[Critique] LES GRIFFES DU CAUCHEMAR
Titre original : A Nightmare on Elm Street 3 : Dream Warriors
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Chuck Russell
Distribution : Robert Englund, Patricia Arquette, Heather Langenkamp, Craig Wasson, Jennifer Rubin, Laurence Fishburne, John Saxon…
Genre : Horreur/Épouvante/Suite/Saga
Date de sortie : 17 juin 1987
Le Pitch :
Assaillie d’atroces cauchemars, la jeune Kristen finit par être admise dans un hôpital psychiatrique dans lequel sont soignés des adolescents perturbés. Elle y fait la connaissance de Nancy Thompson, qui comprend vite que tous les patients sont terrorisés par celui qu’elle a vaincu quelques années auparavant, à savoir l’affreux Freddy Krueger. S’engage alors un combat sans pitié entre le croquemitaine et son ancienne proie…
La Critique :
Échec critique, le deuxième volet de la saga initiée par Wes Craven, a forcé les producteurs désireux de tout de même continuer à exploiter Freddy, à revenir aux sources. Freddy 3, alias Les Griffes du Cauchemar, renoue ainsi avec la dynamique du premier épisode et voit Freddy rester dans les songes, où il sévit (alors que le deuxième épisode le voyait s’introduire dans la réalité) et Nancy, l’héroïne des Griffes de la Nuit incarnée par Heather Langenkamp, est de retour. On oublie Freddy 2, on va de l’avant et c’est tant mieux.
Les Griffes du Cauchemar marque l’entrée dans la cour des grands d’un certain Frank Darabont, qui se fera remarquer quelques années plus tard en tant que réalisateur, avec Les Évadés et La Ligne Verte, sans oublier son implication dans la création de la série The Walking Dead, entre autres faits d’armes. Inexpérimenté (il n’a que quelques courts-métrages à son actif), Darabont démontre néanmoins d’une grande compréhension du personnage de Freddy et de son univers. Épaule par le réalisateur, Chuck Russell, futur responsable de The Mask et de L’Effaceur, qui signe son premier long-métrage, il permet très vite au spectateur de reprendre ses marques et ravive les codes chers au monument de Wes Craven, quelque peu piétinés dans La Revanche de Freddy.
On suit donc ce coup-ci une bande de jeunes pris pour cible par le monstre à la peau cramée, dans un hôpital psychiatrique. À leurs côtés, Nancy, l’héroïne du premier Freddy, devenue étudiante en psychologique (ou un truc du genre) est bien sûr tout à fait à même de guider les potentielles victimes dans leur combat contre Krueger. Garante à elle toute seule d’une certaine fidélité envers l’œuvre matricielle et du respect pour cette dernière, Heather Langenkamp retrouve avec un plaisir apparent les frusques de ce qui demeure encore aujourd’hui son plus grand rôle (ce qu’elle fera une nouvelle fois dans Freddy sort de la Nuit). Patricia Arquette quant à elle, sort de l’ombre (c’est son deuxième film et le premier d’envergure), tandis que Laurence Fishburne en profite aussi pour passer une tête. Soutenu par un casting relativement solide, ce Freddy 3 fait bonne figure sur bien des plans et s’avère également très divertissant.
Tout comme bon slasher qui se respecte, le film a pleinement conscience de l’importance de soigner les meurtres. Graphiquement parlant, ces derniers font preuve d’une inventivité renouvelée, en s’appuyant à chaque fois sur les obsessions propres aux victimes. Mention à l’un des premiers, qui voit un pauvre gamin se faire transformer en marionnette par un Freddy plus taquin que jamais et à l’encastrement dans une télévision d’une fille entretenant des rêves de gloire. Forfait ponctué par une réplique devenue culte de Freddy: « Jennifer, voici ta chance de passer à la télévision. C’est l’émission la plus écoutée salope ! ». Une preuve que le long-métrage n’oublie jamais sa condition de pure série B horrifique, avec tout ce que cela comprend de second degré.
Visuellement, Les Griffes du Cauchemar sait aussi étonner dans le bon sens. Les effets-spéciaux tout particulièrement, ont vraiment de la gueule, même si aujourd’hui, bien sûr, le temps ayant fait son œuvre, certains peuvent paraître désuets. Dans la plus pure tradition du grand cinéma d’épouvante, le film use de techniques diverses pour donner du corps au monde de Freddy. La stop-motion est convoquée, tout comme les images de synthèse, sans oublier les bons vieux maquillages et les flots de sang, pour faire bonne mesure. Pratiquement 30 ans plus tard, Freddy 3 fait encore excellente figure, en assumant totalement son statut et en n’essayant jamais vraiment de se frotter à son modèle, se focalisant plutôt sur l’importance de s’appuyer sur ses codes et de lui rendre hommage.
En levant un peu le voile sur les origines sordides de Freddy Krueger, notamment par le biais du personnage de la mystérieuse nonne, il reste pertinent, épaissit un peu le propos sans trop forcer le trait. Très ludique, autant grâce aux meurtres, tous très inventifs (c’est la grande force du film), qu’à cette idée plutôt maligne d’exploiter les capacités spéciales que chacun des gamins s’inventent dans ses rêves (l’un s’imagine en grand magicien, un autre en homme le plus fort du monde…), dans le but de mettre une bonne raclée à Krueger, Les Griffes du Cauchemar est sans problème l’un des meilleurs épisodes de la saga. Après le ratage du second, il fait souffler un vent de fraîcheur et redynamise un univers parfaitement exploité. À la fois original et connecté aux racines du concept imaginé par Wes Craven, il incarne à merveille une certaine idée d’un cinéma de genre généreux et se revoit toujours avec plaisir. De retour aux affaires, Freddy Krueger, le résident le plus illustre d’Elm Street, plus affûté et roublard que jamais, pète la forme, fin prêt à accompagner la douce agonie des années 80…
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Metrolitan FilmExport