Victor Rasuk…
Genre : Science-Fiction/Fantastique
Date de sortie : 14 mai 2014
Le Pitch :
Un terrible accident, que l’on croit dans un premier temps être un tremblement de terre, détruit une centrale nucléaire au Japon, tuant plusieurs personnes. Parmi les victimes se trouve la femme de Joe Brody, un scientifique américain en poste à Tokyo. Persuadé que les autorités cachent la vraie raison de cet incident, Brody persiste à faire des recherches sur l’origine de ces étranges séismes, qui selon lui, n’ont rien de naturel. Plusieurs années plus tard, une gigantesque créature semblable à un dinosaure, provoque un émoi sans précédent…
La Critique :
C’est en 1954, au Japon, que nait Godzilla, sous l’impulsion de la Toho, la fameuse société de production cinématographique nippone. À lui seul, le monstre cristallise le traumatisme encore bien présent lié au double cataclysme nucléaire de 1945, puisqu’il est lui-même en relation directe avec les essais nucléaires et la radioactivité. En 2014, le c.v. de la bête compte quelques 29 films (en comptant celui-là). Acteur majeur du cinéma japonnais et du cinéma de divertissement tout court, roi de tous les monstres et star incontournable de la culture pop, Godzilla est un monument sur lequel beaucoup de cinéastes se sont cassés les dents. Outre les nombreuses séries Z sorties entre 1954 et aujourd’hui, on se souvient bien sûr de l’inénarrable tentative de Roland Emmerich en 1998, qui s’était bel et bien vautré en proposant une version de Godzilla à la ramasse. Un film qui fit dès sa sortie office de comédie tant il se complaisait dans un bourbier de clichés grossiers, tout en proposant une réécriture bancale de la mythologie du monstre. Un navet certes divertissant, mais qui fit plus de mal que de bien à Godzilla, au point de lui fermer pour un temps les portes du Nouveau Monde, alors qu’une trilogie était dans un premier temps prévue.
Il aura donc fallu 16 ans pour que Godzilla revienne sur les écrans. Un come back concocté dans l’ombre depuis plusieurs années, suite au rachat à la Toho, des droits relatifs à la créature par Legendary Pictures et Warner Bros.
Gareth Edwards est vite rattaché au projet tandis que plusieurs grands noms planchent successivement sur le scénario (David S. Goyer, Frank Darabont…). Gareth Edwards qui apparaît instantanément comme un choix particulièrement judicieux. Monsters, son premier film ayant -à juste titre- fortement impressionné la critique et le public. Un coup de maître porté par une poésie crépusculaire, qui racontait une histoire d’amour atypique, sur fond d’apocalypse. Un long-métrage déjà habité par d’impressionnantes créatures, pourtant réalisé avec un budget minime, qui tendait à démontrer de l’habileté d’un cinéaste inspiré, inventif, et de plus virtuose dans l’utilisation des effets-spéciaux (Edwards a dans un premier temps bossé à la conception des sfx sur une série pour la BBC). En soi, l’homme de la situation pour faire entrer Godzilla dans le nouveau millénaire de la façon la plus spectaculaire et pertinente qui soit.
Pari gagné pour Gareth Edwards. Son Godzilla est un chef-d’œuvre et démontre au passage que le cinéma de monstre -un genre souvent décrié- peut aussi offrir de grands films amenés à rester dans les mémoires. En cela, Godzilla s’impose comme la nouvelle référence.
La comparaison avec Pacific Rim, de Guillermo Del Toro, qui ressuscitait lui aussi les fameux kaijus, ces monstres chers au septième-art japonnais, est à la fois inévitable et pourtant complètement hors sujet. Hors sujet car les deux œuvres n’ont pas du tout la même approche de la mythologie qu’elles partagent. Là où Pacific Rim brodait à partir d’un inconscient collectif propre au bestiaire de la série b japonaise, en offrant un spectacle « bigger than life » assumé et léger, principalement axé sur une débauche technique virtuose délicieusement régressive et jubilatoire ; Godzilla revient aux sources et adopte une tonalité beaucoup plus sérieuse et dramatique.
