[Critique] L’AMOUR DURE TROIS ANS

CRITIQUES | 23 janvier 2012 | Aucun commentaire

Rating: ★☆☆☆☆

Origine : France
Réalisateur : Frédéric Beigbeder
Distribution : Gaspard Proust, Louise Bourgoin, Joey Starr, Jonathan Lambert, Frédérique Bel, Nicolas Bedos, Valérie Lemercier, Elisa Sednaoui…
Genre : Comédie romantique
Date de sortie : 18 janvier 2012

Le Pitch :
Marc vient de divorcer. Complètement anéanti, il décide de coucher son désarroi à propos de l’amour sur le papier et accouche d’un best-seller. Un livre qui sèmera rapidement la discorde au sein du couple qu’il forme avec Alice, la femme de son cousin…

La Critique :
Le succès donne visiblement des ailes. Adulé par les habitués du Café de Flore à Paris, puis par une large partie de la population grâce à ses romans plus ou moins autobiographiques, Frédéric Beigbeder est devenu chroniqueur littéraire au Grand Journal puis arbitre de critiques cinéma dans Le Cercle. Marqué par ses idoles Bret Easton Ellis et Charles Bukowski, Beigbeder est le héros de la France d’en haut. Celle qui lit dans les bistrots branchés et qui se regarde le nombril. Probablement persuadé que ses beuveries, assorties de partouzes dénuées de sentiments et saupoudrées de cocaïne l’ont directement placé dans le sillage de Bukowski, Beigbeder doit secrètement s’envisager comme le chainon manquant qui unirait la littérature d’en bas et celle d’en haut. Celle qui ferait le trait d’union entre Burroughs et Flaubert. Mais le type est plutôt sympa. Il a oublié d’être con et ses références sont bonnes. Alors pourquoi pas ?

Verdict : avec L’Amour dure trois ans (le film), Beigbeder a franchi la ligne jaune. Et pas qu’un peu !

Les médias (et tout particulièrement Canal Plus c’est étrange) se gargarisent de comparaisons ubuesques au sujet du premier film de l’écrivain turbulent. On le compare ainsi à Woody Allen. Pourtant, dans sa démarche et vu le résultat de cette démarche, Beigbeder se rapproche davantage de Stephen King. King, qui en son temps se fourvoyait honteusement avec Maximum Overdrive, adaptation ridicule (mais drôle) de l’une de ses nouvelles. Un navet reconnu comme tel par son auteur, qui jure depuis qu’on ne l’y reprendra plus. Au vu des louanges dithyrambiques réservées à Beigbeder par ses amis télévisuels, il y peu de chances que ce dernier soit aussi clairvoyant que le Maitre de l’horreur américain.

Le seule chose qui unisse le cinéma d’Allen et celui de Beigbeder est l’utilisation de l’alter-égo. Dans L’Amour dure trois ans comme dans 99 Francs (qui au passage était, en comparaison, vraiment bon), l’auteur transpose son personnage dans un réceptacle plus ou moins à son image. Comme Woody donc dans, au choix, Anything Else, Minuit à Paris et j’en passe…
Le reste est aussi éloigné du cinéma de Woody Allen que peut l’être un pigeon d’un lapin (pour reprendre une brillante séquence du film). En plus l’affiche est immonde.
Autre détail vraiment gênant : l’écriture du script. 99 Francs s’illustrait par sa verve, tonique et inspirée. L’Amour dure trois ans se caractérise quant à lui par la platitude extrême de ses vannes et par la tiédeur de son propos.
Peut-être est-ce dû aux acteurs. Autant accorder le bénéfice du doute à Beigbeder l’écrivain et juger Beigbeder le réalisateur. Quel idée d’avoir offert le premier rôle au débutant Gaspard Proust. Si visuellement, le “comédien” fait illusion, le château de carte s’effondre dès qu’il ouvre la bouche. La facilité avec laquelle il fusille la quasi-intégralité de ses scènes force l’admiration. Et des scènes, il en a beaucoup.
A ses côtés, il serait dommage d’en rajouter une couche sur Joey Starr qui est censé réserver LE grand coup de théâtre final, alors que la chose est éventée depuis longtemps. Mais Starr sort la tête de l’eau c’est déjà ça car on ne peut pas en dire autant de Frédérique Bel pourtant si drôle dans La Minute Blonde. Ici, elle est juste insupportable. Jonathan Lambert se contente d’être présent et le duo de vétérans Bernard Menez et Anny Duperey s’amuse en se disant qu’un film quel qu’il soit est préférable aux séries estampillées TF1. Reste Louise Bourgoin. Oui elle illumine l’écran mais non ça ne suffit pas. Surtout si on prend en compte l’alignement des potes de toujours, de Nicolas Rey à Jules-Edouard Moustic, en passant par l’équipe de Denisot.

L’Amour dure trois ans est donc assez pénible. Le film est à l’image de son héros et irrite souvent, surtout quand il finit par renoncer à son cynisme pour ressembler à n’importe quel bluette fadasse de seconde partie de soirée.
Je souhaiterais néanmoins conclure sur une touche positive. Car tout n’est pas à jeter dans L’Amour dure trois ans. Non, car l’introduction est parfaite. Elle laisse même présager le meilleur. On y voit Bukowski parler d’amour. A sa façon. Ça dure 1 minute et des poussières. Autant dire, vu le titre qu’on est loin du compte…

@ Gilles Rolland

 

Louise et Gaspard

Par Gilles Rolland le 23 janvier 2012

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