[Critique] TRAQUE À BOSTON
Titre original : Patriots Day
Rating:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Peter Berg
Distribution : Mark Wahlberg, Kevin Bacon, Michelle Monaghan, John Goodman, J.K. Simmons, Jimmy O. Yang, Jake Picking, Alex Wolff, Rachel Brosnahan…
Genre : Drame/Thriller
Date de sortie : 8 mars 2017
Le Pitch :
15 avril 2013 : le marathon de Boston débute. Alors que les coureurs s’élancent, les forces de police s’organisent pour couvrir l’événement. Le Sergent Tommy Saunders pour sa part se trouve à la ligne d’arrivée quand une première détonation retentit, rapidement suivie par une deuxième. La ville plonge dans le chaos. La police, rapidement rejointe par le FBI, tente de comprendre comment un tel drame a pu se produire. Débute une traque à l’ampleur inédite pour retrouver le ou les coupables. Histoire vraie…
La Critique de Traque à Boston :
Peter Berg n’est pas trop du genre à se reposer sur ses lauriers. 5 mois après la sortie de Deepwater, son drame spectaculaire sur l’explosion de la plate-forme BP, le réalisateur retrouve Mark Wahlberg pour une troisième fois et aborde un sujet encore plus sensible, à savoir les attentats du marathon de Boston survenus en avril 2003…
Panser les plaies de l’Amérique
Il n’y a pas si longtemps associé à un cinéma décomplexé, parfois comparé à Michael Bay, avec des films comme Bienvenue dans la Jungle ou encore l’inénarrable Battleship, Peter Berg a opéré un virage beaucoup plus sérieux avec Du Sang et des Larmes, son survival guerrier, qui a également marqué sa rencontre avec Mark Wahlberg. Dès lors, les deux hommes ne sont plus quittés et ont semble-t-il entrepris de panser les plaies de l’Amérique. Avec Du Sang et des Larmes, mais aussi avec Deepwater, qui bien que relatant une plus grosse catastrophe écologique de récente mémoire se focalisait avant tout sur les hommes travaillant sur la plate-forme BP. Aujourd’hui, c’est au terrorisme que le réalisateur s’intéresse, 4 ans après les faits qu’il entend illustrer. N’était-ce pas trop tôt, sachant que la problématique du film fait écho à des tragédies très récentes et s’inscrit dans une actualité extrêmement douloureuse ? La question méritait d’être posée mais le long-métrage rassure, tant, contrairement au World Trade Center d’Oliver Stone, Peter Berg fait à la fois preuve d’une grande pudeur, mais aussi d’une capacité à prendre de la distance.
Car si Traque à Boston est bien entendu un drame difficile qui parle d’un sujet qui ne peut que nous toucher, il s’impose aussi rapidement comme un formidable thriller habité d’un espoir salvateur qui quoi qu’il en soit, s’avère aussi très cinématographique.
Course contre la montre
Avec son approche très documentaire, avec notamment ses images d’archives insérées ici ou là, Traque à Boston entend ne jamais s’éloigner des faits. Si le personnage que campe Wahlberg n’a pas vraiment existé et se pose comme la synthèse de plusieurs policiers et autres membres des équipes de secours, la majorité des autres comédiens incarne les vrais acteurs de la tragédie et de l’enquête qui a suivi. Des personnages qui prennent part à une chasse à l’homme captivante, que Peter Berg orchestre de main de maître. La tension n’en finit plus de monter. L’émotion non plus. Les deux sont liées. Jamais l’action ne prend le dessus au détriment des sentiments. D’où le côté très pudique du récit qui n’en fait jamais trop. Et ce n’est pas peu dire de la part du gars qui a adapté Touché-Coulé sur grand écran. Le meilleur exemple étant cette incroyable séquence de guerilla urbaine, intervenant dans le dernier tiers du long-métrage, qui démontre de la maestria de Berg en la matière et qui constitue un climax d’une force incroyable. Très lisible, efficace, nerveuse, la mise en scène fait le nécessaire pour nous clouer à notre fauteuil. Lors de cette scène en particulier mais aussi avant et après. Au moment du dénouement notamment, admirable lui aussi de part sa parfaite construction et sa capacité à nourrir un suspense assez inouï sans céder aux sirènes d’un sensationnalisme qui aurait été parfaitement hors sujet.
Le jour des héros
Finalement, seule la fin en fait légèrement trop, même si ce n’est pas la démarche qui est montrée du doigt mais l’accumulation. Traque à Boston se termine exactement comme Deepwater. La réalité prend le pas sur l’adaptation. Les acteurs laissent la place aux véritables intervenants, les trompettent débarquent et le patriotisme aussi. C’est certes émouvant mais aussi un peu convenu, surtout au vu de tout ce qui a précédé. Parfois carrément proche de l’intensité d’un excellent épisode de 24, Traque à Boston est un authentique thriller. Un film remarquable, qui se termine comme un documentaire, en rendant hommage aux héros. Des héros que John Goodman, Kevin Bacon, Mark Wahlberg, Michelle Monaghan et tous les autres incarnent avec force et vigueur. Parfaits dans leurs rôles respectifs, ils tiennent bien leurs positions. Mark Wahlberg en particulier, qui après Deepwater, se pose une nouvelle fois comme le type parmi d’autres, que le drame va révéler, au-delà de sa simple fonction dans le corps de police de la ville de Boston. Pas un héros au sens « film d’action américain des années 80 » mais un héros du quotidien. Un rôle qui va à merveille à l’acteur. Un de ses meilleurs, pas de doute là-dessus. Sobre, plein de nuances, Wahlberg est excellent. Vraiment.
Sur le fil du rasoir
Peter Berg se prête ici à un exercice extrêmement tendu. Surtout lorsqu’il choisit de placer ses caméras dans le camp des terroristes. Pour nous dire quoi ? C’est peut-être un peu le problème tant son discours à ce niveau, reste un peu en surface, même si on peut comprendre. Les scènes de préparation, puis la traque, s’avèrent ainsi encore plus glaçantes mais démontrent aussi d’une certaine frilosité à aller vraiment au bout des choses, malgré les petits détails qui viennent apporter quelques nuances. Idem du côté américain. Le fait de principalement nous offrir le point de vue d’un « simple » policier, permet à Traque à Boston de ne pas trop parler de politique mais au fond, il le fait bien sûr quand même. Sans trop nuancer là encore, au risque d’être taxé de propagandiste, ce qui serait assez injuste comme peut le prouver notamment la scène d’interrogatoire où se lit en filigrane la volonté de Berg, comme avec Deepwater, d’interroger le système par le biais de ces effrayantes zones d’ombre.
Cela dit, rien ne vient encombrer la bonne marche de ce thriller de haut-vol, humaniste et sensible, qui donne lieu à suffisamment de sueurs froides pour garder l’ennui à distance et pour encourager le constat suivant : et si il s’agissait du meilleur Peter Berg ?
En Bref…
Traque à Boston est un formidable thriller. Rythmé, impeccablement mis en scène, habité par des acteurs concernés, il brille par sa sobriété et par sa pertinence, notamment quand il se refuse à sombrer dans l’excès (la majorité du temps) et par sa propension à néanmoins nous proposer des séquences terriblement intenses. Peter Berg à son meilleur.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Metropolitan FilmExport
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