[CRITIQUE] TETRIS
Titre original : Tetris
Rating:
Origine : États-Unis/Royaume-Uni
Réalisateur : Jon S. Baird
Distribution : Taron Edgerton, Toby Jones, Nikita Efremov, Sofia Lebedeva, Roger Allam, Anthony Boyle, Ben Miles, Togo Igawa…
Genre : Drame
Durée : 1h58
Date de sortie : 31 mars 2023 (Apple TV+)
Le Pitch :
En 1988, Henk Rogers, un promoteur et développeur de jeux vidéos découvre pour la première fois, par hasard, le jeu Tetris, lors d’un salon professionnel. Totalement séduit, il se met alors en tête d’acheter les droits pour ensuite le commercialiser dans le monde, sur les ordinateurs, les consoles de salon mais aussi les salles d’arcade. Malheureusement pour lui, la licence est protégée par le gouvernement du pays où le jeu a vu le jour, à savoir l’URSS. En pleine guerre froide, Henk Rogers va devoir traverser le rideau de fer pour espérer arriver à ses fins. Histoire vraie…
La Critique de Tetris :
Un film sur Tetris ? Et puis quoi encore ? Il faut dire que ces dernières années, l’industrie cinématographique a franchi de nombreuses limites, démontrant son opportunisme de plus en plus galopant. L’annonce du projet ayant ainsi suscité de nombreuses moqueries. Pour autant, pour une fois, c’est différent car il suffit de prendre connaissance de la genèse du jeu Tetris pour se convaincre que l’idée de porter cette histoire à l’écran n’était en fait pas du tout saugrenue, bien au contraire.
Non-adaptation
Alors non, Tetris, le film, ne raconte donc pas l’histoire d’une brique de couleur amenée à former une ligne avec d’autres briques de couleur pour sauver le monde ou un truc du genre. Non, Tetris, le film narre l’histoire d’un promoteur de jeux vidéo investi dans une quête qui va lui faire courir de nombreux risques. Cette quête consistant à acheter aux Russes les droits d’exploitation du jeu Tetris pour rendre celui-ci disponible sur les ordinateurs, dans les salles d’arcade mais aussi sur la fameuse Gameboy (la console était pour rappel vendue avec le jeu).
Il était une fois Tetris
Le film passe rapidement sur la création du jeu en lui-même par un génie de la programmation. Il insiste en revanche bien sur un point : le créateur en question a été contraint de renoncer à tous les bénéfices relatifs à son invention parce le communisme fonctionnait ainsi. Dès que Tetris a commencé à attirer l’attention, de Nintendo notamment, les hauts-dignitaires, jusqu’aux plus hautes sphères du pouvoir (à l’époque Gorbatchev) ont verrouillé son exploitation, mettant en branle du même coup une sorte de machination perverse mue par les mensonges, les faux-semblants et les tentatives de corruption. En racontant cette histoire, relativement méconnue, le film Tetris devient ainsi beaucoup plus passionnant que prévu et c’est une excellente nouvelle.
De l’autre côté du rideau de fer
Réalisé par le relatif inconnu Jon S. Baird et co-produit par Taron Edgerton lui-même et Matthew Vaughn (le réalisateur des trois films Kingsman), Tetris a aussi la bonne idée d’adopter une approche visuelle pour le moins originale et cohérente, au vu de son sujet. Construit en chapitres, ici logiquement appelés niveaux, le long métrage emprunte une partie de son langage aux jeux vidéo, en pixelisant des scènes (la poursuite en voiture est un parfait exemple), et en adoptant un graphisme rétro du plus bel effet. Certes cela peut paraître accessoire mais au final, ça fonctionne. Surtout qu’à côté, le scénario s’avère très bien construit, ne laissant pas de place aux temps-morts et donc aucune chance à l’ennui.
Dans le rôle principal, Taron Edgerton, décidément l’un des acteurs les plus solides de sa génération, parvient à souligner la pugnacité et le courage de son personnage (qui est donc réel), bien secondé par des comédiens parfaitement en place (Toby Jones en tête). Sa performance, toute en nuances, nourrissant avec pertinence et un surplus de sensibilité la dramaturgie d’un film à n’en pas douter surprenant.
Cela dit, si l’histoire que conte le film est en effet surprenante, palpitante à bien des niveaux et donc très bien mise en image et racontée, elle permet également à une morale en revanche attendue et classique de s’inviter à la fête. Ce n’est en rien dérangeant mais disons qu’à la fin, en dépit de son caractère insolite et de ses gentilles audaces graphiques, Tetris finit bel et bien par ressembler à un biopic hollywoodien tout ce qu’il y a de plus classique. Un peu paradoxal non ? Pas de quoi gâcher le plaisir en tout cas.
En Bref…
Tetris, le film, grâce à son histoire incroyable, la performance de ses acteurs, sa mise en scène amusante et son écriture enlevée, s’impose comme une très bonne surprise. Certes plutôt conventionnel à l’arrivée, il parvient en tout cas à imposer sans aucun problème sa légitimité. Ce qui, au départ, n’était pas du tout gagné.
@ Gilles Rolland
Yes, je vais pouvoir le voir je suis enfin sur Apple+!