[Critique] TRANSFORMERS
Titre original : Transformers
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Michael Bay
Distribution : Shia LaBeouf, Megan Fox, John Turturro, Jon Voigt, Josh Duhammel, Tyrese Gibson, Rachael Taylor, Anthony Anderson…
Genre : Science-fiction/Action
Date de sortie : 25 juillet 2007
Le Pitch : Une guerre civile a éclaté sur la planète Cybertron entre deux factions rivales de Transformers (des grands robots vivants qui peuvent prendre l’apparence de véhicules et de machines), les Autobots bienveillants et les infâmes Decepticons. La bataille continue sur Terre, où le jeune Sam Witwicky se trouve au centre d’un conflit intergalactique pour le contrôle d’un cube géant qui régie le destin de l’univers…
Critique :
Michael Bay est un clown incompétent qui devrait être envoyé dans l’espace pour vivre sur une planète déserte où il ne pourra plus jamais nous infliger ses films.
Ceci est, bien sûr, un fait bien connu. Certains vont jusqu’à le caractériser comme étant essentiellement « le Uwe Boll américain ». Comparaison très vague mais pas non plus incorrecte. La différence est que Bay est légèrement plus judicieux dans ses choix de licences à massacrer. Il n’empêche que c’est quand même l’homme sur qui Hollywood peut compter pour engranger des revenus au box-office. Son rôle en tant que roi du blockbuster est quasi-indiscutable, tout comme son manque de talent et de vision. C’est juste qu’il arrive à faire le strict minimum pour garder l’attention de son public, habituellement avec un budget titanesque, une tonne d’effets-spéciaux extraordinaires et un casting super sexy.
Les fans de la série télé originale et des BD ne demandaient pas la lune. Après tout, Transformers est adapté de la ligne de jouets Hasbro. C’est pas exactement du Shakespeare. Certains ont sans doute passé des années à imaginer leur propre scénario idéal, mais même un petit film d’action bien emballé aurait amplement suffi. On parle quand même d’une bataille entre robots. Qui refuserait un tel spectacle ?
Et même à ce niveau là, Transformers s’avère être un ratage total. Le plus fidèle des spectateurs aurait peut-être pardonné un mauvais film si le cœur y était. Hélas, Transformers est pire qu’un simple navet, c’est une erreur de cinéma. Son scénario est idiot et puéril, sa structure narrative ne tient pas debout et ses dialogues sont insipides, même pour une œuvre de Michael Bay. Les personnages sont trop nombreux, superficiels et mal interprétés (franchement, tous les acteurs qui peuvent faire une mauvaise prestation le font ici) et les robots sont indiscernables, inintéressants ou tout simplement saoulants. S’il y a un faux pas à faire, il est fait. Des idées intéressantes sont jetées aux orties, au profit du plagiat d’autres films (Le Géant de Fer, Independence Day, Jurassic Park, Men in Black, Mac et Moi, Da Vinci Code, E.T, pour n’en citer que quelques-uns…).
Ce que l’on remarque dés le début, c’est que Bay et compagnie n’en ont clairement rien à cirer du sujet de leur long-métrage. Ce n’est pourtant pas compliqué : des robots qui se foutent sur la gueule. Apparemment, même ça, c’est trop demander. On parle quand même d’un pitch qui pourrait être expliqué par un gamin de quatre ans faisant s’entrechoquer des jouets en plastique avec des bruitages laser, et même quelqu’un comme Michael Bay arrive à tout foutre en l’air. Comment est-ce possible ? Sans cette fondation basique, comment le film peut-il réussir ?
La seule compétence qu’on attribue généreusement à Bay, c’est son habileté à assembler des pétards Mammouths truffés de séquences d’action boostées à la nitro, remplies d’explosions et de voitures de sport, avec un son à crever les tympans. Pour une fois, on pourrait penser que son incapacité à représenter des émotions à l’écran serait avantageuse pour un film de robots. La blague…
C’est carrément incroyable que dans un film intitulé Transformers, il n’y a presque pas de robots. Malgré le fait qu’ils sont censés être les personnages principaux, les Transformers eux-mêmes sont mis de côté et réduits à des guest stars dans leur propre histoire. À la place, Bay passe un temps fou à se fixer sur son sujet visuel préféré : des plans masturbatoires de véhicules militaires, des tableaux héroïques de soldats américains sortant d’hélicoptères au ralenti, des salles pleines d’agents du Pentagone qui donnent des ordres à des techniciens cloués à leurs bureaux, des explosions majestueuses…le tout avec un soleil glorieux perpétuellement à l’horizon. De temps en temps, il met un robot en image de fond, pour nous rappeler qu’on ne s’est pas trompés de film.
