[Critique] NEMESIS
Titre original : Sam Was Here
Rating:
Origine : France/États-Unis
Réalisateur : Christophe Deroo
Distribution : Rusty Joiner, Sigrid La Chapelle, Rhoda Pell…
Genre : Horreur/Thriller
Date de sortie : 30 mars 2017 (DTV)
Le Pitch :
Sam, un représentant de commerce, est envoyé dans une région désertique de la Californie pour faire du porte-à-porte. Le problème, c’est qu’il n’y a personne. Tous les habitants semblent avoir disparu en laissant toutes leurs affaires. Seule la radio diffuse une émission de libre-antenne, par ailleurs assez étrange. Quand Sam reçoit sur son bipeur des messages haineux et que d’inquiétants individus masqués commencent à s’en prendre à lui, un terrifiant piège se referme…
La Critique de Nemesis :
Il était une fois un homme coincé dans le désert. Le soleil, la chaleur et la solitude pesant sur lui comme autant de menaces à sa survie. Produit pour trois fois rien, piloté par un réalisateur relativement inconnu au bataillon et porté par un seul acteur, Nemesis a pour lui de nombreuses qualités, formelles tout d’abord, mais peine parfois à incarner son inquiétant propos. Plongée dans une horreur des plus arides…
Desert Trip
Nemesis repose sur un concept qui rappelle très rapidement Les Contes de la Crypte ou La Quatrième Dimension. L’univers dans lequel évolue le protagoniste principal est limité. Il n’est pas dans une pièce fermée mais c’est finalement du pareil au même tant le désert semble se refermer sur lui dès lors qu’il s’aperçoit qu’il est seul (ou presque) et que brille dans le ciel une mystérieuse lumière rouge. Nébuleuse, l’histoire du film le devient de plus en plus au fil des minutes et on sent clairement que le réalisateur/scénariste Christophe Deroo ne veut pas trop en dire, préférant laisser aux spectateurs le soin de se saisir des indices qu’il parsème pour bâtir des théories. Quand d’autres personnages font enfin leur apparition, Nemesis revêt les apparats du pur film d’horreur et embrasse totalement une identité façonnée par de la violence brute et par un propos toujours aussi mystérieux mais aussi bizarrement terre-à-terre. En d’autres termes, on se retrouve face à un type qui devient la cible de tueurs masqués. Un homme forcé de se défendre, mais qui ne sait pas pour autant pourquoi on veut le tuer ni qui sont vraiment ces personnages animés des pires intentions.
Sous le soleil de midi
Franchement superbe quand il multiplie les plans ambitieux, traduisant la grandeur de son environnement et toute la menace qu’il incarne petit à petit, Nemesis démontre de la capacité de son metteur en scène à contourner les restrictions budgétaires. Car si il n’a manifestement pas pu compter sur un gros paquet de dollars pour faire son film, Christophe Deroo a su se débrouiller pour nous gratifier d’une photographie relativement léchée mais également multiplier les effets de style aussi pertinents que parfaitement exécutés. Si il s’agit bien d’une petite série B fauchée sur le papier, Nemesis ne ressemble pas à n’importe quel DTV de genre sorti d’on ne sait où. Il possède une certaine prestance, à l’image de Rusty Joiner son charismatique interprète, qui joue très bien et qui impressionne lui aussi notamment grâce à un physique taillé dans la pierre, qui confère à ses actes et à sa façon d’exprimer la peur et l’incompréhension, une teneur pour le moins inattendue.
Cela dit, il y a clairement un soucis au niveau de la rythmique. On comprend pourquoi le récit met du temps à s’installer, mais au bout d’un moment, force est de reconnaître qu’il tourne un peu en rond. Le scénario ne donne pas assez au spectateur pour que celui-ci s’attache véritablement à essayer de comprendre et c’est donc après un petit ventre mou, quand le premier assaillant fait son apparition, que le long-métrage peut enfin redémarrer pour entamer la longue descente aux enfers du « héros » au cœur du sujet.
Pour autant, la suite est aussi touchée par cette volonté de ne pas totalement embrasser des codes qui sont par ailleurs au centre de la dynamique. Christophe Deroo veut épaissir son propos et même si il fait preuve d’une constante bonne volonté, la fin de son film, beaucoup trop nébuleuse, prend un peu des airs opportunistes. Entre trip paranoïaque, métaphore sur l’inexorabilité de l’existence et chasse à l’homme très premier degré et bien sauvage, Nemesis ne choisit jamais vraiment. Du coup, difficile de ne pas se dire que malgré sa mise en image ambitieuse et ses évidentes et parfois flamboyantes qualités, ce film ne cesse jamais vraiment de ressembler à un long épisode de La Quatrième Dimension.
En Bref…
Ambitieux et visuellement maîtrisé, Nemesis impressionne mais en fait aussi un peu trop, quand il cherche à absolument à nous prendre à revers, quand une approche plus frontale aurait été plus pertinente. Pour autant, voilà un petit film d’horreur relativement bien troussé, qui sait maintenir en haleine et faire preuve d’une bravoure qui lui permet d’outrepasser les limites imposées par son petit budget.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Condor Entertainment