Le patriotisme ou encore l’héroïsme et la coolitude souvent inhérents à ce genre de films, sont ici mis en veilleuse, alors que l’humain est pourtant placé au centre d’une dynamique qui mise tout sur l’immersion totale. Bryan Cranston et Aaron Taylor-Johnson ne sont pas des super-héros sur lesquels repose la survie d’un monde aux abois. Pas plus que la multitude de soldats qui habite le long-métrage. Il ne s’agit au fond que de personnes comme les autres dont la principale préoccupation est de survivre. Bien sûr, Godzilla n’évite pas certaines figures de style. Et d’ailleurs, il ne cherche même pas à esquiver. Le genre a ses codes, ce qu’Edwards a très bien compris. Le truc qui fait la différence, c’est qu’il ne souligne pas ces codes. Il préfère les intégrer subtilement à la sauce, pour au final offrir un ensemble remarquable de cohérence.
À la manière des Dents de la Mer ou encore mieux, de King Kong, Godzilla adopte le point de vue de ses protagonistes. Le procédé, assez couillu, aurait pu être frustrant. Comme quand Godzilla se bat et que le réalisateur choisit de passer à l’autre chose pour replacer la créature au second plan. Mais au fond, on s’aperçoit vite où Edwards veut en venir et c’est rudement bien vu. La maîtrise narrative est absolue. On assiste à une montée en puissance. Godzilla n’intervient pas tout de suite. Il sait se faire désirer même si son influence se fait croissante. Ainsi, Edwards maintient une pression qui explose quand la créature s’expose.
Et quand il est là, au centre de l’écran, on ne voit plus que lui. Majestueux et véritablement impressionnant, Godzilla est probablement l’une des plus belles créatures que le cinéma nous ait offert depuis sa création. Gigantesque, il inspire le respect et la peur. Reposant sur des effets-spéciaux hallucinants, Godzilla 2014 retrouve toute sa superbe devant la caméra d’un cinéaste qui n’a de cesse de lui prouver son amour en lui conférant une vraie personnalité. Plus qu’un amas de pixels, Godzilla est un personnage à part entière. Gareth Edwards redonne sa couronne au roi des monstres en le mettant en scène au cœur de tableaux à la beauté crépusculaire. Porté par un souffle inouïe, le film enchaine les scènes d’anthologie, spécialement dans son deuxième acte. Il puisse dans nos peurs les plus primaires et propose une vision cauchemardesque d’une apocalypse aux proportions encore jamais vues.
Si il réussit alors à mettre en scène des personnages aussi solides qu’intéressants, le film sait aussi en mettre plein les mirettes. Et encore une fois, sans jamais que cela ne tourne à la démonstration de force simpliste. Edwards affiche ses influences, renoue avec le lyrisme de son précédent Monsters et sait utiliser à bon escient son budget pharaonique pour livrer un blockbuster non seulement ultra-spectaculaire, mais aussi poignant car traversé par une émotion sincère et authentique.
Que les acteurs soient ainsi remerciés, eux qui contribuent bien entendu à faire de ce Godzilla une partition profondément humaine. De Bryan Cranston, parfait d’intensité et de gravité, émouvant au possible, à Aaron Taylor-Johson, qui parvient à ne pas céder aux appels de la figure basique du sauveur de l’humanité américain, en passant par Elizabeth Olsen et Ken Watanabe, tous ont leur importance dans cette tragédie apocalyptique.
Gareth Edwards a mine de rien réussi un véritable exploit. Sans rien sacrifier de sa personnalité, il a réussi à remettre au goût du jour un authentique mythe. Plus qu’un simple trip de monstres, son Godzilla est un drame solide et une fable pénétrante sur la place de l’homme et sur son rapport à la nature. Les thématiques chères au premier film, d’ Ishirō Honda sont bel et bien là. Rien n’est sacrifié sur l’autel de l’entertainment à l’américaine. Oui, vraiment il convient de parler d’exploit. La combinaison est parfaite. Godzilla donne l’occasion de bondir sur son siège, et de verser sa petite larme. Beau à tomber à la renverse (la photographie est sublime), majestueux, enveloppé par la musique complètement à propos d’Alexandre Desplat, Godzilla tient toutes les promesses de son incroyable promo. Il va même au-delà, en resservant de belles surprises et des retournements de situations. Un vrai et grand moment de cinéma. Un film culte. Un classique instantané.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Warner Bros. France
Chef d’œuvre !