Mais la majorité du long-métrage est centrée autour de Shia LaBeouf, qui joue Sam Witwicky, un jeune crétin qui devient invraisemblablement impliqué dans le destin de la galaxie quand il découvre que sa nouvelle bagnole est l’Autobot Bumblebee. Sam passe tout son temps à l’écran à suivre deux fils narratifs ultra-clichés : « un gamin qui devient un homme » et « un garçon et sa bagnole ». Une tentative pathétique de Bay d’imiter Grand Papa Spielberg (producteur en chef !) avec un copier/coller paresseux d’E.T. Sam jouant le rôle d’Elliot et les Transformers devenant ses acolytes glorifiés. LaBeouf montre parfois du talent prometteur et on peut comprendre pourquoi Spielberg l’a choisi pour d’autres projets (Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal, par exemple), mais ici il donne une prestation pourrie dans un film pourri.
Ce serait déjà assez si on n’avait que Sam et sa famille insupportable à nous crever le crâne. Malheureusement, Sam fait partie d’une des quatre sous-intrigues simultanées concernant des humains casse-pieds qui essaient de découvrir ce que mijotent les Decepticons.
Les autres histoires qui encombrent le scénario cousu de fil blanc comprennent les efforts ennuyants de Jon Voigt à organiser la protection de la nation et une escouade de marines coincée au Qatar, qui sert d’excuse à Bay pour continuer à nous bassiner avec ses fantasmes militaires (quand le moment était venu de faire un film sérieux sur l’armée, il n’était pas à la hauteur et le résultat était le désastreux Pearl Harbor). Il y aussi les aventures d’une jeune hacker(euse ?) et de ses amis qui essaient de déchiffrer un signal des Decepticons, fil narratif qui ne va nulle part et qui accomplit que dalle.
Quand le film ne se prend pas prétentieusement au sérieux, il devient une comédie inappropriée, débordant d’instants torrides et débiles. Rares sont les films où les personnages sont conçus comme étant aussi agressivement lourdingues que ceux que l’on trouve dans Transformers. Et ce n’est pas une bonne chose lorsqu’on commence à partager l’envie des Decepticons de tuer tout le monde. On peut aussi s’interroger sur la dévotion d’Optimus Prime à préserver la vie humaine, surtout quand chaque être humain qu’on voit à l’écran est invariablement un petit crétin archi-chiant à s’en tirer une balle.
Un grand merci au pervers qui a eu l’idée infantile de nous montrer un Autobot uriner sur John Turturro. L’image de Turturro, un acteur de haut-calibre qui a passé une décennie dans le cinéma indépendant, obligé de jouer un agent secret à deux balles, contraint de se déshabiller dans la rue pour qu’un robot l’asperge de lubrifiant, sert d’illustration à l’intérêt que Bay porte à son film : il pisse dessus.
Plus préoccupant encore sont les stéréotypes qui envahissent le film d’une subtilité minimale, voir presque raciste. Du soldat hispanique qui bavarde exagérément en espagnol, aux caricatures blacks, qui sont inévitablement de gros balourds qui gueulent sur leurs grand-mères. La faute en revient ici aux scénaristes, Roberto Orci et Alex Kurtzman, également responsables du reboot de Star Trek dont la qualité était à peine au-dessus de la moyenne.
Les scènes d’action dans Transformers sont superbes – quand on peut les voir. Bay a un amour immodéré pour la shaky-cam, où tout semble devenir plus intense quand on secoue la caméra comme un taré. Le résultat donne une frénésie visuelle à la limite de la lisibilité qui fout la migraine au spectateur. Il y aussi une baston entre Bumblebee et Barricade qui se passe hors-champ, parce que le cinéaste veut qu’on regarde Shia LaBeouf se faire botter le cul par un mini-robot tandis que Megan Fox (qui a l’air d’avoir dix ans de plus que lui et devrait faire partie des Transformers tellement elle est inexpressive) essaie de l’en empêcher avec une perceuse. Ouais, merci Mike. De toute façon, une bagarre entre deux robots pesant plusieurs gigatonnes nous aurait ennuyé.
Michael Bay n’a que la quarantaine. Espérons alors qu’un jour il en aura marre de ces bêtises et retournera faire un vrai film. Après tout, il n’avait que la trentaine quand il a fait Rock et Bad Boys, deux de ses long-métrages les plus attachants. Il a passé des années dans le monde de la télévision. Et ses débuts étaient prodigieux, comme ceux de Steven Spielberg. Mais Spielberg avait 47 ans quand il a fait La Liste de Schindler. Michael Bay semble évoluer dans la mauvaise direction.
@ Daniel Rawnsley
Crédits photos : Paramount Pictures