[CRITIQUE] PREY

CRITIQUES | 5 août 2022 | Aucun commentaire
prey-poster

Titre original : Prey

Rating: ★★★★½

Origine : États-Unis

Réalisateur : Dan Trachtenberg

Distribution : Amber Midthunder, Dakota Beavers, Stormee Kipp, Michelle Thrush, Julian Black Antelope, Dane DiLiegro…

Genre : Fantastique/Horreur/Saga

Durée : 1h39

Date de sortie : 5 août 2022 (Disney +)

Le Pitch :

En 1719, au cœur des hautes plaines, une tribu Comanche se heurte à un prédateur d’un nouveau genre. Alors que les chasseurs se font décimer les uns après les autres, la jeune Naru décide de traquer le monstre…

La Critique de Prey :

Classique absolu, Predator, de John McTiernan, a donné lieu à plusieurs suites. Logique. À Hollywood, quand un film cartonne, on lui offre quasi-systématiquement au moins une suite, pour le meilleur ou pour le pire. Stephen Hopkins, l’homme à la tête de Predator 2 s’est néanmoins montré à la hauteur. Moins impressionnant que son modèle, son film a au moins le mérite de s’en détacher, en situant notamment l’intrigue en milieu urbain. Par la suite, les choses sont méchamment parties en vrille et nous avons eu droit à deux Aliens vs. Predator complètement foirés, à un Predators certes amusant mais beaucoup trop léger et bancal pour convaincre et à un The Predator ultra décevant car à la fois brouillon et stupide, pourtant écrit et réalisé par Shane Black, qui jouait l’un des mercenaires dans le premier.

Autant dire que si une franchise encourage la méfiance, c’est bien celle-là. Quand le projet Prey fut annoncé, nous n’avions donc aucune bonne raison d’en attendre quoi que ce soit. Et pourtant… Enfin visible, sur Disney +, et non au cinéma, malheureusement, ce préquel, dont l’action se situe en 1719, s’impose avec fracas et parvient à renouer avec la verve sauvage et sans concession de l’œuvre matricielle. Mais rentrons un peu dans le détail…

Prey-Amber-Midthunder

Une autre paire de (co)manches

Déjà aux commandes de l’excellent 10 Cloverfield Lane, Dan Trachtenberg a d’emblée l’intelligence de renouer avec le même genre de cadre que Predator, à savoir la nature. Loin des autres volets, le réalisateur/scénariste a aussi tenu à ramener le chasseur venu de l’espace à une autre époque, à savoir celle de Comanches. Loin de se révéler accessoire, cette nouvelle localisation, à la fois géographique et temporelle, apporte beaucoup à Prey, tout en prenant la forme d’une note d’intention. Ici, pas de stars, pas de punchlines opportunistes, et pas d’humour. Prey se « contente » intelligemment de se concentrer sur la traque. Une traque pure et dure en milieu hostile, comme au bon vieux temps.

La femme des hautes plaines

La simplicité est souvent la clé de l’efficacité. Surtout dans le cadre d’un film comme Prey. Dan Trachtenberg l’a parfaitement compris, comme John McTiernan en son temps. Sur le même modèle, en faisant aussi logiquement lui aussi du pied aux Chasses du comte Zaroff, d’Ernest B. Schoedsack, le cinéaste exploite magnifiquement son cadre, ses superbes paysages à la fois poétiques et intimidants, et la condition de son héroïne, une jeune femme avide de faire ses preuves en tant que chasseuse au sein de sa tribu. Un personnage central bien loin du Dutch de Predator que Trachtenberg met en valeur, afin de bien se distinguer de son aîné et de ses mercenaires bodybuildés transpirant la testostérone. Porté par la performance viscérale de la révélation Amber Midthunder, Prey va donc à l’essentiel et renoue avec la moelle substantielle d’une saga qui avait désespérément besoin de cette simplicité retrouvée, pour le meilleur.

No bullshit

En suivant une trame simple, Prey nourrit donc son propos et confère à cet affrontement a priori inégal (un monstre hyper baraqué et sur-armé de plus de 2 mètres contre une frêle jeune fille) une vraie dimension mythologique. S’il a aussi la pertinence de ne pas renier son modèle, auquel il fait directement référence une seule fois, brillamment, sans jouer sur le fan service ni s’appuyer sur des ressorts attendus et éculés, Prey parvient à imposer sa propre tonalité. Oui, il s’agit bien d’un film Predator mais non, ce n’est pas un copier/coller avec des Amérindiens. Prey qui arrive également à disserter sur la condition du peuple Comanche ici à la fois chassé par un alien pour le moins brutal mais aussi persécuté par les colonisateurs blancs, à une époque située quelques décennies avant le début de ce que l’Histoire a appelé les guerres indiennes.

Brillante métaphore, Prey gagne donc sur tous les fronts grâce à son honnêteté, son intelligence et sa générosité. Parce qu’autant dire que le spectacle est au rendez-vous.

Gueule de porte-bonheur

Non content d’avoir co-signé un script admirable à bien des niveaux, Dan Trachtenberg fait les choses en grand à adaptant sa mise en scène au caractère viscéral et sans pitié de la traque au cœur du récit. En faisant monter la pression, bénéficiant d’une photographie incroyable, il ponctue son film d’affrontements parfaitement lisibles et sauvages, sans lésiner sur le sang et les exécutions sommaires. Riche en morceaux de bravoure, comme le combat contre l’ours et bien sûr la fin, dénué d’effets « tendance » afin de ne pas parasiter sa démarche pleine de sens, Prey réussit là où tous les films Predator ont échoué depuis le deuxième volet. Au point où il est légitime de le considérer comme le meilleur épisode après le premier, dont il est d’ailleurs le plus digne héritier.

En Bref…

En ramenant le récit de cette chasse à l’homme au cœur des hautes plaines à sa plus simple et brutale expression, Dan Trachtenberg a réussi l’impensable. Son Prey est non seulement tendu, violent et passionnant, mais aussi très intelligent quand il exploite son postulat pour disserter sur la condition des peuples Amérindiens dans une Amérique en plein bouleversement. Qui aurait cru que le cinquième volet de la saga Predator s’imposerait avec bravoure comme le film de l’été 2022 ? Une réussite flamboyante qui fait regretter encore plus amèrement que le métrage n’ait pas eu droit à une sortie en salle.

@ Gilles Rolland

Prey-Predator-Prequel
Crédits photos : 20th Century Fox/Hulu
Par Gilles Rolland le 5 août 2022

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