Il ne faut pas exagérer. Si Godzilla,( le monstre, pas le film) est magnifique et impressionnant c’est grâce à une certaine maîtrise visuelle de Gareth Edwards. Mais il faut attendre 1h30 et encore pour le voir vraiment nous épater. Les MUTO sont d’une laideur et souffre d’un design peu inspiré. Que dire des enjeux dramatiques ! Mise à part le début au Japon (séquence très touchante), les autres personnages ne sont pas incarnés (Ken Watanabe, Sally Hawkins..etc) et tout l’enjeu autour des tentatives de retrouvailles entre Ford (Tayor-Johnson pathétique !) et sa femme (Elisabeth Olsen) sont très mal traité, dont il ne ressort aucune émotion. Donc un film très décevant.
Comme en témoigne ma critique, je ne suis absolument pas d’accord. Cependant, je comprends ton point de vue. Perso, j’avais déjà adoré Monsters et j’espérais bien que Godzilla allait creuser dans la même direction. Ce qu’il fait. Si tu n’a pas trouvé d’intérêt dans les enjeux dramatiques inhérents aux personnages de la seconde partie, moi oui. Je trouve de plus, que d’avoir choisi de ne montrer la créature que par le biais du regard des personnages (le gamin qui regarde le premier combat à la tv, la porte qui se réferme quand Elizabeth Olsen rentre dans le métro, la scène du parachutage…) est vraiment bien vu et renforce considérablement l’immersion. Godzilla se fait certes désirer mais au final, cela confère de la puissance à ses apparitions. Pour ce qui est des Mutos, je les ai trouvé certes très “inspirés” des bestioles de Starship Troopers, mais cela ne m’a pas dérangé du tout. Ils sont menaçants, leur cris est génial et ils font le job. Je l’ai revu hier et je confirme : pour moi, c’est un chef-d’oeuvre. Un film plein de partis-pris qui ne peut que diviser, y compris au sein des amateurs de ce genre de truc.
Pacific Rim est un chef d’œuvre ! Là le film est raté (et non mauvais).
“Je trouve de plus, que d’avoir choisi de ne montrer la créature que par le biais du regard des personnages”
Ca c’est seulement sur certains plans, parce que la plupart sont des plans aériens (le tsunamis)… La mise en scène du combat entre Godzilla et les Mutos n’a strictement rien à voir avec quelque chose filmé “à hauteur d’homme”. Ce sont des plans aériens, des plans où l’on voit les 3 bestioles dans le cadre etc etc…
Strictement rien à voir avec Monsters, La Guerre des Mondes ou ces films qui restent au sol.
J’ai en effet oublier de préciser que ma remarque c’était valable que pour la première partie.
Ben même… les plans alternent du point de vue humain à un point de vue général. On est sur le ponton des bateaux, on est dans le ciel pour voir la silhouette de Godzilla…
Les scènes précises auxquelles je fais référence, qui visiblement frustrent le plus (le premier affrontement de Godzilla et du Muto coupé puis montré furtivement sur la TV, quand le fils Brody regarde, la porte du métro qui se ferme, la vue subjective lors du saut en parachute), illustrent la volonté du réalisateur d’offrir un film immersif. Bien sûr qu’il y a aussi des vues d’ensemble, c’est quasi obligatoire, sinon on fait un truc à la Cloverfield.
Ben non, il y a aussi par exemple La Guerre des Mondes de Spielberg…
Bien heureusement, il y a assez de films pour permettre de toujours trouver une exception et ainsi de toujours rebondir. Je n’ai soit dit en passant jamais dit que Godzilla était le seul à faire ce qu’il fait. J’ai adoré le film mais je ne suis pas non plus complètement stupide. J’ai sais très bien qu’il y a aussi La Guerre des Mondes, que j’ai trouvé excellent. Je ne fais qu’exposer mon avis sur Godzilla. Je souligne les choses qui m’ont paru particulièrement pertinentes. Rien de plus. Mon but n’est pas de dire si oui ou non on retrouve tel ou tel truc dans un autre film, plus ou moins réussi que celui-là. Quand on aime un film, c’est un ensemble de choses qui nous touche. Pas besoin de forcement se livrer à une énumération pour valoriser une oeuvre.
Les dialogues sont affligeants, notamment les échanges entre Ford et sa femme (j’aurais peut-être du tenter la VO)
Trop irréaliste à mon goût : des vitrines de magasin qui resistent à un tsunami ?
Et ça ne dérange que moi une déflagration nucléaire de plusieurs mega-tonnes à 20 minutes des côtes sans aucune conséquence sur les populations ?
Pour une expérience d’immersion, il faut tout de même pouvoir y croire un tout petit peu…