[Critique] RICKI AND THE FLASH
Titre original : Ricki and The Flash
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Jonathan Demme
Distribution : Meryl Streep, Mamie Gummer, Kevin Kline, Rick Springfield, Sebastian Stan, Ben Platt, Charlotte Rae…
Genre : Drame/Comédie
Date de sortie : 2 septembre 2015
Le Pitch :
Il y a de nombreuses années, Ricki a tenté de réalisé son rêve, en partant en Californie, faire de la musique avec son groupe, The Flash, laissant de côté son mari et ses trois enfants. Un beau jour, son ex-mari lui téléphone pour lui demander de revenir au bercail réconforter sa fille, qui vient de vivre un divorce très douloureux. L’occasion pour Ricki de renouer avec les siens, mais surtout de voir par elle-même les dégâts occasionnés par son départ et de prendre conscience des trop nombreuses choses qu’elle a raté…
La Critique :
Il est coutume de dire que Meryl Streep peut tout jouer. Sa filmographie, impressionnante, et la longue liste des trophées qu’elle a reçu depuis ses débuts (sans compter les nominations aux Oscars, Golden Globes et autres) allant en effet dans ce sens. Meryl Streep est une grande, c’est indéniable. Si elle avait voulu, elle aurait probablement pu jouer avec talent Nelson Mandela dans le récent biopic avec Idris Elba ou encore poutrer du badguy aux côtés de Stallone dans les Expendables. Meryl Streep peut tout faire et a presque tout fait. Ceci dit, la retrouver dans les fringues d’une rock star sur le retour, Fender Telecaster à l’appui, arrivait quand même à susciter quelques craintes. Dans Ricki and The Flash, la comédienne chante, joue de la gratte, se déhanche comme Joan Jett et arbore un gros tatouage dans le dos. Comme à son habitude, elle n’a pas lésiné. Restait à savoir si le tableau allait être convainquant dans sa globalité. Si le fait de voir celle qui récemment incarné Margaret Thatcher allait pouvoir illustrer une certaine idée du rock and roll, sur scène, qui plus est aux côtés d’une vrai rock star, à savoir Rick Springfield.
Sur les planches, quand le groupe Ricki and The Flash commence à jouer, on s’aperçoit vite que Meryl Streep joue elle-même de sa guitare. C’est aussi elle qui chante. Tout le monde joue live et même si les titres choisis (que des reprises) déconcertent parfois un peu (pourquoi Lady Gaga?), ça envoie comme il se doit. Une période d’adaptation est néanmoins nécessaire pour accepter la composition de Meryl Streep, même si l’actrice s’arrange, avec tout le talent qui caractérise l’intégralité de sa démarche artistique, pour emporter le morceau, à grand renfort d’un charisme spectaculaire et d’un engagement total. Bien sûr, elle est formidable. Même si on était presque parti pour assister à la performance de trop, elle nous joue encore un de ses tours dont elle a le secret et elle est géniale. Surtout qu’ici, elle est véritablement bien entourée. Par sa fille tout d’abord, Mamie Gummer, avec laquelle elle entretient en toute logique une alchimie qui profite vraiment au long-métrage. Ensemble, les deux actrices crèvent l’écran. Rick Springfield quant à lui, est étonnant. Dans son milieu naturel, sur scène, il communique une émotion palpable à laquelle il est difficile de résister. Kevin Kline quant à lui, fait regretter sa rareté sur les écrans ces dernières années, comme à chacune de ses apparitions récentes.
On s’en doute, le film repose en grande partie sur les épaules oscarisées de Meryl Streep, et si le doute persiste durant les premières minutes, principalement à cause d’un script qui ne semble annoncer aucune surprise vraiment excitante, là aussi, l’émotion et l’alchimie entre les comédiens, finissent par balayer les doutes, et encouragent une immersion permettant d’apprécier à sa juste valeur une histoire certes balisée, mais pour autant rondement menée. Écrit par Diablo Cody, l’ex-enfant chérie d’Hollywood ayant explosé avec son premier script, Juno, puis nettement moins encensée par la suite, avec Jennifer’s Body ou encore le pourtant excellent Young Adult et le furieux remake d’Evil Dead, le film adopte une posture assez académique, si ce n’est qu’il s’amuse à dynamiter quelques codes de la comédie dramatique américaine typique, notamment via Rikki, la rockeuse, mère démissionnaire et républicaine convaincue, en quête de rédemption sans vraiment le savoir ni le vouloir. Parfois, le scénario du long-métrage semble vraiment trop balisé et à d’autres occasions, sa volonté de sortir des clous pour façonner un genre éculé à son image apparaît clairement. Ce qui lui donne au final des airs de rendez-vous à moitié-manqué, plein de bonnes intentions mais trop limité dans sa portée pour vraiment toucher au vif.
C’est d’ailleurs un peu la même chose avec Jonathan Demme, le réalisateur aux commandes, connu pour avoir emballé en son temps Le Silence des Agneaux ou Philadelphia. Ici nettement plus effacé, il s’appuie sur des mécanismes bien huilés et ne faillit pas, même si sa mise en scène paraît un peu trop impersonnelle, face au monstre de charisme qu’est Meryl Streep. Comme si il n’avait pas osé trop s’affirmer, histoire de ne pas faire de l’ombre au numéro de son actrice star… Dommage, mais au fond, quand on voit le produit fini, sa démarche peut d’une certaine façon se comprendre… et s’apprécier.
Suivant une autoroute que d’autres ont largement arpentée en long, en large et en travers avant lui, Ricki and The Flash arrive de temps en temps à faire quelques embardées bienvenues et à marquer les esprits. Il sait ce qu’il est et ne cherche pas spécialement à se sublimer, tablant sur une histoire simple mais solide et sur des acteurs vraiment balèzes. Ce sont eux qui raflent la mise, tirant l’histoire de cette mère larguée, à la poursuite d’une famille dysfonctionnelle, vers le haut, jusqu’au final, émouvant au possible, dont l’intensité permet au film de s’achever sur une réelle bonne impression. Et puis, de toute façon, voir Meryl Streep jouer et chanter du Springsteen avec Rick Springfield devant une foule déchaînée, vaut largement le prix d’une place de cinéma.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Sony Pictures Releasing France