[Interview] Julien Seri nous parle de Night Fare, son nouveau film
Julien Seri n’est pas un débutant. C’est avec la production Luc Besson, Yamakasi, que le jeune réalisateur s’est dans un premier temps fait remarquer. Sont venus ensuite Les Fils du Vent, pour de nouvelles acrobaties urbaines, puis le nerveux Scorpion, avec Clovis Cornillac. Aujourd’hui, Julien Seri met les choses au point. Coup de bol, c’est chez nous qu’il met les choses à plat et dissipe tous les doutes que son curriculum pourrait faire planer sur Night Fare, son nouveau long-métrage.
Night Fare qui, ça tombe bien, se dévoile en ce début de semaine via un court trailer des plus appétissants. Tourné et écrit rapidement pour la simple et bonne raison que les forces en présence ont toujours su où elles allaient et comment elles voulaient y aller, Night Fare fleure bon le film de genre d’antan. Un pitch saisissant qui fait directement référence au Duel de Steven Spielberg (deux personnes ne payent pas leur course en taxi et voient le conducteur de ce dernier les prendre en chasse), une équipe aux petits oignons, et des intentions nobles et franchement pas raccord avec les clichés du cinéma français à papa, voilà pourquoi ce film a particulièrement attiré notre attention.
Notez que si le tournage s’est terminé il y a peu, la campagne de crowfunfing Ulule visant à récolter de l’argent pour peaufiner la post-production, est toujours en cours. Si vous désirez prendre part à l’aventure, c’est par ICI.
Le Pitch de Night Fare évoque clairement les deux principales influences avouées que sont Duel, de Steven Spielberg et Collateral, de Michael Mann. Pourtant, étrangement, le premier film qui m’est venu à l’esprit à la lecture du postulat de départ est le très efficace La Nuit du Jugement, de Stephen Hopkins. Qu’en pensez-vous ?
Pas bête du tout… Le film de Hopkins est un pur survival… À l’époque j’avais beaucoup aimé… Un pitch simple, visuellement travaillé, de bon acteurs… Bref une série B efficace.
Le crowfunding mis en place via le site Ulule tend à récolter 50 000€. De l’argent destiné à nourrir en partie l’aspect spectaculaire du long-métrage qui, quoi qu’il en soit, va se faire. Pensez-vous qu’il est nécessaire de passer par le crowfunding pour aujourd’hui donner corps à une vision personnelle pas spécialement en phase avec la majorité des productions françaises qui sortent dans les cinémas ?
Je ne peux que vous parler de mon cas… Dans le cadre de Night Fare il y avait une urgence qui nous empêchait de passer par les voies classiques… Donc nous avons vu des investisseurs privés, des producteurs, des fans, des amis et les contributeurs intéressés par l’aventure via ulule… Nous avons tout fait en 2 mois… Le pari était risqué et fou, mais nous y sommes arrivés.
Julien, Night Fare est-il en quelque sorte un moyen de sortir définitivement du giron de Luc Besson (après Scorpion), qui vous a proposé la réalisation de Yamakasi, votre premier long-métrage ? Est-il votre projet le plus personnel comme vos propos dans la vidéo de présentation peuvent le suggérer ?
Je suis sorti du giron de Besson pendant le tournage de Yamakasi… Ce fut une expérience douloureuse mais je n’en garde que de bons souvenirs. J’ai tellement appris. 8 ans se sont écoulés depuis Scorpion… C’est long… Trop long… Donc je pense pouvoir dire que ce film sera mon plus personnel… Je vais y mettre ces 8 années de réflexions, de frustrations, d’apprentissages, de maturité.
Et d’ailleurs, quel regard portez-vous sur vos deux premiers films aujourd’hui ?
Mes 3 premiers films… Juridiquement Yamakasi est mon premier film… Même si je n’en ai réalisé que 42%.
Les Fils du vent est un film malade. 32 scènes du scénario coupées à 4 jours du tournage car le producteur se foutait de l’histoire… Le film est devenu boiteux avant même le premier tour de manivelle… Le film était beaucoup trop ambitieux. Mais j’en suis très fier visuellement.
Scorpion est une immense fierté malgré ses faiblesses… Je suis très fier de mon travail avec les acteurs sur ce film… Très fiers de ses combats. J’aurais du me centrer plus autour de l’histoire d’amour et enlever l’intrigue policière.
N’est-il pas tentant de prendre le large devant les difficultés qui accompagnent la mise en chantier d’un « film de genre » en France ? Comme Alexandre Aja par exemple, ou encore comme Éric Valette, qui fait un peu la navette entre les États-Unis et la France ?
Sûrement, mais en produisant le film tel que nous le faisons, nous contournons ces difficultés. Et nous tournons en anglais.
Vous avez choisi de confier le rôle du Driver à Jess Liaudin, un combattant de MMA. N’est-il pas risqué, sachant qu’un bon méchant représente pas mal de choses dans un film de ce genre, de miser sur quelqu’un qui n’a pas beaucoup l’expérience du cinéma ? Mais peut-être que son rôle sera vraiment dans la veine de celui du conducteur dans Duel…
Jess travaille dans le cinéma depuis plusieurs années. Il a charisme incroyable… Le film ne sera pas un film de fight ou de MMA… Le parti-pris du driver sera une des surprises du film… J’en suis persuadé.
L’équipe du film est impressionnante. Que ce soit devant ou derrière la caméra. S’entourer d’autant de talents, aux cv aussi spectaculaires que solides, représente-t-il en quelque sorte une assurance quand on se lance dans une aventure comme celle de Night Fare ?
Ils sont un socle fondamental à l’existence même du film… Sans eux je ne pourrais pas me lancer dans cette aventure complètement folle.
Quel est l’objectif principal de Night Fare ? Comment se positionne-t-il dans le paysage cinématographique français ?
Faire un bon film… Et nous voulons prouvez que nous pouvons tourner des films même sans les aides des circuits classiques… Cela nous met en danger total, mais n’est-ce pas l’essence même de la production ? De la mise en scène ? Créer sans bouée de sauvetage… Je ne dis pas que je refuse de passer par le système traditionnel… Loin de la… Mais produire ce film dans ces conditions est revigorant pour moi.
Dernière question qui n’a rien à voir avec la choucroute : quels sont les derniers films qui vous ont marqué ?
Metro Manila, Under the Skin, The Raid 2.
Night Fare, de Julien Seri, avec Jonathan Howard, Fanny Valette, Jess Liaudin…
@ Propos recueillis par Gilles Rolland. Merci à Maximilien Poullein et au producteur Pascal Sid.