[CARNET NOIR] JEAN-MARC VALLÉE A TIRÉ SA RÉVÉRENCE
Jean-Marc Vallée est né le 9 mars 1963 à Montréal. Il étudie le cinéma au lycée dès 1979, puis à l’univesité. En 1992, il réalise un premier court-métrage, Stéréotypes, puis un deuxième, Les Fleurs Magiques, en 1995 avant son premier long, Liste Noire, qui lui vaut de se faire remarquer de l’autre côté de la frontière. En 1997, il sort son deuxième, Los Locos, vendu comme la suite de Posse : La Revanche de Jesse Lee, avec Mario Van Peebles (également au scénario) et Danny Trejo. Deux ans plus tard, c’est Burt Young, le Paulie de Rocky qui passe devant la caméra de Jean-Marc Vallée pour Loser Love. Après une période creuse ponctuée d’une réalisation de deux épisodes pour la série The Secret Adventures of Jules Verne, il connait enfin la consécration en 2005 avec C.R.A.Z.Y.. Cette chronique d’une famille dysfonctionnelle fonctionne comme une radiographie de la classe moyenne canadienne des années 60/70, autour du passage à l’âge adulte et de la crise d’identité sexuelle du jeune Zachary, le tout orné d’une superbe B.O. (David Bowie, Rolling Stones, The Cure ou encore Pink Floyd). Le film reçoit plusieurs prix à Toronto et à Vancouver (dont 3 pour les acteurs) ainsi que 11 Prix Génie (Oscar du cinéma canadien) sur 12 nominations et 14 Prix Jutra (récompense du cinéma québécois).
En 2009, Jean-Marc Vallée filme Emily Blunt dans Victoria : Les Jeunes Années d’une Reine, coproduit par Martin Scorsese et la duchesse d’York Sarah Ferguson. Deux ans plus tard, il signe une co-production franco-canadienne, Café de Flore, avec Vanessa Paradis. Encore une fois, le casting reçoit plusieurs prix. C’est en 2013 que Jean-Marc Vallée explose mondialement auprès du grand public. Histoire vraie d’un cow-boy de rodéo homophobe qui contracte le VIH et qui créé le premier des 12 clubs qui permettront aux séropositifs américains de se fournir en médicaments étrangers, Dallas Buyers Club est un triomphe. Pluie de récompenses (43 au total) pour Matthew McConaughey et Jared Leto, dont 3 Oscars, 2 Golden Globes, 2 SAG Awards, 2 Critics’ Choice Movie Awards.Un an plus tard, Vallée offre à Reese Witherspoon son plus grand rôle, son plus extrême aussi. Wild retrace la véritable épopée de Cheryl Strayed, jeune femme à la dérive qui va faire une randonnée en solitaire sur les 1700 km du Pacific Crest Trail. La superbe performance de Reese Witherspoon et Laura Dern leur vaut une nomination respective aux Oscars.
En 2015 sort Demolition avec un Jake Gyllenhaal incapable de montrer le moindre signe de deuil et qui va compenser en démolissant tout ce qui lui passe par la main. Ce sera le dernier film du réalisateur. En 2017, il co-créé (avec David E. Kelley) et réalise la série Big Little Lies, adaptée du roman de Liane Moriarty, avec un superbe casting : Reese Witherspoon, Nicole Kidman, Shailene Woodley, Laura Dern, Zoé Kravitz, Alexander Skarsgård, Adam Scott. Le sujet difficile (les violences faites aux femmes), l’interprétation (les actrices et acteurs livrent une des plus grandes performances de leurs carrières respectives), la photo, la B.O. (comme toujours chez Vallée) en font une des meilleures séries de l’année, et l’un des plus grands succès critiques (9 Emmys, 4 Golden Globes, 4 Critics’ Choice Television Awards). En 2018, Jean-Marc Vallée adapte le roman Sur Ma Peau de Gillian Flynn. Traitant de la relation toxique entre une mère et sa fille, Sharp Objects offre à Amy Adams et Patricia Clarkson une performance viscérale et connait un certain succès critique (2 Golden Globes, un Satellite Award et 2 Critics’ Choice Television Awards).
Excellent directeur qui a offert des rôles marquants à ses acteurs, faiseur d’images pour des récits souvent difficiles, Jean-Marc Vallée a su s’entourer des meilleurs à chaque poste et leur offrir du caviar. Auteur d’une filmographie parfaite qui a en plus donné à la télévision deux shows sublimes, Jean-Marc Vallée est l’un des réalisateurs les plus passionnants de ces dernières années. La nouvelle de sa mort le 25 décembre 2021 à l’âge de 58 ans nous a tous profondément attristé. Le septième-art perd un artisan magnifique.
@ Nicolas Cambon