[Critique] MANY SAINTS OF NEWARK : UNE HISTOIRE DES SOPRANO

CRITIQUES | 8 novembre 2021 | Aucun commentaire
Many-saints-of-Newark-poster

Titre original : The Many Saints of Newark

Rating: ★★★★☆

Origine : États-Unis

Réalisateur : Alan Taylor

Distribution : Alessandro Nivola, Leslie Odom Jr., Michael Gandolfini, Vera Farmiga, Jon Bernthal, Corey Stoll, Ray Liotta, Billy Magnussen, Michela De Rossi…

Genre : Thriller/Drame

Durée : 2h

Date de sortie : 3 novembre 2021

Le Pitch :

Newark, 1967. Richard « Dickie » Moltisanti, l’un des membres les plus importants de la famille mafieuse DiMeo, tente de maintenir les affaires à flot dans un contexte compliqué. Alors que la ville brûle suite à des émeutes, le jeune Tony Soprano ne sait pas trop quoi penser des agissements de ses aînés et plus particulièrement du comportement de plus en plus erratique de son oncle Dickie, qu’il admire depuis toujours. Pris entre une mère caractérielle et un père trop souvent absent, Tony a bien du mal à entrevoir son avenir avec sérénité et sait qu’il devra un jour faire le choix de suivre sa propre route ou d’embrasser celle que sa famille a tracé pour lui…

La Critique de Many Saints of Newark – Une histoire des Soprano :

10 juin 2007 : l’ultime épisode de la série culte Les Soprano est diffusé sur HBO. Une fin pour le moins énigmatique, rythmée par les riffs du morceau Don’t Stop Believin’ de Journey, qui fera parler les fans pendant plusieurs années. Bien sûr, il fut depuis régulièrement question de ramener les mafieux sur le devant de la scène mais le showrunner du show, David Chase, s’y est pourtant toujours refusé. Une décision que le décès prématuré de James Gandolfini, l’interprète du légendaire Tony Soprano, en juin 2013, n’a fait qu’entériner.

Pourtant, l’idée a fait son chemin et il fut annoncé un jour que la famille DiMeo allait bel et bien revenir. Pas à la télévision via une nouvelle série mais au cinéma. Et c’est ainsi que David Chase s’est remis au boulot pour développer l’histoire de Dickie Moltisanti, le père de Christopher, l’un des personnages centraux des Soprano, à une époque où Tony Soprano n’était qu’un enfant.

Préquelle mafieuse

Many Saints of Newark commence dans un cimetière. La voix de Michael Imperioli, l’interprète de Christopher Moltisanti, remet le film dans son contexte en nous expliquant que cette nouvelle aventure se déroule dans le passé, à une époque où son père, que l’on surnommait Dickie, tenait un grand rôle dans l’organisation mafieuse la plus puissante de Newark, dans le New Jersey. Une époque où comme il le dit, Tony Soprano était encore trop jeune pour participer d’une quelconque façon aux agissements de son futur clan.

L’annonce de ce projet ambitieux a encouragé quelques doutes. Y compris de la part des fans des Soprano. Fallait-il vraiment tenter le coup ? Parfaite en soi, la série ne se suffisait-elle pas à elle-même ? La réponse est oui bien sûr. Pour autant, le concept restait enthousiasmant et après tout, David Chase avait toutes les cartes en main pour nous offrir un nouveau classique du genre. Ce que Many Saints of Newark n’est pas. Autant être clair tout de suite. Oui le film est bon mais non il ne parvient pas à égaler la puissance de la série ni celle des mètres-étalons du cinéma mafieux que sont Le Parrain, Les Affranchis ou encore Casino. Many Saints of Newark qui n’est en plus certainement pas en mesure de résonner avec la même force auprès de ceux qui ont vu et apprécié Les Soprano qu’auprès de ceux qui n’ont jamais vu un épisode. Et au fond, c’est un peu tout le problème.

Many-Saints-of-Newark-cast

Anciens Affranchis

Finalement, et ce n’est pas en soi une mauvaise chose, Many Saints of Newark évoque un peu El Camino, le film qui a suivi la conclusion de Breaking Bad. Jamais David Chase ne parvient vraiment à se sortir de l’ombre de sa série et donc à s’en détacher suffisamment pour faire de son long-métrage une œuvre à part. Tout ici évoque la grandeur du show mais les enjeux restent moindres.

Avant toute chose, le film a été pensé pour les fans. Axé sur Dickie Moltisanti, ici campé avec beaucoup de talent par Alessandro Nivola, le métrage laisse également beaucoup de place aux versions jeunes des héros des Soprano que l’on remarque paradoxalement davantage. Tony Soprano tout d’abord, forcément, magnifiquement interprété par Michael, le fils de James Gandolfini. Le jeune comédien livre une performance très émouvante car totalement respectueuse de la partition jadis jouée par son père, avec une déférence, un respect et un sens de la nuance troublants. C’est bien simple : parfois, on croirait voir James Gandolfini. Pour autant, les autres s’en sortent aussi très bien, que ce soit Corey Stoll, superbe Oncle Junior, Vera Farmiga, excellente Silvia Soprano ou encore Billy Magnussen, hilarant en Paulie Gualtieri.

Il était une fois à Newark

Tardive mais ambitieuse introduction à une série qui a, à elle seule, redéfini les contours de la création télévisuelle, Many Saints of Newark n’est malheureusement « que ça » : une tardive mais ambitieuse introduction. Mais encore une fois, la maîtrise est bien là. Superbement filmé, magnifiquement photographié, le film parvient également à ancrer la saga des DiMeo dans l’histoire de Newark, en abordant les émeutes raciales qui ont secoué la ville à la fin des années 1960. À n’en pas douter, ce choix narratif ajoute de l’épaisseur au film qui possède ainsi une vraie dimension politique. Mais sur une durée aussi réduite, 2 heures à peine, cela contribue également à diluer la force de la trame principale.

Ambitieux mais un peu maladroit, le film offre une poignée de scènes véritablement réussies. Aux commandes, Alan Taylor, après avoir été échaudé par Marvel (il a réalisé avec Thor 2 l’un des pires volets du MCU), retrouve sa maestria. La direction d’acteurs est millimétrée et les performances toutes notables. Portée par des acteurs formidables, avec notamment l’impérial Ray Liotta (qui à l’époque, avait refusé d’apparaître dans Les Soprano), cette chronique mafieuse ne possède pas le souffle des Soprano mais reste intéressante, passionnante parfois, sincère et généreuse. Et puis l’émotion est là c’est indéniable. Ne serait-ce qu’à la toute fin, quand David Chase et Alan Taylor connectent leur film à la série, avec une pertinence qui force le respect.

En Bref…

Si Many Saints of Newark ne parvient pas à égaler la puissance de la série et ne s’impose pas, en tant que tel, comme un challenger sérieux face aux références du genre, il n’en reste pas moins réussi. En premier lieu adressé aux fans des Soprano, ce film ne manque ni d’audace ni de maîtrise. Porté par des comédiens excellents, superbement réalisé mais paradoxalement trop dense et même peut-être un peu trop confortable, Many Saints of Newark est avant tout une superbe introduction à l’un des plus grands shows TV de l’histoire. Et s’il peine à exister pleinement par lui-même, il réussit néanmoins l’essentiel : ne pas trahir l’esprit des Soprano et offrir à ses personnages une jeunesse parfaitement cohérente.

@ Gilles Rolland

many-saints-of-newark-5
Crédits photos : Warner Bros.
Par Gilles Rolland le 8 novembre 2021

Déposer un commentaire

S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires