[Critique] LAST DAYS OF SUMMER

CRITIQUES | 4 mai 2014 | 2 commentaires
Last-Days-of-Summer-Affiche-France

Titre original : Labor Day

Rating: ★★★½☆
Origine : États-Unis
Réalisateur : Jason Reitman
Distribution : Kate Winslet, Josh Brolin, Gattlin Griffith, Tobey Maguire, James Van Der Beek, Clark Gregg, J.K. Simmons, Brooke Smith, Tom Lipinski…
Genre : Drame/Romance/Adaptation
Date de sortie : 30 avril 2013

Le Pitch :
Dans les années 80, alors que les vacances d’été touchent à leur fin, Frank, un détenu évadé, oblige Adèle et son fils à le cacher dans leur maison. Dévastée depuis son divorce, vivant seule avec son jeune garçon, en évitant soigneusement tout contact extérieur, Adèle est d’un prime abord choquée par cette intrusion. Peu à peu néanmoins, elle se laisse amadouer par les manières d’un homme prévenant, qui n’a rien à voir avec l’image que les médias en donnent…

La Critique :
Depuis son premier long-métrage, à savoir le très bon Thank You for Smoking, en 2005, le réalisateur Jason Reitman (fils d’Ivan Reitman) est réglé comme une horloge suisse. Tous les deux ans, il revient avec un nouveau film. Thank You for Smoking donc, puis Juno, In The Air, Young Adult et ce Last Days of Summer. Des films qui dénotent d’une évolution permanente pour un cinéaste néanmoins discret car toujours tourné vers des histoires en apparence simples, car avant tout ancrées dans une réalité palpable. En équilibre permanent entre le drame et la comédie, Reitman avait pour le moment toujours veillé à conférer à ses œuvres une certaine légèreté, à grand renfort d’une écriture vive, jamais complaisante, quand bien même ses films abordaient des thèmes difficiles.

En cela, Last Days of Summer marque un tournant dans la carrière de Jason Reitman. Ici, pas d’humour ou très peu. Une douce et lancinante mélancolie s’installe, comme pour faire écho aux températures caniculaires qui acculent des personnages à la dérive. Adaptation d’un roman de Joyce Maynard, Last Days of Summer dresse un portrait de femme touchant. Le réalisateur/scénariste choisit à nouveau de centrer son regard sur un personnage féminin, même si la Adèle de Kate Winslet reste assez éloignée des rôles de Charlize Theron et d’Ellen Page, dans Young Adult et Juno. Une chose reste pour autant commune à ces profils : la détresse. L’impression de partir à la dérive sans pouvoir y faire quoi que ce soit. Young Adult traitait de l’incapacité d’une ancienne reine de bal d’évoluer et de couper les ponts avec son glorieux passé, tandis que Juno voyait une jeune fille forcée de faire face à une grossesse non désirée. Dans Last Days of Summer, Kate Winslet illustre le déluge de sentiments nocifs qui peuvent survenir après un divorce. Abandonnée par son mari, seule avec son fils, elle reste cloitrée et refuse d’affronter le monde extérieur. Sa coquille, à savoir sa maison, tombe en décrépitude, comme pour illustrer les difficultés croissantes de la jeune femme à faire face à son existence. C’est là qu’intervient Josh Brolin, le taulard au grand cœur et au passé trouble. Il y a toujours chez Reitman cette deuxième personne. Ce protagoniste qui sauve ou qui fait office de miroir. Dans In the Air, George Clooney trouvait chez Vera Farmiga de quoi bousculer ses certitudes. Ici, Brolin comble un vide, tout en ayant lui aussi un trou au beau milieu du cœur. La mélancolie subit alors une transformation. Le film respire au fur et à mesure que la joie et l’amour font leur œuvre sur le visage fatigué de Kate Winslet.

Difficile de ne pas penser à Sur la Route de Madison. À l’instar de Clint Eastwood, Jason Reitman met en scène une rencontre fragile, entre deux personnes qui ont à la fois tout à y gagner et tout à y perdre. L’amour est célébré de la plus pure des façons car il trouve sa source dans un lâcher prise propre à une immédiateté troublante. Et si on pense en effet à Eastwood, jamais le film de Reitman ne s’en rapproche trop. Il suit sa propre voie.
Surprenant dans sa construction à tiroirs, empruntant quelques codes au thriller, le long-métrage arrive à faire monter une pression pénétrante jusqu’au dénouement, sans trop tirer sur la corde. Parfois maladroit dans sa narration et dans la façon dont il dépeint le début de cette romance, Reitman n’a par contre de leçon à recevoir de personne quand il s’agit de capter ces petits riens qui donnent à la vie tout son sel. Entre une mère et son fils et entre une homme et une femme. Son histoire d’amour laisse alors la place à une seconde trame, qui se déroule en filigrane. Une sorte de conte initiatique porté par le remarquable Gattlin Griffith.

Marqué par une mise en scène fluide et par un montage qui sait aussi se faire inventif, Last Days of Summer arrive à transmettre au spectateur ce sentiment d’urgence qui le caractérise. Il s’avère de plus très immersif et s’apparente en cela à une belle parenthèse émouvante. Kate Winslet confirme qu’elle n’a pas son pareil pour camper des personnages complexes car à la fois forts et fragiles, tandis qu’en face, Josh Brolin, remarquable de sobriété, trouve son meilleur rôle depuis True Grit. Ensemble, les deux comédiens font des merveilles, y-compris quand le scénario trébuche, comme lors de l’épilogue, un poil trop bancal pour convaincre pleinement. Dommage que Reitman n’ait pas su conserver cette patine plutôt contemplative, et se soit un peu emballé, comme pressé par le temps. Maladroit à certains moments clés, son long-métrage est globalement méritant, comme en témoigne par exemple cette superbe séquence qui voit les trois personnages confectionner une tarte (bon, dis comme ça c’est bizarre, mais vous verrez…). Comme à son habitude, Reitman ne cherche pas l’originalité mais l’authenticité. En basculant du côté du drame, il fait preuve d’une maitrise parfois fragile mais bien réelle. Enveloppé par la bande-originale prégnante de Rolfe Kent, le film laisse son empreinte longtemps après la projection. On se souvient de ces regards échangés, de ces non-dits et de cet espoir omniprésent…

@ Gilles Rolland

Last-days-of-summer-labord-day-castCrédits photos : Paramount Pictures France

 

Par Gilles Rolland le 4 mai 2014

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paulus
paulus
9 années il y a

bon commnentaire et bonne analyse gilles comme tj bravo