[Critique] THE RAID 2
Titre original : The Raid 2
Rating:
Origine : Indonésie
Réalisateur : Gareth Evans
Distribution : Iko Uwais, Julie Estelle, Yayan Ruhian, Julie Estelle, Arifin Putra, Oka Antara, Cecep Arif Rahman, Ryuhei Matsuda…
Genre : Action/Policier/Arts-Martiaux/Suite
Date de sortie : 23 juillet 2014
Le Pitch :
À peine sorti de l’immeuble dans lequel il mena une bataille sans merci contre un nombre impressionnant de truands et de flics corrompus, Rama doit faire face à une nouvelle mission à hauts risques : infiltrer un puissant syndicat du crime en se rapprochant dans un premier temps d’Uco, le fils d’un parrain de la mafia indonésienne. Il est pour cela bouclé dans une prison insalubre…
La Critique :
Lorsqu’il déboule avec The Raid, le réalisateur gallois Gareth Evans crée l’événement et livre un classique instantané du film de baston. Avec sa progression calquée sur celles des jeux vidéos, sa violence frontale et ses combats virtuoses, The Raid impressionne et marque durablement le public.
Un classique donc, mais pas pour autant un chef-d’œuvre. Spectaculaire, The Raid manque en effet d’épaisseur, avec son scénario anecdotique, privé de toutes ces petites choses qui donnent tout leur sel à l’action, comme les punchlines ou l’humour (ce qui parfois revient au même, comme par exemple dans Commando). Sans habillage, The Raid manque de recul et se prend trop au sérieux. Evans défouraille au premier degré. Au raz des pâquerettes. Au point de lasser sur la longueur. Les bastons, parfois interminables, sont au final aussi maîtrisées que lassantes, et le dénouement d’intervenir trop tard pour sauvegarder l’intégrité d’une rythmique bancale car sans arrêt dans le rouge.
Avec The Raid 2, c’est pire. Pire car cette suite fait presque une heure de plus que son prédécesseur. Et 2h30 pour un film d’action, c’est carrément trop.
On sent pourtant pourquoi Gareth Evans a souhaité jouer les prolongations. Ici, Rama, son héros incarné par Iko Uwais, joue les infiltrés. À peine sorti de la tour du premier volet, le jeune flic est amené à côtoyer la pire racaille du pire des syndicats du crime indonésien. Pas le temps de respirer. Rama est de retour dans l’action et tel Di Caprio dans Les Infiltrés, Rama tente de se la jouer fine en évoluant en eaux troubles pour mener à bien sa mission.
Et si il convient d’évoquer Les Infiltrés, de Martin Scorsese, c’est parce que The Raid 2 se rapproche vraiment d’Infernal Affairs, d’Andrew Lau et d’Alan Mak (dont Les Infiltrés est le remake américain).
En plus du pur trip d’arts martiaux à l’ancienne, The Raid 2 propose une intrigue mafieuse et souligne in fine une patine policière mise en sourdine dans le premier épisode.
En cela, The Raid 2 est le long-métrage le plus ambitieux de Gareth Evans. Non content de frapper fort niveau action, il tente de faire armes égales avec les classiques de l’infiltration, même si à l’arrivée, il n’en sort pas indemne.
Evans prend son temps pour poser les bases de son histoire. Pour donner du corps aux protagonistes les plus importants, il multiplie les séquences de dialogues et enfonce des portes ouvertes.
Le constat est alors dans appel : quand il se pose, entre deux séances de bourre-pifs, The Raid 2 pédale dans la semoule. Jamais passionnant, jamais véritablement tendu, le film d’Evans échoue à exploiter efficacement les enjeux de son scénario. Et comme il dure 2h30, on s’ennuie à intervalles réguliers. L’intention est louable, mais au final, le résultat plutôt décevant.
Reste donc l’action pure. Là, pas de problème. Aucun grain de sable ne vient se glisser dans les rouages d’une mise en scène nerveuse et inspirée. Autant Gareth Evans semble lui-même s’emmerder quand il filme ses personnages en train d’échanger des menaces, autant il s’éclate à les shooter en train de s’entretuer par tous les moyens possibles. Lisible et percutante, sa réalisation est un modèle du genre. Jamais on ne se perd dans l’action, y compris lorsqu’elle inclut un grand nombre de protagonistes (la baston dans la cour de la prison par exemple). Très attaché à rendre justice aux incroyables talents de ses acteurs, Evans fait le maximum pour sublimer leurs chorégraphies. Des chorégraphies aussi savantes que sauvages, pour autant de séquences franchement spectaculaires, bien que parfois également trop longues et répétitives.
Bien heureusement, The Raid 2 sait aussi varier les plaisirs. Il livre par exemple une poursuite en voiture mémorable, et sait aussi tirer avantage de son environnement, comme peut en témoigner la baston dans le métro, entre l’étonnante et badass Julie Estelle et toute une escouade de bodyguards armés de couteaux.
The Raid 2 joue à fond la carte de l’excès. Surtout du côté de la violence. Une violence qui verse régulièrement dans le gore bien craspec, sans s’interdire une incursion dans le glauque, justifiant pleinement son interdiction aux spectateurs âgés de moins de 16 ans.
Bancal et étrangement vain car incapable de conférer la même efficacité au fond et à la forme, The Raid 2 n’en reste pas moins une gentille baffe pour tous les amateurs. Les autres peuvent passer leur chemin. De toute façon, le film s’adresse uniquement aux fans de films d’arts-martiaux qui savent ne pas prendre de pincettes. Ceux qui font mal.
Toujours porté par le formidable Iko Uwais, The Raid 2 compte en cela plusieurs morceaux de bravoure, à l’instar de cette conclusion barbare remarquablement orchestrée. Et tant pis pour le scénario inutilement biscornu et les trois quart-d’heures en trop…
@ Gilles Rolland
Crédits photos : The Jokers / Le Pacte