[Critique] PALE RIDER
Titre original : Pale Rider
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Clint Eastwood
Distribution : Clint Eastwood, Michael Moriarty, Carrie Snodgress, Chris Penn, Sydney Penny…
Genre : Western
Durée : 1h55
Date de sortie : 14 août 1985
Le Pitch :
Un prêcheur arrive dans une petite ville minière de Californie sur laquelle un puissant clan exerce une menace permanente. Réveillant un espoir longtemps étouffé chez les habitants du village, l’homme ne va pas tarder à s’opposer à l’oppresseur en utilisant des méthodes peu orthodoxes…
La Critique de Pale Rider :
« And I heard, as it were, the noise of thunder. One of the four beasts saying, “Come and see.” And I saw, and behold a white horse. » Ainsi débute la chanson The Man Comes Around de Johnny Cash. Des paroles tirées de la Bible auxquelles se réfère également le scénario de Pale Rider. Un film dans lequel il est question d’un homme vêtu comme un pasteur, chevauchant un cheval blanc. Un sauveur providentiel renvoyant lui-même au quatrième cavalier de l’Apocalypse, dont le nom « Mort » résonne comme une promesse à l’intention des membres du clan Coy, qui ne cesse de harceler les villageois pour avoir la main mise sur leur terrain.
Revival
À l’époque où Clint Eastwood réalise Pale Rider, d’après un scénario de Michael Butler et Dennis Shryack, largement inspiré de celui du film L’Homme des vallées perdues de George Stevens, le western n’a plus trop le vent en poupe. Plus autant que dans les années 1970 en tout cas. En cela, Eastwood est déjà largement considéré comme l’un des plus nobles représentants du style. Presque 10 ans après Josey Wales, hors la loi, l’acteur-réalisateur entend, avec Pale Rider, raviver la flamme d’un genre un peu endormi en en extirpant l’essence même.
Sans fioritures
Sur bien des aspects, Pale Rider est un film aride et nerveux. Point d’artifice ici. Le western est ramené à son expression la plus dépouillée. La plus pure. Le héros, un prêcheur sans nom, ne fait pas non plus dans le détail, même si son existence même est auréolée d’un mysticisme tout à fait raccord avec les intentions du projet. Osant regarder en face des codes que beaucoup jugent alors désuets, Clint Eastwood s’approprie également la figure du sauveur providentiel qui arrive dans une ville en détresse. Un homme seul, amené à rétablir l’équilibre au sein d’une communauté reconnaissante mais pour autant intriguée par les nombreuses zones d’ombre qui entourent cette figure crépusculaire au visage taillé au burin.
Entre modernité et tradition
Pale Rider n’est pas un western comme les autres en cela qu’il embrasse bien des codes chers au cinéma d’action des années 1980, sans pour autant tourner le dos à ceux qui caractérisaient déjà les références jadis portées par John Wayne et Eastwood lui-même chez Sergio Leone. Son prêcheur n’aurait d’ailleurs pas dépareillé dans l’un des films de la trilogie du dollar. En face, les méchants, dont un magnifique Chris Penn, s’inscrivent pour leur part dans une traction plus moderne, en lien avec ce qui faisait alors dans le cinéma populaire. Et au fond, c’est ce mélange a priori curieux mais qui à l’écran, coule de source, qui confère à Pale Rider sa patine unique.
Crépusculaire, le long-métrage sait aussi faire parler la poudre à l’occasion de séquences purement « eastwoodiennes », au centre desquelles Clint s’en donne à cœur joie dans un registre qu’il connaît. Interrogeant la figure même du cow-boy tel qu’Hollywood l’a façonné, avec la complicité d’Eastwood d’ailleurs, Pale Rider relève parfois presque de la mise en abîme mais n’oublie jamais, au cours de son introspection, de jouer aussi la carte du pur divertissement.
Au final, s’il est plus accessible que Josey Wales, et à plus forte raison que des œuvres radicales comme L’Homme des hautes plaines, Pale Rider s’avère tout aussi dense et passionnant. Parce qu’il fait progresser le genre en interrogeant les fondements même de l’Amérique et de son rapport à la religion, avec une ambiguïté incroyable, il gagne sur absolument tous les tableaux. Il faudra par la suite attendre 7 ans avant de revoir Clint Eastwood revenir au genre avec Impitoyable. Un chef-d’œuvre qui pourrait presque s’imposer comme une suite de Pale Rider, en forme d’hommage définitif.
En Bref…
Chef-d’œuvre absolu, Pale Rider est un formidable western moderne, aussi crépusculaire que complexe et aussi divertissant que maîtrisé. Porté par la performance d’un Clint Eastwood plus charismatique que jamais, passionnant et dense, il s’impose sans mal comme l’une des réussites majeures du maître.
@ Gilles Rolland
Les superlatifs manquent quand on parle de Clint Eastwood que ce soit devant ou derrière la caméra.