[Critique] UNE VIE MEILLEURE

Rating:
Origine : France/Canada
Réalisateur : Cédric Kahn
Distribution : Guillaume Canet, Leïka Bekhti, Slimane Khetabi, Abraham Belaga, Nicolas Abraham, François Favrat, Brigitte Sy, Faycal Safi…
Genre : Drame
Date de sortie : 4 janvier 2012
Le Pitch :
Entre Yann, cuisinier en cantine scolaire et Nadia, serveuse et mère célibataire, c’est le coup de foudre. Plein de confiance, le couple décide de rénover un vieux restaurant dans la banlieue parisienne. Mais le rêve se transforme en cauchemar et les dettes s’accumulent. C’est alors que Nadia accepte un emploi à Montréal dans l’espoir de renflouer les caisses. Dans l’incapacité momentanée d’emmener son fils, Nadia le confie à Yann, qui reste à Paris. Rapidement, Yann et Slimane se retrouvent sans nouvelles de Nadia…
La Critique :
La carte illimitée est une belle invention. Parfois, elle nous pousse à sortir de nos propres sentiers battus pour aller s’aventurer dans des contrées redoutées et/ou inexplorées. Parfois on tombe mal et on doit se farcir un bon vieux navet, mais de temps en temps, le risque paye et on se retrouve devant un bon film.
Précédé d’une bande-annonce prometteuse, le dernier film du réalisateur de Roberto Succo avait pourtant de quoi rebuter. Un sujet social, un couple d’acteurs dans le vent, pour autant d’ingrédients qui auraient suffi à beaucoup pour pondre un pamphlet bien chiant sur les turpitudes d’un couple plein d’espoir broyé par la crise.
Et bien, non. Une vie meilleure vaut beaucoup plus que cela pour la simple et bonne raison qu’il transcende son sujet. Kahn apprivoise les clichés du genre et rythme son récit de façon magistrale. Filme son drame comme s’il s’agissait d’un thriller et brille principalement par sa grande justesse de ton et par son authenticité.
Dans le genre (et en France), Une vie meilleure est probablement ce que l’on a vu de mieux depuis belle lurette. Et même si le film trébuche et hésite notamment via quelques raccourcis hasardeux, il est difficile de ne pas louer les intentions d’un cinéaste qui a visiblement souhaité aborder plusieurs thèmes (les mères célibataires, la crise de l’emploi, les relations père-fils, mère-fils, le couple, l’ambition…).
Pour autant le long-métrage est souvent émouvant, dur, retombe la plupart du temps sur ses pieds et n’est jamais démago ou misérabiliste (grâce entre autre à un humour fin et salvateur). Et là encore ce n’était pas gagné, tant le personnage incarné par Guillaume Canet collectionne les erreurs tout en étant victime d’une malchance impitoyable. C’est là que l’enfant, intervient. Il tire inconsciemment vers la surface un homme qui se noie. L’entraide est mutuelle et il faut bien avouer que rarement le cinéma français n’aura su rendre ce genre de rapport aussi poignant (un peu à la manière -et même si c’est au fond complètement différent- de la relation du voleur incarné par Kevin Costner et de l’enfant qu’il kidnappe dans Un Monde Parfait d’Eastwood). A l’heure où Les Intouchables rendent le moral aux français, Une vie meilleure appuie le propos et souligne l’importance des rapports humains et de l’entraide en cas de situation difficile.
Il aurait été regrettable de voir une mise en scène si judicieuse et un scénario qui tient à coller de près avec une réalité âpre, gâchés par le jeu grossier d’acteurs pédants. Et pour le coup, la surprise est encore meilleure. Dominé par un trio remarquable, Une vie meilleure décolle rapidement. Guillaume Canet tient peut-être ici son meilleur rôle, trouvant chez le déjà remarquable Slimane Khetabi un partenaire de choix (la scène des “chaussures” est exemplaire). Idem pour Leïla Bekhti, enfin employée intelligemment, qui fait preuve de beaucoup de finesse et de sensibilité. Investis dans leurs rôles, chacun à leur manière, les comédiens donnent du corps et un supplément d’âme à une histoire qui, au départ, n’en manquait pourtant pas. Difficile alors de ne pas approuver.
@ Gilles Rolland